Double je(u)

Chapitre 55 : Le roi blanc

Peu avant que je le jour commence à poindre, je sortis de la maison et me dirigeai vers le lieu de rendez-vous fixé avec Hisoka.

La cité était encore endormie, pas un bruit ne se faisait entendre, seuls ceux de mes pas ainsi que les torches des gardes patrouillant à travers ses ruelles apportaient un peu de vie.

Quand j'arrivai enfin devant l'entrée de la cité, je constatai que mon partenaire m'attendait déjà, adossé contre la paroi rocheuse, son sac posé à ses pieds.

Les flambeaux éclairants le passage creusé dans la montagne baignaient son visage d'une faible lueur assez suffisante pour que je distingue son visage. L'homme me regardait, un subtil sourire en coin.

- Déjà là ?

- J'avais hâte de sortir de la cité ~

- Mettons nous en route alors.

Il ramassa son sac, le mit sur son dos puis s'engouffra à ma suite sur le chemin qui menait jusqu'à la sortie de la cité.

Apparemment, nous étions les seuls à partir en mission à une heure aussi matinale. En vérité, je souhaitais arriver tôt aux cavernes d'argile pour avoir le temps de récolter la précieuse terre glaise et installer notre campement.

Les deux gardes surveillant l'entrée de la cité nous ouvrirent le passage et, après nous être assurés que la voie était libre, nous nous éloignâmes d'Oron Latta.

À part quelques plantes vénéneuses et un troupeau de bovins méfiants lorsque nous traversons leur territoire, la route est plutôt calme.

Le temps assez agréable et la température plutôt douce facilitaient notre avancée. Je décidai donc de nous accorder une pause dans un endroit que je connaissais bien et que j'appréciais beaucoup. Un lieu que m'avait fait découvrir mon père.

Lors de notre première mission, il nous y avait conduit mon frère et moi et nous avait confié qu'une légende y était rattachée. Une terrifiante créature appelée le roi blanc hanterai ce lieu. Si on avait l'audace de croiser son regard, la bête s'emparait de notre esprit jusqu'à nous mener à la folie. Le récit avait fasciné Lekha qui, à chaque fois qu'il se rendait dans les cavernes d'argile venait ici, espérant voir le roi blanc. Quant à moi, j'ai toujours pensé que cette histoire n'avait que pour but de nous donner une bonne leçon : se tenir loin des créatures dangereuses.

Le lieu semblait désert à notre arrivée. Rien ne venait troubler la surface lisse de la rivière qui s'écoulait en plein milieu de la forêt, ni agiter les feuilles des arbres qui la composait. Aucun roi blanc, aucune autre bête à l'horizon.

Sans pour autant baisser notre garde, nous nous installâmes sur l'herbe grasse et épaisse de la petite clairière qui bordait l'étendue d'eau.

J'ôtai mon arc, mon carquois ainsi que mon sac d'où je sortis de quoi nous revigorer. De la viande séchée, des fruits frais ainsi que des petits biscuits au miel confectionnés par Grand-mère, un parfait festin pour un endroit comme celui-ci.

Même si tout paraissait calme au cours du repas, je ne pouvais m'empêcher de jeter régulièrement des coups d'œil aux alentours. Ce serait bête de baisser notre vigilance et nous faire surprendre par un invité indésirable ayant des intentions belliqueuses.

Comme faire de nous son repas par exemple.

Alors que je m'apprêtais enfin à savourer une des douceurs au miel, j'avais remarqué qu'Hisoka m'observait, la tête légèrement penchée sur le côté, l'air pensif.

- Quoi ? J'ai quelque chose sur le visage ? demandai-je en essuyant de la main les contours de ma bouche.

- Non sourit l'homme.