Petite raclette chez les Lomunes ?
Moon
Je suis plutôt de nature tranquille. Si on considère que faire quelques bêtises de temps en temps ne porte pas préjudice au fait d'être de nature tranquille, je suis quelqu'un qui l'est. Pas sage, pas forcément obéissante selon les situations, mais je suis quelqu'un qui ne s'énerve pas rapidement, qui est indifférente au monde qui m'entoure le plus souvent, et qui ne fait pas de cas la plupart du temps.
Par contre, s'il y a une chose qui me met hors de moi, c'est le fait qu'on me réveille en pleine nuit.
Deux Charingers révoltés ont toqué puissamment à la porte, ignorant le fait que nous dormions comme des bébés avec Romary, juste pour nous lever encore plus sauvagement. Actuellement, je suis coincée sur l'épaule d'un des surveillants qui a pris les devants comme je refusais de bouger de mon lit. Il faut me comprendre : une haleine à faire peur, un pyjama peu glamour, les cheveux gonflés et le cerveau dans le coaltar. Si Romary a un peu protesté — surtout quand ils ont retiré sa couverture —, elle n'a pas tenue bien longtemps, trop flippée face aux dents pointues des deux hommes.
Ce n'est pas mon cas.
— Mais lâchez-moi, merde !
Le Charingers soupire bruyamment avant de tenir plus fermement mes jambes. Perchée sur son épaule, portée comme un sac à patate, je me sens impuissante mais surtout ridicule. Une grande partie du dortoir s'est réveillée en entendant le raffut dans notre chambre, ce qui me vaut une haie d'honneur de moqueries et de chuchotements. Comme je suis dans le sens inverse de notre progression, je vois Romary qui avance doucement, la tête baissée, les joues roses. La pauvre semble vraiment prendre à cœur les chuchotements de nos camarades et se taper la honte de ma vie alors que moi je m'en fiche royalement. En soit, je ne connais personne ici, ou pas assez pour être atteinte par leurs paroles. Par contre, malgré ce qu'elle dégage de positif et de déterminé, Rom' est le genre de personne qui adapterait son apparence pour se plier aux exigences de son entourage alors qu'elle a tout pour elle.
La voir dans cet état me met encore plus en rogne.
Pris d'un élan de colère que je ressens vibrer jusque dans mon thorax, je donne un coup de genou puissant vers le torse du surveillant — la seule chose que je puisse faire dans cette position. Si c'est une tentative que je pensais vaine dans mon cas, il ne semblait pas s'y attendre car je touche son corps, lui arrachant un gémissement plaintif. À peine il a le temps de parer un autre coup que je relance mon genou et cette fois, je le fais flancher par la puissance de mon attaque.
Quelques bruits de surprises s'entendent autour de nous alors qu'on arrivait à l'extérieur, et je comprends vite pourquoi : le Charingers me lâche, tombe au sol sur les genoux. Plus du tout maintenue, mon corps roule de son épaule pour atterri brusquement sur le dos. Une douleur vive et brûlante me transperce les omoplates mais je serre les dents avant de me forcer à me redresser pour voir ce qui m'entoure. Le Charingers tient son nez en gémissant, du sang s'échappe abondamment de celui-ci. Romary s'est figée dans le couloir, les yeux choqués, le surveillant qui l'escortait arrive en courant mais ignore royalement son collègue pour venir vers moi.
Il est immense, son aileron gris bien redressé sur sa tête entre ses cheveux bruns coupés courts, son corps athlétique comme propulsé vers moi. Je peux lire la rage dans ses yeux. J'ouvre la bouche, tente de me protéger en voyant la vitesse à laquelle il plonge sur moi, mais j'ai à peine le temps de dire ouf qu'il me baffe. Une baffe violente, claquante et brutale qui atteint ma joue avec surprise, me faisant basculer sur le côté.
J'ai l'impression que ma mâchoire est sortie de mon corps.
L'homme souffle comme un taureau, frottant ses deux mains ensembles avec satisfaction, apaisant la brûlure de sa paume. Celle de ma joue, elle, ne cesse pas. Je suis coincée sur le côté, les bras tremblants plantés dans le sol froid du dortoir, ma joue en feu. J'entends Romary pleurer, j'entends des chuchotements très bas autour de nous sans voir personne, celui à qui j'ai pété le nez rit de bon cœur et l'autre me regarde avec un plaisir malsain.

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The abyss inside {en pause}
ParanormalMonica n'a pas eu le choix. C'était embarquer dans ce sous-marin avec son oncle ou retourner dans le trou qui lui sert d'internat. Ni une, ni deux, elle se résout à rejoindre ce tas de ferraille douteux qui l'entraînera le plus loin possible dans la...