Oka Makino
Le même jour, 20h09 - Quartier du bas - Maison de Oka
– Papa est dans les bouchons..., annonça ma mère en lisant le message que mon père venait de lui envoyer.
– On se mettra devant la télé en l'attendant pour le dessert, dis-je. Vous avez de la chance, les garçons. Vous allez pouvoir veiller un peu plus tard ce soir.
Pour réponse, mes frères crièrent de joie. Comme s'ils ne passaient pas déjà leur soirée à jouer tous les deux dans leur chambre jusqu'à point d'heure. Mais je les comprenais. J'avais aimé, moi aussi, lorsque j'avais leur âge, regarder la télévision avec mes parents avant d'aller me coucher. S'il arrivait qu'ils ne fassent pas attention à l'heure, je me figeais dans l'espoir qu'il m'oubli et que je reste plus longtemps en leur compagnie. Je supposais que nous passions tous par cette phase-là, en grandissant.
Ma mère se leva de sa chaise en prenant son assiette et ses couverts, et je fis de même tandis qu'elle murmurait une chanson que je ne reconnaissais pas. J'aperçus ensuite du coin de l'œil sur son téléphone, posé sur la table de la cuisine, qu'elle recevait un appel.
– Ton téléphone sonne, l'informais-je. Décroche, je vais laver nos assiettes.
Elle déposa son assiette dans le lavabo en me remerciant, puis récupéra son portable. Je me mis ainsi à faire la vaisselle alors qu'elle lisait le nom du contact l'appelant.
– C'est papa ? demanda Tadashi.
– Non... C'est le boulot.
– À cette heure-ci ? demandais-je en essuyant la première assiette. Les garçons...
Je m'apprêtais à dire aux garçons de m'apporter leurs assiettes pour que je puisse les laver, et alors que mon regard les cherchait, il tomba sur le visage pâle de ma mère qui portait le téléphone à son oreille.
– Allô...? Oui... je suis bien chez moi.
Elle me lança un regard inquiet, si bien que j'en lâchais nos couverts pour me rapprocher d'elle.
Que se passe-t-il ?
– Ça va ? demandais-je doucement.
Au lieu de me répondre ou même de hocher la tête, elle se précipita dans le salon où elle trouva un morceau de papier et un stylo. En revenant vers moi, elle se mit à écrire à une vitesse ahurissante.
Elle me tendit le papier, le visage criblé par la peur.
"Monte à l'étage avec les garçons. Enfermez-vous dans la salle de bain."
– O-Oui... Je m'habille et je vous ouvre.
Effrayée par l'expression qu'affichait ma mère, je ne réfléchis pas une seconde avant de suivre ses directives.
Koshi et Tadashi nous regardaient, et mes yeux me disaient qu'ils comprenaient que quelque chose n'allait pas. Je leur fis alors signe de ne plus parler, en positionnant mon index devant mes lèvres, avant de les inviter à me suivre.
En bas des escaliers, j'ordonnais silencieusement à mes frères de passer devant moi, et je lançais un dernier regard à ma mère qui me fit comprendre, par un mouvement de tête, que je devais monter à mon tour.
En haut, je vis que les jumeaux m'attendaient dans le couloir, ne sachant pas quoi faire.
– Dans la salle de bain, chuchotais-je.
Sur le passage, je fermais les portes de nos chambres, que nous avions laissées grandes ouvertes en les quittant pour aller manger.
Une fois tous les trois entrés dans la salle de bain, je nous enfermais à l'intérieur en tournant le verrou vers la gauche.
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Le Fil Rouge
Mistério / SuspenseSept lycéens. Sept personnages principaux. Sept destins entremêlés. Abandons, conflits familiaux, pauvreté, harcèlement, solitude, angoisse... Leurs vies étaient marquées par des cicatrices invisibles que personne ne voyait, ou presque. Cette année...