Le silence a été présent tout le trajet en direction de chez lui, mais loin de là l'idée qu'il ait été pesant ou gênant.J'ai essayé de cacher ma surprise face à son accord particulièrement rapide lors de ma demande, mais j'ai décidé de ne rien dire. D'ailleurs, il ne m'a pas questionné sur le fait que je voulais aller chez lui, et je suppose que c'est mieux, dans le cas contraire, j'aurais sûrement dit "oublies", puis je serais partie.
Plusieurs minutes se sont écoulées avant que l'on n'atteigne le palier de sa maison, enfin, celle de sa mère. Les seuls mots qu'il ait prononcés étaient pour m'expliquer qu'aller chez sa mère était plus rapide si l'on souhaitait réviser, de toute façon, il m'a précisé qu'elle ne rentrerait que dans la soirée, elle a beaucoup de clients à son travail. Il n'a pas spécialement omis un probable appartement où il vivrait seul, nous sommes mineurs, en théorie, c'est logique. Puis ce que mon cas est particulier, c'est tout autre pour moi, Henri a joué sur ses connaissances
En entrant dans le lotissement, une odeur de rouleau de printemps emplit mes narines, je m'empresse de retirer mes chaussures. Pourtant, je n'arrive pas à bouger, plongé dans le déni.
— Merci...
Le mot est sorti presque instinctivement de ma bouche, mélangeant les remords et le chagrin dans une simple parole. Il est parti plus loin dans le couloir sans me répondre, je suppose qu'il ne m'a pas entendu, et si ce n'est pas le cas, je le remercie intérieurement pour son silence.
Je le suis sur les quelques mètres qu'il parcourt, tout en réfléchissant à l'excuse que je pourrais lui fournir si jamais il me réclame des explications. Ce qui est contradictoire dans cette histoire, c'est que j'ai tellement envie de lui dire ce que j'ai sur le cœur. Nous sommes peut-être en mauvais termes, très différents, voire opposés, seulement, j'ai l'impression que dans un monde parallèle, nous pourrions être similaires, c'est un sentiment assez troublant.
Je me rappelle lui avoir dit une phrase telle que "Si je coule, je te noierai avec moi, Kyo...". Dans un moment de panique, j'ai pensé que ça lui ferait peur, que ça lui donnerait envie de partir. À contrario, il est resté, il ne m'a pas abandonné, comme beaucoup auraient pu le faire, il a opté autrement, en évitant simplement le sujet, tout comme moi.
Suite à l'incident avec Goro, je fais attention lorsque je me déplace seule, si je peux éviter que ça m'arrive à nouveau, ça m'arrange. Mais ça fait bien longtemps que mon corps ne m'appartient plus, alors j'ai l'habitude que l'on me touche sans mon consentement maintenant, donc mon cerveau ne ressent plus de tristesse face à ça, face à la contrainte, résigné à être un objet sur lequel on se défoule.
Je le mérite.
Mes yeux examinent ce qui m'entoure, je remarque que nous sommes dans une pièce assez spacieuse, un canapé, couleur bordeaux est placé entre un meuble télé et une table à manger. Tout est propre et soigneusement rangé, laissant un air pur emplir mes narines.
— Quand t'auras fini de tout regarder, tu viendras t'asseoir, énonce Kyo, qui lui, a déjà pris place autour de la table du salon.
Je ne tarde pas à me joindre à ses côtés, il n'aborde aucune émotion sur son visage, alors je décide de sortir les cahiers dont j'ai besoin pour étudier. Il n'est pas réceptif, se contentant simplement d'alterner son regard entre mon visage et nos cahiers.
— Dit moi, commence Kyo en mordillant le capuchon de son stylo. Tu comptes me dire pourquoi t'as une tête d'enterrement ou bien, tu vas tirer la gueule toute la soirée ?
— La subtilité avec toi n'existe pas ? demandais-je pour fuir sa question.
— Et l'honnêteté avec toi, c'est facultatif ? Son visage devient soudainement plus doux, tout en gardant un regard sérieux. On ne va pas partir sur un tel débat stupide qui n'a ni queue ni tête. Melodias, je ne t'aime pas, reprit-il. C'est un fait, mais je ne peux pas réviser correctement si celle qui est censée me faire apprendre mes cours n'est pas elle-même apte à le faire, et tu sais bien que je ne parle pas des aptitudes scolaires.
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AMNESIA
RomanceUne fille en détresse. Un garçon au cœur altruiste. Melodias Eze, mannequine à temps plein, décide de quitter cette vie étouffante. Elle se contraint alors à se fondre dans la masse, lorsqu'elle entame son année de terminale à Tokyo, quitte à délai...