1-Les Premiers Pas de Vil

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La nuit était profonde, paisible en apparence, mais agitée dans mon esprit. Je me tenais près de la fenêtre de ma chambre, observant les ombres onduler sous la lumière pâle de la lune. L'air frais s'infiltrait par les interstices du verre, portant avec lui l'odeur des forêts denses entourant notre royaume, l'odeur familière de ma vie jusqu'ici. Cette vie que je devrais laisser derrière moi à l'aube.

Je passai une main dans mes cheveux blancs, une rareté même chez les Némérys. Les miens brillaient presque d'une lueur spectrale sous la lumière de la lune, une caractéristique héritée de ma mère, Nyssara. Reine des Némérys, et l'une des figures les plus redoutées et respectées des terres connues. J'avais grandi à l'ombre de sa puissance, à l'ombre de ses yeux jaunes qui semblaient voir bien au-delà de ce que les mortels pouvaient comprendre.

Et pourtant, ici, dans cette chambre, je n'étais que Vil. Pas le prince. Pas l'héritier. Juste un jeune Némérys au bord de l'inconnu.

Mon cœur s'alourdissait à chaque battement. L'exil temporaire était une tradition ancestrale : chaque Némérys atteignant l'âge adulte devait survivre une année entière au-delà des frontières de notre royaume. Une épreuve visant à tester notre force, notre intelligence et, surtout, notre capacité à dompter les instincts vampiriques qui brûlaient dans notre sang.

Ma mère m'avait peu parlé de ce qui m'attendait. Elle disait que chaque Némérys devait forger son propre chemin, découvrir par soi-même ce que signifiait survivre. Mais dans ses rares moments de tendresse, elle avait murmuré :
« Ne laisse pas la faim te consumer. Souviens-toi, Vil. Tu es plus qu'un prédateur. »

La faim. Ce mot résonnait dans mon esprit comme un écho sinistre. Nous, les Némérys, avions ce lien intime avec la nuit, une soif difficile à réprimer, un mélange de pulsions et de nécessités héritées de notre ascendance vampirique. Jusqu'à présent, je n'avais jamais eu à lutter contre ce besoin. Ici, dans le palais, les serviteurs s'assuraient que mon appétit ne devienne jamais un problème. Mais demain... demain, je serais seul.

Je détournai le regard de la fenêtre et jetai un coup d'œil autour de ma chambre. Les murs étaient ornés de tentures sombres et élégantes, brodées des symboles de notre lignée.

Sur la table, une épée fine reposait dans son fourreau, son manche orné d'un cristal jaune brillant - un symbole des Némérys, et la dernière chose qui me relierait à mon foyer. « À l'aube, tu ne seras plus un prince », m'avait dit mon maître d'armes en me la tendant. « Tu seras un voyageur. Un survivant. Rien de plus. »

Je ne savais pas où j'irais. Peut-être vers les terres humaines, où les Némérys étaient souvent perçus comme des monstres. Peut-être vers les royaumes vampiriques, où je ne serais qu'un sang-mêlé, une curiosité méprisée. L'idée d'être seul, loin de tout ce que je connaissais, me terrifiait. Mais c'était aussi un appel, une promesse de liberté.

La lune glissa lentement derrière les collines, et l'horizon commença à se teinter d'un gris pâle. L'aube approchait, et avec elle, mon départ.

Je passai mes doigts sur le manche de mon épée, respirant profondément. La peur me tenait, oui, mais quelque part en moi, un feu brûlait. Un feu qui disait : « Tu es prêt. »

Quand l'heure arriva, je m'équipai en silence. J'enfilai ma cape, sanglai mon épée à ma ceinture, et pris une dernière inspiration avant d'ouvrir la porte. Les couloirs du palais étaient vides. Même ma mère, d'ordinaire si imposante, avait choisi de ne pas m'accompagner à cet instant.

Je franchis les grandes portes et me retrouvai face à la forêt, immense et sombre. Je fis un dernier pas, et le royaume des Némérys disparut derrière moi.

L'exil avait commencé.

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