(POV Anaïs)
Le vent salé de l'océan caressait mon visage alors que je contemplais l'horizon depuis le balcon. La petite maison que nous avions trouvée, perchée sur une falaise au sud du Portugal, ressemblait à un refuge. Un endroit où le monde semblait suspendu.
Cela faisait trois semaines que nous avions effacé les données. Trois semaines à apprendre à vivre autrement. Sans courir. Sans regarder constamment par-dessus notre épaule.
Enfin... presque.
Je portai mon café à mes lèvres, observant Élias à travers la baie vitrée. Il était dans la cuisine, concentré sur une poêle qui semblait refuser de coopérer. Le voir si absorbé par une tâche aussi banale m'arracha un sourire. Il était différent, ici. Moins tendu, presque apaisé.
Mais je savais que cela ne durerait pas.
— Tu comptes me regarder brûler ces œufs sans rien dire ? lança-t-il, sans même tourner la tête.
Je ris doucement avant de rentrer.
— Tu fais déjà des progrès. Aujourd'hui, on dirait au moins de la nourriture.
Il roula des yeux, mais un sourire en coin adoucit ses traits. C'était ces moments-là qui rendaient tout supportable. Les éclats fugaces de normalité.
— On pourrait engager un chef, suggéra-t-il en posant deux assiettes sur la table.
— Oui, bien sûr. Et attirer l'attention de tout le village avec nos goûts de luxe ? Parfait pour rester discrets.
Il haussa les épaules en s'asseyant face à moi, son sourire s'effaçant légèrement.
— Discrets. Toujours.
Il n'avait pas besoin de développer. Le silence entre nous s'alourdit, et je sentis ce poids familier revenir sur mes épaules.
Même ici, à des milliers de kilomètres de tout ce que nous avions connu, l'ombre de l'organisation planait toujours.
(POV Élias)
Après le petit-déjeuner, je m'occupai de la vaisselle pendant qu'Anaïs disparaissait avec son carnet. Elle écrivait de plus en plus ces derniers temps. Elle disait que c'était pour évacuer, mais je savais qu'il y avait plus. Une façon de reprendre le contrôle, peut-être.
Moi, je n'avais pas ce luxe.
Mon regard se posa sur l'étagère dans le salon, où j'avais caché l'arme que nous avions ramenée. Nous avions décidé de ne plus les utiliser, mais une part de moi ne pouvait pas s'y résoudre.
Un bruit de pas derrière moi me fit sursauter. Anaïs était revenue, son carnet à la main, et me regardait avec une expression que je ne comprenais pas.
— Il faut qu'on parle, dit-elle doucement.
Je posai l'assiette que j'essuyais, fronçant les sourcils.
— Tout va bien ?
Elle hocha la tête, mais ses yeux disaient autre chose.
— Je crois qu'on est suivis.
(POV Anaïs)
Je m'attendais à une explosion de colère, à ce qu'il me reproche de me faire des idées. Mais Élias resta immobile, son regard sombre scrutant chaque recoin de mon visage.
— Qu'est-ce qui te fait dire ça ? demanda-t-il enfin, sa voix basse, maîtrisée.
Je pris une inspiration.
— Hier, à la supérette. Un homme. Il était là quand je suis entrée, et encore là quand je suis sortie. Il ne faisait pas ses courses. Il me regardait.
Je m'attendais à ce qu'il minimise, à ce qu'il essaie de me rassurer. Mais il acquiesça, comme si cela confirmait une pensée qu'il avait déjà eue.
— Ça n'a peut-être rien à voir, mais on ne peut pas prendre de risques.
Il se dirigea vers le salon, et je sus immédiatement où il allait.
— Élias, non.
— On ne peut pas être naïfs, Anaïs, répliqua-t-il en sortant l'arme de sa cachette. Si quelqu'un nous a retrouvés...
— On ne sait même pas si c'est lié à eux.
— Et si ça l'est ?
Son regard brûlait de cette détermination froide que j'avais appris à redouter.
(POV Élias)
La nuit était tombée lorsque je quittai la maison, laissant Anaïs derrière moi. Je lui avais promis de ne pas agir impulsivement, mais je savais qu'elle ne dormirait pas tant que je n'aurais pas vérifié.
Je pris un chemin détourné pour atteindre le centre du village, m'assurant de ne pas être suivi. La supérette était fermée, mais je voulais repérer les alentours, voir si quelque chose ou quelqu'un semblait anormal.
Je marchai lentement, mes sens en alerte. Les ruelles étaient presque désertes, à l'exception de quelques habitants tardifs. Rien d'inhabituel.
Mais alors que je me dirigeais vers la plage, je le vis.
Un homme, à moitié dissimulé dans l'ombre, son regard braqué sur moi.
(POV Anaïs)
Je n'avais pas pu rester immobile. Chaque minute qu'Élias passait dehors me rendait folle d'inquiétude.
Alors, je pris une décision.
J'enfilai une veste et sortis dans la nuit froide. La rue était déserte, mais je savais où il irait. Il cherchait des réponses, tout comme moi.
Lorsque j'atteignis la plage, je le vis.
Et je vis l'autre homme.
Je retins mon souffle en observant Élias s'approcher lentement, son arme cachée sous sa veste. L'homme, lui, semblait désarmé, mais cela ne signifiait rien.
Je fis un pas en avant, prête à intervenir, mais un bruit derrière moi me figea.
Une main se posa sur mon épaule.
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Entre l'Ombre et le Feu
RomanceAnaïs Morel, une serveuse solitaire d'un village isolé, rencontre Élias Delorme, un homme mystérieux et taciturne qui semble fuir son passé. Intriguée, Anaïs s'approche de lui malgré sa froideur, découvrant peu à peu que Élias est en fuite, poursuiv...