Chapitre 6 : Au bord du précipice

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(POV Élias)

La lettre reposait sur la table, comme une menace silencieuse. Je la fixais, mes doigts crispés sur le bois, alors que l'air dans la cabane semblait se charger d'une tension électrisante. Je savais que l'inévitable était proche. Ils ne me laisseraient pas partir une nouvelle fois. Mais je n'avais pas envisagé que le prix de ma fuite serait de la mettre en danger.

J'avais pris un peu de recul, mes yeux suivant chaque mouvement qu'il faisait. Il n'avait pas voulu qu'elle voie la lettre. Elle ne devait pas savoir. Pourtant, j'avais l'impression qu'elle comprenait plus que je ne le croyais. La peur, la frustration dans son regard, je savais qu'elle cherchait des réponses. Mais je ne pouvais pas lui offrir cela. Pas encore. Pas de cette manière.

— Qu'est-ce qu'ils veulent de vous ? souffla-t-elle, brisant le silence lourd qui pesait entre nous.

Je me tournai lentement vers elle, mes yeux d'acier remplis d'une douleur que je tentais de dissimuler.

— Rien qui te concerne, dis-je, bien que je sache que mes mots étaient vides de sens.

Elle haussait les épaules, refusant d'accepter mes réponses fuyantes.

— Vous m'avez laissé entrer dans votre vie, dit-elle calmement. Alors, maintenant, c'est aussi mon problème.

Je me levai brusquement, faisant grincer la chaise sur le sol. J'avais l'impression que chaque mouvement augmentait la pression sur sa poitrine, chaque mot prononcé l'enfonçant un peu plus dans ce trou noir.

— Non, dis-je en m'approchant d'elle, mes yeux brûlant d'une colère contenue. Tu n'as pas choisi ça. Tu n'as pas choisi de t'impliquer dans ce bordel. Alors, arrête de te mentir.

Elle se leva à son tour, son regard défiant.

— Vous croyez que je ne sais pas ce que c'est ? Que je ne vois pas que vous fuyez quelque chose ? Vous croyez que je vais juste partir maintenant ? Parce que vous me dites de partir ?

Je sentis un éclair de panique envahir mon esprit, une part de moi qui voulait la repousser, la protéger, mais une autre, plus obscure, plus violente, qui la retenait ici, qui la poussait vers moi.

— Tu devrais partir, Anaïs, dis-je, ma voix plus basse, presque un murmure. C'est dangereux pour toi.

Elle s'approcha de moi, sans trembler, son regard perçant le mien comme une épée.

— Peut-être que je préfère le danger. Peut-être que c'est ce que je recherche.

Je me figeai. Ce qu'elle disait était vrai, n'est-ce pas ? Elle ne cherchait pas juste des réponses, elle cherchait à se sentir vivante. Comme moi. Nous étions tous deux piégés dans notre propre fuite, mais avec des raisons différentes.

Je détournai les yeux. Je n'étais pas prêt à l'admettre. Pas encore.

Un bruit soudain à l'extérieur brisa l'intensité du moment. Un craquement. Puis des pas. Des pas lourds, mais lents.

Je me figeai, mes sens en alerte. La tension monta d'un cran, et j'attrapai immédiatement le couteau que je gardais près de la table.

— Cache-toi. Maintenant.

Anaïs hésita une fraction de seconde, mais son regard se durcit. Elle ne voulait pas se cacher. Pas maintenant. Pas après tout ce qu'elle avait découvert.

Mais je la poussai doucement en arrière, mes yeux suppliants.

— Cache-toi, Anaïs.

Elle s'exécuta, se glissant dans l'ombre près du coin de la pièce, son cœur battant fort contre sa poitrine. Elle écouta attentivement, essayant de capter chaque son, chaque mouvement.

Je me dirigeai vers la porte, la main serrée sur la poignée. Mes muscles étaient tendus, chaque fibre de mon être prête à réagir au moindre mouvement. La porte s'ouvrit lentement.

Au seuil se tenait un homme. Un homme que ni moi ni Anaïs n'avaient vu venir.

Il était grand, vêtu d'une longue veste noire, et son visage était marqué par une cicatrice qui lui barrait le menton, comme une vieille blessure qu'il n'avait jamais pris le temps de soigner. Ses yeux sombres m'observaient avec une intensité froide.

— Élias Delorme, dit-il d'une voix calme, mais qui vibrait de menace. Tu sais ce que tu dois faire.

Je restai figé, l'air de plus en plus tendu. Je savais que cet homme n'était pas un simple visiteur. C'était un rappel. Le passé rattrapait tout le monde.

— Je ne vous ai rien à prouver, répondis-je d'un ton tranchant. Vous ne me donnez pas d'ordres.

L'homme sourit, mais il n'y avait aucune chaleur dans ce sourire. C'était un sourire de menace.

— Ce n'est pas toi qui décides, Élias.

Un frisson glacé parcourut la colonne vertébrale d'Anaïs, dissimulée dans l'ombre. Elle pouvait sentir l'intensité de la confrontation, mais elle ne savait pas encore à quel point elle venait de se plonger dans un tourbillon dont elle ne pourrait plus sortir indemne.

Entre l'Ombre et le FeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant