Avril, merci pour les épines

SEPTEMBRE (1)

Je suis plantée au milieu de ma chambre et je m’observe dans le miroir.

Le reflet qu’il me renvoie m’arrache un soupir. Objectivement, je suis loin d’être laide : de longues jambes, une taille fine, des yeux bleu ciel, de longs cheveux bruns et lisses… Mais mon visage fait peine à voir. Même moi je peux constater que mon regard est lointain, triste. Mes yeux sont cernés et mon teint est terne. C’est ce qu’il se passe quand on vit un drame. On fane.

Je suis comme une fleur fanée.

Je sors légèrement mon t-shirt blanc orné d’une silhouette de soleil de mon jean slim taille haute et j’enfile un gilet en maille oversize puis je soupire.

« Allez cette année je me fais discrète. Tout va bien se passer. Ça ne pourra pas être pire que l’an dernier de toute façon. »

L’année dernière, j’avais bien commencé l’année. Ma meilleure amie Emmy et moi nous sommes devenus « populaires » en un rien de temps, avec l’aide de nos nouvelles copines Janaé et Lola.
En octobre, j’ai commencé à sortir avec Joe, un type qui s’est fait la moitié de ma classe de Seconde pendant notre relation. Quand je l’ai compris deux mois plus tard et que j’ai rompu j’ai eu droit au jugement de tout le monde : d’abord j’aurais dû savoir que c’était un chaud lapin, puis je n’abais pas le droit d’être triste puisque c’est moi qui l’avait quitté et enfin la meilleure, je l’avais cherché puisque je refusais de coucher. Évidemment, tout le lycée s’est retrouvé au courant de l’état de ma virginité en moins d’une semaine et je suis passée pour la pire des gourdes.

Ensuite, en février, ma meilleure amie Emmy m’a convaincu que ma côte de popularité re montrait si je devenais blonde, mais au moment où elle a retiré le produit, mes cheveux se trouvaient davantage entre le platine et le verdâtre. J’ai été la risée du lycée pendant au moins 2 semaines et on m’a appelé Harley Quinn pendant un mois.

Et enfin, en avril, le pire de tout est arrivé. J’aurais revécu les deux premiers trimestres mille fois si ça avait pu l’éviter.

Le 13 avril, mon frère est mort.

Il était en première. Il conduisait sa moto, alcoolisé et drogué, avec sa petite amie comme passagère. Cette nuit là, il pleuvait. Il a glissé. Mort sur le coup.

L’horreur de la situation a été empiré par le fait que tout le monde l’a tenu responsable de l'accident , qui a mené la fille a l'arrière de sa moto dans le coma durant des semaines.

Mais moi je sais qui est le responsable. Ce n’est pas lui. C’est Thomas. Son meilleur ami.