Dans la tête de ʍat
Le vent soufflait doucement dans les rues de Kingsport, soulevant par moments les feuilles mortes qui parsemaient le trottoir. On était là, devant la mairie, à scruter les détails que le commun des mortels négligeait : le clignotement subtil des caméras, les angles morts entre les façades de pierre et les lampadaires, l'agencement précis des barrières de sécurité qui promettaient d'ordonner la foule comme un bétail docile.
Inaya, à mes côtés, se tenait droite, l'air plus concentrée que jamais. Je l'avais rarement vue aussi silencieuse. D'habitude, elle était comme le vent, poussant nos voiles d'un souffle audacieux qui balayait les doutes par son entrain véloce et sa vigueur impétueuse. Mais là, même elle semblait absorbée par la tension qui imprégnait la rue sous la pression de notre opération.
Juste derrière nous sur le trottoir, Scott trépignait, sa nervosité se trahissant par de petits gestes, une main qui frottait son ventre, une autre qui tapotait sa cuisse. Je le voyais angoisser alors je le rassurai :
— Stresse pas, on est juste là en repérage, on fait rien de mal t'inquiète.
Après cette petite excursion, nous partions vers Johnson City, le cœur battant.
Quelques minutes plus tard, la mairie de cette ville se dressait devant nous, imposante.
Moi je la voyais comme une sentinelle silencieuse d'un gouvernement qui ne tolérait aucune entorse et dont le pouvoir démesuré allait nous esclavagiser pour de bon. Inaya s'assit sur les marches de pierre, déballant un sandwich. Scott et moi, on l'imita, nos mouvements calculés pour paraître naturels.
Assis là, je sentais mes muscles tendus, prêt à réagir au moindre signe suspect. Nous étions probablement filmés de loin, une ville où les dispositifs de surveillance étaient encore plus sophistiqués qu'à Kingsport. Une caméra pivotait légèrement au-dessus de l'entrée principale. Des outils de surveillance à double objectif : des éléments optiques sophistiqués et un mécanisme inlassable de recherche et de traque.
Les politiciens préféraient le terme de "vidéo-protection". Une action bienveillante pour le bien des citoyens sans reproche. Manipuler la sémantique dans le but de mettre en place pernicieusement des instruments de contrôle avec l'argent même du contribuable surveillé.
Le temps froid de cette journée nous arrangeait parce qu'emmitouflés dans nos écharpes et nos bonnets, la reconnaissance faciale des caméras devait être inefficace.
Le risque était immense. Une capture ne signifiait pas juste des accusations mineures. Pour nous, ça voulait dire une peine de prison à perpétuité avec tout ce que ça impliquait. Des cellules où la lumière artificielle devenait notre seul compagnon.
Mais au-delà de l'enfermement et de l'isolement étouffant, c'était l'univers impitoyable de la prison qui nous terrifiait. Un lieu où la violence était omniprésente, où chaque geste pouvait déclencher un conflit, et où l'on survivait par une dureté que nous n'avions pas. On n'était pas taillés pour ça.
Des hackers comme nous, on était certes des esprits brillants mais pas vraiment avantagés physiquement. Juste des gens qui, malgré leur défiance envers le système, restaient foncièrement bienveillants et qui n'auraient aucune chance dans un tel cadre. Là-bas, la moindre faiblesse se payait cher, et notre sympathie naturelle ferait de nous des cibles vulnérables et sans défense.
Les agents du gouvernement le savaient et ils proposaient toujours cette alternative : servir leur intérêt, travailler pour le système qu'on détestait, trahissant ainsi chaque conviction qui avait forgé notre lutte.
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Ça nous tenait hacker
Ciencia FicciónLe monde part en vrille et tout le monde s'en tape. Toi aussi tu t'en tapes ? Bah trace ta route. Mais si tu veux apprendre des choses bien badantes sur ce que nous réserve l'avenir grâce à nos gouvernements de psychopathes et à la tech, ou comment...