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Vendredi 12 juillet. Premier matin dans mon nouvel appartement. Mon nom ? Chara Mills, 26 ans, fraîchement débarquée à Paris pour refaire ma vie à zéro.

Lescartons jonchaient le parquet usé du logement depuis déjà quelquesheures, mais je passais la plupart de mon temps cachée derrière lesrideaux que je venais d'installer au dessus de mes baies vitrées àadmirer la nouvelle vue. Bon d'accord, pas de paysage de rêve, monentreprise n'est pas encore assez florissante pour espérer m'acheterun appartement avec une vue sur la Tour Eiffel.

Cen'était pas très grand, mais j'ai décidé que ce serait tout demême confortable, donc ça le sera, j'en suis persuadée. En toutcas, mon endroit favori restera là où j'ai installé mes bellesétagères remplies de bibelots et de romans que j'adore.

Jene suis qu'au second étage, alors il est relativement faciled'oserver par la fenêtre la vie parisienne qui s'y découle dans lequartier. Il commençait d'ailleurs à pleuvoir quand j'apperçue unhomme tout en noir, courir, sa veste de smoking au dessus de la têtepour, je supposais, ne pas décoiffer sa coupe de cheveux impeccable.Le souci, c'est qu'en l'observant, je me rendis vite compte qu'ilavait perdu son porte-feuille; ni une, ni deux, j'ouvris la fenêtrepour l'interpeler. Dans un élan de réflexe, il tourna la tête enentendant le bruit de ma vitre grincée, mais au dernier moment, jeme ravisa de dire quoique ce soit. Et bien oui, qu'allait-ilrétorquer en découvrant que je le regardait depuis mon appartement? J'avais déjà eu assez de problèmes dans le passé à cause demes bonnes, mais hâtives attentions. Malgré cela, au final, jem'inquiétais tout de même qu'on ne le lui vole : je claqua lecarreau, la porte d'entrée et je descendis à toute vitesse lesmarches, de peur que l'homme ne disparaisse dans les rues de lacapitale.

Lesgouttes s'intensifiaient et la pluie battait enfin son plein.Malheureusement pour moi, je n'avais pas pris la peine de prendre lemoindre parapluie, mais je m'en fichais, il fallait que je joue leshéroïnes, comme d'habitude. La gratitude des gens me montaitpourtant toujours à la tête, c'est une drogue dont j'étais accro.

Larue pavée accumulait de plus en plus de flaques alors que j'essayaisde repérer le porte-feuille. Par chance, seulement après une longueminute, mes yeux se sont rivés sur l'objet en question. Trèsheureuse d'avoir pu l'appercevoir à temps, je me rua dessus pour lerécupérer. C'était sans compter sur la plus belle des glissades demon existence, parce qu'en effet, le pavé sous mes pieds étaitmouillé, un petit peu trop même. J'attrapais tout de même cettechose de cuir, entièrement imbibé de toute cette eau, mais pourcouronner le tout, j'entendis un grognement agaçé arriver vers moi.En tournant la tête, quelle ne fût pas ma surprise en découvrantque l'homme avait fait demi-tour et me jetait un regard aussi noirque le ciel actuellement.

"Ceporte-feuille n'est pas à vous !" Hurla-t-il en approchant.

Le plus pénible, c'est que plus il approchait, et plus je le trouvais beau. Il avait des cheveux bruns, coiffés en arrière, des yeux noisettes magnifiques malgré son regard de dégoût envers moi, mais aussi une silhouette élancée qui laissait entrevoir sa musculature à travers sa chemine blanche plus que trempée.

Après l'avoir trop longuement contemplé, il me fit vite redescendre surTerre avec son air arrogant et son ton condescendant. Je ne puisplacer le moindre mot pour expliquer la situation qu'il était prêt à m'arracher ses affaires des mains.

"Rendez-moi mon porte-feuille. Insista-t-il.

- Vous ne m'aidez même pas à me relever d'abord ? Rétorquais-je, légèrement agacée par la situation.

- Je n'aiderai aucun voleur. Toute ma vie est dans cet objet, restez par terre si cela vous chante."

Je lâcha l'étui rempli de cartes en tout genre et honnêtement j'avais honte d'avoir autant voulu attirer son attention. Je me retrouvais noyée par la pluie et par la rage d'avoir bien voulu faire, les passants me mataient comme une bête de foire, ça en devenait pénible. De ce fait, je me suis levée et en tentant de rentrer chez moi, j'étais stupéfaite d'avoir oublié mes clés alors que la porte ne s'ouvrait que dans un seul et unique sens. Les larmes sont montées, je vous le garantis, mais fort heureusement, j'avais pris le temps de prendre mon smartphone et bien que tombé dans l'eau avec moi, il s'allumait toujours étonnement. Qui devais-je appeler au final ? Mon propriétaire ? Un serrurier ? Je n'ai même pas encore rencontré mes voisins pour potentiellement leur demander de l'aide. C'est la première fois que cette situation m'arrive. J'étais, en plus, toujours énervée en pensant à cet énergumène impoli, qui n'a même rien cherché à savoir, j'avais un mal fou à avoir les idées claires. Les parisiens sont-ils tous ainsi ? Je sentais tellement de paires d'yeux me juger, mais personne ne m'avais aidé à me relever, je sens que je vais avoir du mal à m'acclimater à cette ville.

Alors que j'étais encore en train de grommeler devant la porte d'entrée, le téléphone toujours en main et les gouttes me tombant sur les joues et le bout du nez, j'entendis la porte s'ouvrir pour mon plus grand bonheur : et en effet, c'était mon merveilleux voisin – oui oui, je dis bien "merveilleux" car je pense que c'est la seule personne gentille de cette fichue journée, bien qu'il ne doit pas le savoir –. J'entrais en courant dans les couloirs du bâtiment sous le regard ébahi de ce dernier, j'étais enfin à l'abri. Tout l'agacement que je ressentais commençait doucement à descendre et tant mieux, j'avais assez traîné comme ça, il fallait absolument que je m'occupe de mes cartons. Cette nouvelle vie commençait du mauvais pied à cause de mes fâcheuses habitudes, alors il fallait absolument y remédier avant d'arriver au nouveau local de mon entreprise le lendemain.


Le samedi matin est arrivé un petit peu trop vite, malgré la nuit d'enfer que je venais de passer à cogiter aux évènements d'hier. Je réfléchissais au fait que ce mec pouvait totalement emprunté cette rue chaque jour et que, par extension, j'avais la possibilité de le recroiser. Mais tant pis, si je commence à penser comme ça, je n'arriverai jamais à apprécier cette nouvelle chance que j'ai de refaire ma vie. Et c'est sur ces mots que je m'en suis allée, parfaitement apprêtée, à la découverte de l'endroit où j'allais pouvoir poser bagage professionnellement parlant.

Honnêtement, je n'avais jamais visité la capitale française. J'étais passée juste plusieurs fois en coup de vent et encore, je n'ai pu réellement découvrir que la Gare de Lyon et le train était en retard. Je me suis rendue compte qu'au final, la ville n'étais pas si belle, elle était très romantisée par les tourismes alors que les rues émanaient une odeur nauséabondes et qu'il pleuvait absolument tout le temps. Je ne dis pas que je suis déçue, mais je pense que la rencontre de la veille a terriblement affecté mon jugement. Pourtant, en passant devant le Palais Garnier, mon cœur me susurrait que Paris avait tout de même du charme et encore plus en sachant que dans quelques instants j'allais découvrir où j'allais passer la plupart de mon temps.

Et nous y voilà. La vitrine de ma nouvelle boutique. Je vous avais dit que j'étais à mon compte ? Parce que c'est le cas. Et après tant de temps à travailler si dur et à me serrer la ceinture – Dieu sait que c'était difficile dans mon pantalon taille 40 trop petit, j'ai enfin réussi à ouvrir une entreprise physique où accueillir mes clients en bonne et due forme. Bon d'accord, le lieu est un  petit peu funeste, je ne l'avais pas visité avant de signer et il y a beaucoup de choses à faire avant l'ouverture officielle qui se déroulera au début du mois prochain. Il fallait, dans un premier temps, que je prévisualise l'emplacement des meubles qui doivent arriver dans l'après-midi et avant tout, le sol manquait d'un bon coup de serpillère. Par chance, les murs avaient des tons roses pâles qui correspondaient à merveille avec l'ambiance cocooning que je voulais donner à l'endroit. Il y avait aussi des toutes petites fleurs colorées qui se mariait très bien avec le reste du papier peint et, soyons honnêtes, c'était assez vieillot, mais parfait pour mettre un coin lecture.

Le mois d'août est arrivé plus vite que je ne le crûs. Entre la fin du déménagement, le travail, la visite de la capitale et les travaux de la boutique, le temps passa à une vitesse folle. Je me regardais dans le miroir quand j'ai commencé à faire un monologue à voix haute :

"Mais en parlant des travaux, il m'est arrivé beaucoup trop de choses, entre les cartons de livres qui n'arrivaient pas malgré les dates indiquées par les transporteurs, le mec qui devait m'installer la fibre et qui n'est pas venue le jour prévu, ce qui a décalé des millions de choses importantes comme la configuration du logiciel de caisse. Raah, j'ai envie de m'arracher les cheveux.

- Mais à qui est-ce que tu parles ?" Entendais-je derrière moi.

C'est vrai que j'avais oublié de vous préciser que j'avais installé une application de rencontre et que, si à la base je voulais surtout faire des rencontres pour m'aider à supporter la solitude, j'ai couché avec quelques beaux gosses. Sauf que là, j'avais zappé qu'il y en avait encore un chez moi et que vu le discours que j'ai commencé à faire en me regardant, il ne me rappellera pas. Tant pis, c'était un bon coup. La veille il avait léché l'entièreté de mon corps comme jamais, c'était divin.

"Amon miroir. Lui ai-je finalement répondu.

- Et ça t'arrive souvent ? Parce que c'est flippant.

- Oui oui, évidemment.

- Tu devrais consulter si c'est le cas. Je m'en vais, on se reverra."


 Le second degré et lui, ça faisait mille.

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 26 ⏰

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Cette nuit-làOù les histoires vivent. Découvrez maintenant