Aujourd’hui, j’ai découvert un monde défiant toute logique.
Tout a commencé lorsque j’ai cligné des yeux dans cette chambre d’hôpital : les murs commencèrent à respirer lentement et semblaient transpirer.
J'ai cligné une seconde fois, et aussitôt des éléphants volants ont surgi, flottant dans l'air de ma petite chambre d’asile. Le plus troublant était que ces mammifères démesurés hurlaient sourdement dans le vide. Leurs cris, tristes et assourdissants, résonnaient comme l'expression du désespoir dans une réalité tordue.
L'horloge accrochée au mur, qui semblait vivante, fondait et se décomposait : les chiffres et les aiguilles se désintégraient en tombant, laissant derrière eux un silence lourd et oppressant. Le concept de temps lui-même semblait s’effriter, se dissoudre dans la pièce.
Je me tourne vers la fenêtre dans l'espoir que mon esprit puisse s’échapper vers la liberté de l'extérieur : les arbres, symboles de vie, semblent murmurer des secrets sinistres et inavouables. Leurs branches, tordues et noires, chuchotent des vérités que je ne peux, et ne veux, entendre. J'aperçois des visages dans l’écorce, des visages familiers aux expressions figées et muettes. Ils semblent me dévisager, me troubler, me posséder.
Je cligne à nouveau pour échapper à cette oppression, et tout à coup, les couleurs s’estompent et un brouillard épais s’installe. Pourtant, j'arrive à distinguer la rue menant vers l'hôpital. Elle est pavée de bonbons, si innocents au premier abord, mais une voix m’avertit que ces morceaux de plaisir sont des pièges morbides. Je sens leur odeur sucrée mais putride, me rappelant quelque chose de pourrissant, une décomposition qui emplit mes sens de nausée.
Depuis mon lit, je tends la main vers un morceau rouge, mais il semble pulser, comme s’il était vivant. Peu à peu, ma langue s’alourdit, et des mots commencent à sortir. Ma raison ne les capte pas, mais mon cœur semble les comprendre et les interpréter. Ces mantras résonnent comme des incantations sombres et antiques... presque comme de puissantes malédictions. Parlais-je une langue oubliée, celle de mes ancêtres peut-être ? Celle de malveillantes entités des temps anciens ?
C’est alors que, dans cette confusion, Gaston m’apparaît, ce nuage qui, je le pense, m’a suivi depuis ma naissance. Au début, je croyais qu'il était un compagnon de route, mais ses larmes noires me terrifient. Chaque goutte qui tombe sur ma peau m'emplit de désespoir, comme si elle était imprégnée de souvenirs douloureux et tragiques. Je lui parle, mais ma voix se perd dans le vent, emportée par les tornades de mon esprit. D'ailleurs, je doute qu’il puisse vraiment m’entendre.
Les poissons, ces créatures que je voyais autrefois dans des aquariums, nagent dans l’air, leurs yeux vides me scrutant. Ils murmurent des leçons sur la vie, mais leurs propos se matérialisent en des serpents qui s’enroulent autour de mon estime de moi, m’étouffant lentement, torturant mon existence. Chaque phrase qu’ils prononcent menace et fait trembler mon intégrité, promettant chaos et destruction...
Le soleil se couche, je suis épuisé. À chaque clignement d'œil, le monde semble s'effondrer un peu plus, violant à chaque fois une loi de la raison et du bon sens. Comme si la réalité elle-même ne pouvait supporter le poids de ces distorsions. Je m'efforce de me concentrer, de retrouver un sens, une direction, mais en vain. L’angoisse et la perdition me submergent, et je me noie dans un océan brûlant mon être ; large où peuplent les requins de mes tourments.
Je ferme les yeux, je m'abandonnent et tente d'accepter mon sort, mais une partie de moi résiste encore et espère que tout cela ne soit qu’un cauchemar… qu’il existe une explication, une justification, un semblant de logique à ma condition...
Je rouvre les yeux ;
Cela ne peut être une illusion !
Réel ou ombre de caverne ;
Une seule vérité gouverne,
Un mensonge qui perdure...
?