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Depuis cette nuit où tout avait changé, Jungkook ne reconnaissait plus la douceur de ses matins. Le monde qui l’entourait s’était teinté d’une ombre invisible, comme un filtre terne qui ternissait chaque couleur, chaque son. Son appartement, autrefois un havre de paix, ressemblait désormais à une cage aux murs impassibles et silencieux. Le moindre bruit lui semblait distant, irréel, comme s’il venait d’une vie qui n’était plus la sienne.

Les premiers jours, il s’était promis de ne pas se laisser aller, de ne pas céder au chagrin. Mais l’absence de Taehyung devenait chaque jour plus difficile à ignorer, et cette douleur muette avait fini par l’enfermer entre quatre murs. Au fil des semaines, il s'était laissé glisser, disparaissant de la vue du monde extérieur, se perdant dans une routine invisible. Son téléphone restait éteint, rejeté dans un coin, et il n’avait plus la force d’ouvrir la porte de son appartement, de regarder dehors. Chaque fois qu’il pensait aux regards qu’il croiserait peut-être en sortant, il se sentait accablé d’une fatigue immense, comme si le moindre effort lui coûtait plus qu’il ne pouvait supporter.

Les voisins avaient commencé à remarquer son absence. Dans cet immeuble où chacun connaissait les habitudes des autres, son silence devenait une ombre inquiétante. Les voisins échangeaient des regards interrogateurs dans l’ascenseur, se posaient des questions à voix basse. Mme Park, la voisine du dessous, était la première à avoir remarqué que le son de ses pas n’avait pas résonné depuis des jours. Elle avait tenté de frapper à sa porte, une fois, puis deux. Ses coups étaient restés sans réponse, le silence lui donnant une impression de vide presque palpable.

D’autres voisins avaient remarqué, eux aussi, cette absence soudaine. Un jour, un jeune homme du deuxième étage s’était arrêté devant la porte de Jungkook en rentrant du travail, l’air hésitant. Il posa une main sur la poignée, comme s’il espérait qu’elle s’ouvrirait d’elle-même, mais se ravisa finalement. Le regard perdu, il murmura, presque pour lui-même, « Où est-il passé ? »

Pendant ce temps, Jungkook se recroquevillait dans la solitude qu’il s’était imposée, errant dans son appartement comme une âme en peine. Parfois, il se surprenait à marcher sans but, à refaire les mêmes trajets entre sa chambre et le salon, entre le canapé et la fenêtre, sans jamais trouver de repos. Il n’ouvrait plus les rideaux. Le monde extérieur lui semblait si lointain, si inaccessible, qu’il préférait s’en tenir éloigné. Même les murs de son appartement avaient pris une teinte de froideur qu’il ne leur avait jamais connue, comme s’ils s’étaient imprégnés de sa tristesse.

Chaque objet autour de lui lui rappelait Taehyung. Il avait l’impression de voir son ombre partout, dans chaque détail, dans chaque souvenir qu’il effleurait du regard. Le canapé où ils avaient échangé de longues conversations, la tasse que Taehyung lui avait rendue après leur dernier café ensemble… Tout semblait imprégné de cette présence fantomatique. Ces moments d’intimité qui lui avaient semblé si réels, si intenses, prenaient désormais l’aspect d’une illusion lointaine. Il se demandait sans cesse si Taehyung pensait à lui, quelque part de l’autre côté du couloir, ou si tout cela n’avait été qu’un malentendu qu’il était le seul à regretter.

Un soir, alors que la lumière déclinait doucement, il s’installa sur le sol, dos contre le mur, et se laissa envahir par la fatigue. Il se sentait terriblement seul, comme si le vide de l’appartement l’engloutissait peu à peu. Les souvenirs se bousculaient dans son esprit, lui rappelant ces regards que Taehyung lui avait adressés, ces sourires en coin, cette proximité qu’ils avaient partagée, même dans le silence.

Mais plus il s’y accrochait, plus la douleur devenait insupportable. Le manque de Taehyung lui paraissait comme une blessure qui ne cicatrisait pas, une plaie ouverte qui s’étendait chaque jour un peu plus, le privant de toute paix. Il savait qu’il ne pourrait pas rester ainsi éternellement, qu’il devait sortir de cette spirale qui l’isolait, mais il n’en trouvait pas la force. L’idée de franchir le seuil de sa porte lui semblait insurmontable, comme si le monde extérieur le rejetait.

À force de rester reclus, Jungkook en était venu à ne plus compter les heures ni les jours. La notion du temps lui échappait complètement. Parfois, il se réveillait sans savoir s’il faisait jour ou nuit, perdu dans cet espace-temps étrange qu’il s’était créé, un refuge aux allures de prison.

Ses voisins, quant à eux, continuaient de s’interroger. Mme Park revenait régulièrement, inquiète, tentant encore de capter une réponse de sa part, mais sans succès. Même les plus jeunes résidents, ceux qui d’ordinaire se montraient indifférents aux affaires des autres, finissaient par jeter un coup d’œil en direction de sa porte lorsqu’ils passaient devant, comme si un mystère pesait dans l’air. Un soir, l’un d’eux murmura à son ami, « Il n’est plus sorti depuis combien de temps, tu crois ? C’est bizarre… »

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Journal de Jungkook

Je me sens comme un étranger dans ma propre vie. Les jours s’écoulent sans que j’aie la force d’en faire quelque chose, sans que je voie de fin à cette absence. Taehyung ne me quitte pas l’esprit, même si j’essaie de me convaincre que tout ça n’était qu’une erreur, un rêve auquel j’ai voulu croire.

Je me suis perdu dans cette illusion, et maintenant je ne sais plus comment en sortir. La solitude devient un poids que je porte seul, un silence qui s’étend à chaque minute. Je n’ose plus croiser le regard des autres, car je sais que je ne suis plus le même, que quelque chose s’est brisé en moi, quelque chose qui refuse de se réparer.

Il me manque, c’est tout. Et je n’arrive pas à l’oublier.

Réecrire nos Destins. (Vkook) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant