Quand le coeur balance...

Chapitre 64 - Neva

Mon souffle se fait court, ma poitrine me serre comme si je n’avais plus d’air. Je me sens oppressée. Je pose une main contre mon cœur pour l’apaiser comme s’il voulait juste s’échapper de ma poitrine. Les mots d’Aaron m’ont percutée comme si je venais de me prendre une porte en pleine face. Il défend Archibald pour moi ? Aaron a des sentiments… pour moi ? Je secoue la tête et me baisse au sol pour ramasser mes affaires. « J’espère qu’un jour, tu arriveras à être heureux. » n’importe quoi, Neva. Oui, je veux qu’Aaron soit heureux mais j’étais tellement surprise que j’ai dit la première chose qui me passait par la tête pour le consoler. Je ne sais pas toujours trouver les bons mots et parfois je suis dure… à cause de cette carapace que j’ai forgée autour de moi pour m’éviter de souffrir.

Je n’ai pas envie qu’il ait mal par ma faute, surtout après ce qu’il à fait pour moi. Mais on aurait pu trouver une autre solution, il aurait dû m’en parler…  Maintenant je culpabilise qu’il ait prit cette décision pour me protéger… je peux me protéger seule.

Son regard m’a transpercée en plein cœur, je ne l’ai jamais vu aussi vulnérable, presque au bord des larmes par énervement ou tristesse, je ne sais pas. Pourtant, c’est la vérité, on a ressenti du désir l’un pour l’autre, mon corps s’éveille toujours à son contact et c’est quelque chose que je n’arrive pas à contrôler mais pouvons-nous appeler ça de l’amour ? L’amour, c’est plus qu’une connexion physique…

Je prends une grande inspiration et me relève, enfile mon manteau, remonte la lanière de mon sac sur mon épaule et porte mon attaché-case de l’autre main. Je quitte la pièce et me dirige vers la sortie où de nombreux journalistes attendent. Je souffle d’exaspération et accélère ma démarche. Je balaye la foule du regard et constate qu’Aaron a déjà dû fuir. Ma respiration s’accélère alors que les journalistes m’entourent avec leurs micros et caméras, je baisse les yeux et tentent de me frayer un chemin en descendant les marches du tribunal. Comme si j’avais des œillères, j’entends des échos de mon nom, différents sons et quelques mots mais je ne distingue rien de concret, je ne les écoute pas vraiment. Je ne compte pas m’exprimer en public tant que le procès est en cours. Je presse encore plus le pas lorsque j’arrive enfin à m’extirper de la foule de journalistes. Le souffle haletant, mon rythme cardiaque s’emballant, je me dirige vers ma voiture que j’ai garé quelques rues plus loin. Ils ne réalisent pas à quel point c’est anxiogène d’être assaillis de questions de la sorte ? J’inspire puis expire profondément pour tenter de retrouver une respiration stable. Je sais qu’ils se demandent certainement pourquoi Dalia a quitté l’audience sans crier gare.

Et bien, elle m’a simplement soufflé un « désolée Neva mais je ne peux plus. » Je ne l’ai pas retenue, je comprends sa détresse. Les mensonges d’Archibald et son air faussement innocent agrémenté de ses excuses hypocrites ont eut raison de la patience de Dalia et de la mienne par la même occasion. Par chance, j’avais en ma possession une carte que je n’avais pas encore jouée. Je devrais remercier Lara de m’avoir fait sortir de mes gonds à l’anniversaire de Liam, ça m’aura permis de me réfugier dans les combles et de fouiller les albums photos de la famille de Liam. C’est là que j’ai trouvé cette photo datant de l’été 1998. Le père de Liam accompagné d’Archibald. Ce dernier portant le même collier retrouvé dans la maison incendiée. Malo avait évoqué leur amitié et effectivement ils sont même amis depuis leur jeunesse. Cet élément va permettre de faire basculer le procès en ma faveur, enfin, je l’espère.

À moins qu’Archibald simule encore un énième malaise ? Je doute de l’authenticité de son mal-être… Je pense qu’ il s’est juste senti prit au piège et a dû trouver un stratagème pour s’extirper de cette situation. Quoi de mieux que de jouer une fois de plus la victime ?