Chapitre 26 - Nous pourrions être de bonnes mères

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La nuit était fraîche, presque frissonnante, et chaque bruissement de feuilles semblait cacher l'empressement de la nature à ce qui allait suivre. Rio et Agatha avançaient ensemble, main dans la main.

Le miroir se dressait, maintenu par des racines épaisses et torsadées, ses bords couverts de mousse. Ce miroir, aux contours légèrement déformés, n'était pas seulement une antiquité, il était le lien entre deux mondes, celui de la vie et de la mort.

À la fois témoin et complice de leurs serments, reflétant le mariage unique entre leurs essences opposées. Ce soir-là, il allait aussi devenir le point de convergence de la création d'un être nouveau, l'enfant de ces deux mondes.

Agatha s'approcha du miroir en silence, lâchant la main de Rio, son regard capturant la fumée qui s'échappait de la peau presque nue de son double.

Les doigts crispés sur son apparat fleuri de fougères, de myrte sauvage et de boutons d'or. Elle sentit son cœur s'accélérer. C'était ici que tout allait se jouer. Ses doigts frôlèrent la surface froide et rugueuse du miroir, un frisson d'anticipation parcourant ses bras. Rio se tenait à ses côtés, sa présence imposante mais douce, prête à guider Agatha à travers ce rituel sacré.

- « Ce miroir, Agatha... il n'est pas là juste pour son apparence. Il n'est pas qu'un symbole, » commença Rio, sa voix basse et calme, pleine de sagesse. Elle se tourna légèrement vers Agatha, son regard perçant.

« Mais je sais qu'il est difficile de comprendre sa véritable nature. » Elle marqua une pause, la tension palpable. « Ce miroir, c'est une protection pour toi. »

Agatha leva un sourcil, intriguée.

- « Une protection ? Mais de quoi ? »
Rio sourit doucement, une lueur de patience dans ses yeux.

- « Tu sais évidemment que je suis la Mort, Agatha. Mais tout comme la vie et la mort sont liées, elles ont leurs propres lois.

C'est comme le baiser, si je t'accordais directement une partie de mon pouvoir, même dans un moment aussi sacré que celui-ci, tu ne pourrais pas le supporter. C'est un pouvoir infini, et il te consumerait parce que tu n'aurais fait que me désirer. »

« Le miroir, Agatha, » reprit Rio, les yeux fixés sur la surface du verre, « il nous permet de t'imprégner de cette énergie sans que cela ne te brise. Il sert de filtre, de catalyseur. Sans lui, tu... tu serais drainée jusqu'à la dernière goutte.

Comme lorsque tu draines le pouvoir des autres. Ce qui est aussi une des raisons pour lesquelles ce miroir est présent.

La force de la vie qui t'occupe ne pourrait pas se lier au pouvoir de la mort sans causer ta perte. »

Agatha baissa les yeux, prenant un instant pour digérer ce que Rio venait de dire. Elle savait que la magie était une chose volatile, que la ligne entre la vie et la mort pouvait être aussi fine que le fil d'une araignée.

- « Je comprends, » murmura Agatha finalement, le ton grave, mais empli d'une détermination nouvelle. Son regard se perdit, descendant sur le corps de Rio drapé de lys noirs, leurs pétales ondulant légèrement. Des anémones violettes longeaient ses bras, se mêlant à des lianes épineuses qui parsemaient ses hanches et ses épaules.

« C'est pour ça qu'on doit le faire ici, comme ça. »

- « Exactement. » Rio hocha lentement la tête. « Et n'oublie pas, Agatha, que ce miroir ne reflète pas juste notre image. Il agit comme un réceptacle. C'est un passage. Il nous permet de donner naissance à l'équilibre. Mais il faudra que tu puises dans cette énergie, pour que Nicholas puisse naître sans qu'aucune d'entre nous ne perde quoi que ce soit. »

Agatha Harkness - Le procès de la sorcièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant