Family Secrets

Chapitre 1 : Awkward

Dans ma famille, Thanksgiving est une affaire sérieuse. Ce soir là, la maison semblait briller encore plus que d'habitude. Dans la salle à manger, la table était prête : une nappe ivoire parfaitement repassée, des bougies alignées avec une précision presque militaire, des couverts en argent et des verres en cristal qui étincelaient sous les lumières tamisées.

Ma mère Victoria, 55 ans, s'assurait que tout soit parfait, comme toujours. Je l'observais donner des instructions d'un ton calme mais ferme, ses gestes précis, comme si elle chorégraphiait une pièce de théâtre.

Dans le salon, mon père, Edward, 58 ans, était assis avec mon frère. Je pouvais entendre leur conversation à voix basse, même si je ne comprenais pas tout. Ils parlaient probablement des affaires familiales, encore. Ils adoraient ces discussions.

Moi, je me tenais dans un coin, près de la cheminée. Ce genre de moments me donnait souvent l'impression d'être une spectatrice de ma propre famille. Tout était si... impeccable. Trop impeccable, peut-être. J'avais grandi dans cette maison, entourée de cette perfection. Mais parfois, je me demandais si je m'y étais vraiment habituée. Ou si je faisais juste semblant.

Maman était la perfection incarnée. Tout le monde le disait. Avec ses cheveux impeccablement coiffés, son sourire calculé, et sa manière de se mouvoir comme si elle dansait sur une scène, elle semblait née pour jouer ce rôle. Et elle l'accomplissait parfaitement.

Elle m'aime, j'en suis certaine, mais parfois, je sens cette distance entre nous. Pas une distance froide, non. Une sorte de barrière invisible, comme si elle s'efforçait toujours de faire de moi quelqu'un que je n'étais pas encore. « Tiens-toi droite, Amelia », « Souris un peu plus », « Tu es une Harrington, souviens-toi ». J'avais appris à interpréter ces remarques comme des marques d'affection, même si parfois, elles me pesaient.

Papa, lui, est plus simple. Il parle peu, mais ses mots sont toujours mesurés et efficaces. Il me semblait qu'il voyait tout, qu'il comprenait tout, mais qu'il choisissait toujours d'en dire le moins possible. Papa ne disait jamais les choses directement, mais ses gestes suffisaient. Parfois, j'aurais aimé qu'il me parle plus. Mais c'était Papa. Et avec lui, c'était toujours suffisant.

Emily, 26 ans, était ma confidente. Ma protectrice. Avec elle, je pouvais baisser ma garde, sourire sincèrement. Elle m'appelle « ma petite étoile », et ça m'apaisait. Emily a une manière de défier les attentes sans jamais les briser. Elle est forte. Et parfois, je me demande comment elle peut supporter tout ça.

Alexander, 23 ans, est le fils parfait et le seul garçon. Toujours élégant, toujours prêt à protéger ses sœurs, toujours là pour dire la bonne chose au bon moment. Il était celui qui connaissait tout le monde, qui pouvait résoudre n'importe quel problème, et qui semblait s'épanouir dans ce monde de règles strictes et d'apparences. Je l'admirais, mais je savais que nous étions différents. Là où il semblait à l'aise dans cette famille, moi, je cherchais encore ma place. Il fait ses études à New York alors on ne le voit que pendant les vacances, comme maintenant.

Si Emily me rassurait, Ilona me faisait rire. Avec ses blagues idiotes, ses histoires rocambolesques, et sa manière de ne jamais prendre rien au sérieux, elle était mon souffle d'air frais. Agée de 19 ans, elle est la seule à encore vivre à la maison avec nous car elle a décidé de rester à Boston pour sa première année d'études.

Puis, il y avait Kate. Notre sœur aînée, âgée de 30 ans. Mon énigme. Elle était belle, imposante, presque intimidante. Mais froide. Ce n'était pas qu'elle me haïssait, non. Mais avec elle, tout était distant, glacial. Une politesse parfaite, mais sans chaleur. J'avais essayé, des années durant, de briser cette glace. De lui plaire, de me rapprocher d'elle. Mais rien n'y faisait. Chaque sourire, chaque compliment semblait se heurter à un mur invisible. Et ce mur, je ne savais pas d'où il venait.