Chapitre 57 :

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Je me fige, sa question me prend au dépourvu. Je ne bouge plus, comme si quelque chose me bloque, je fixe le vide en essayant de calmer les battements douloureux de mon cœur. Le silence répond à sa question, mon corps passe par plusieurs émotions à la fois, ce qui me perturbe.

D'abord : l'étonnement, comment je peux réagir face à cette soudaine question ?

Ensuite : l'incompréhension, pourquoi elle se soucie de moi ? Elle et moi ne sommes pas proches au point de s'inquiéter l'un pour l'autre.

Puis, la nostalgie : les souvenirs de mes sentiments après la mort de Zaira étaient horribles, je ressentais un vide profond, mon cœur pesait une tonne dans ma cage thoracique. Tous les souvenirs que j'avais construits avec elle, tout ce que j'avais appris grâce à elle, le changement qu'elle eut sur moi, et ses mots doux qui m'aidaient à aller mieux... Tous ses moments partagés à ses côtés venaient de s'écrouler. Moi qui voulait continuer de vivre et de partager ces moments là à ses côtés, je ne pouvais plus jamais les vivre. La seule fois où je pouvais les revivre, c'était dans mes rêves et ma tête lorsque j'étais seul dans ma chambre. Je pouvais fixer le vide pendant des heures, regarder le paysage défiler lorsque je prenais la voiture, tout ça uniquement dans le but de faire défiler ses souvenirs. Zaira faisait la même chose, et moi et Sofiane ne la comprenions jamais, on se demandait toujours comment elle pouvait fixer le paysage comme ça pendant plusieurs heures. Mais quand je l'ai vécu, je l'ai compris : elle s'évadait dans un autre monde, un monde qui lui plaisait où elle était maître du scénario et du déroulement. Et moi sans m'en rendre compte, j'ai repris cette mauvaise habitude que Zaira avait, je m'évadais dans un monde où elle était encore là, où je pouvais encore la voir sourire. A cause de ça, j'ai commencé à dormir de plus en plus, délaissant la réalité pour me plonger dans le fictif. Quand je m'endormais, c'était comme si j'ouvrais une porte qui m'emmenait dans un univers parallèle, je laissais tous mes problèmes derrière cette porte, parce que dans le monde où j'étais, aucun problème ne pouvait venir perturber le bien-être dans laquelle j'étais. Mais quand je me réveillais de ces rêves parfaits, la réalité me tombait dessus.

Et c'est comme ça que j'en viens au dernier sentiment : la tristesse. Rien n'a pu me sauver, je continuais de m'évader grâce à ses rêves, mais au réveil, j'avais encore plus mal que quand je m'étais endormie. Au lieu de m'aider à aller mieux, ces fictions m'empêchaient d'avancer, elle me plongeait encore plus dans les ténèbres. Mais même en ayant comme conclusion que dormir et rêvasser ne m'aideront jamais à guérir, je continuais, je m'accrochais à ça. C'était devenue une addiction toxique, j'aimais m'infliger tout ça, car même si en me réveillant je me sentais encore plus mal que d'habitude, je ressentais un sentiment de bien être en rêvant de tout ça. Dans ce mal se trouvait du bien, et inversement. Maintenant que Yasmina me pose la question, je me rends compte que rien n'a pu me sauver.

Personne ne m'a sauvé.

J'ai simplement appris à vivre avec, j'ai essayé d'enfouir cette douleur en rêvant et en aidant mes proches. En voulant jouer les super héros et en essayant d'aider tout le monde à aller mieux, je me suis petit à petit oublié. J'ai caché mon mal-être sous forme de sommeille, je n'ai jamais appris à la guérir ou bien même à le faire disparaître. Je le camoufle juste, mais il vivait avec moi, tous les jours, tous les soirs, depuis deux ans. Même à l'heure d'aujourd'hui je continue de faire tourner en boucle ces scénarios dans ma tête, sans jamais m'en lasser. Et je ne m'en lasserai jamais, parce qu'à force, s'en est devenu une habitude et je le fais parfois sans m'en rendre compte. Il suffit qu'on me laisse seul quelques minutes pour que je divague dans un océan de pensées et de souvenirs dans lequel je navigue, à la recherche de souvenirs oubliés qui me permettront de ressentir les émotions que j'ai perdu après sa mort.

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⏰ Dernière mise à jour : 7 days ago ⏰

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