Ostru: Fragments d'un Monde Déchu

Chapitre 62

Itani était assise sur le toit d'une maison, les jambes croisées, un sourire discret effleurant ses lèvres. Ce coin de paradis, c'était Tame qui le lui avait indiqué. De là, elle pouvait embrasser toute la beauté de Lilithe du regard. La ville s'étalait devant elle, vibrante et pleine de vie, malgré les ombres persistantes du passé.

Sous ses pieds, le brouhaha des rues montait jusqu'à elle, une symphonie chaotique mais étrangement apaisante. Elle pouvait distinguer les rires des enfants jouant dans une ruelle, le bruit des marchands qui s'interpellaient, et, dominant le tout, la douce mélodie d'un barde jouant un air ancien, sa voix éraillée contant une histoire d'amour et de guerre. Cette musique semblait se fondre dans l'air, ajoutant une touche presque magique à son moment de détente.

Lilithe était magnifique, un mélange d'ancien et de nouveau, de beauté brute et de cicatrices visibles. Les bâtiments, aux façades colorées mais marquées par le temps, s'ornaient de détails qui témoignaient d'une époque révolue : des balcons sculptés, des vitraux brisés mais encore éclatants sous la lumière du soleil, des enseignes rouillées portant des noms oubliés.

Au loin, ses yeux se posèrent sur des ruines majestueuses, envahies par une végétation luxuriante. Des lianes et des fleurs sauvages couraient sur les murs effondrés, transformant ces vestiges de pierre en une œuvre d'art naturelle. Les rayons du soleil couchant baignaient les ruines d'une lumière dorée, faisant scintiller la rosée accrochée aux feuilles.

Elle se perdit un instant dans ses pensées. Que représentaient ces ruines autrefois ? Un temple dédié à une divinité oubliée ? Une bibliothèque où l'on conservait des trésors de savoir ? Un palais où régnait une famille aujourd'hui effacée par le temps ? Lilithe, avec ses mystères et ses secrets, était une énigme fascinante.

Même au milieu de ce chaos post-apocalyptique, la ville débordait de vie et de beauté. Les toits des maisons scintillaient sous les derniers rayons du jour, et les lampions suspendus aux balcons s'allumaient peu à peu, illuminant les rues d'une lumière douce et chaleureuse. Dans un coin, une petite place se remplissait d'habitants venus partager un repas ou écouter les histoires du barde.

Le vent léger caressa le visage d'Itani, apportant avec lui les senteurs de Lilithe : un mélange de bois brûlé, de fleurs sauvages et d'épices provenant des étals en contrebas. Elle inspira profondément, fermant un instant les yeux pour savourer l'instant.

Lilithe n'était pas parfaite, loin de là. Les cicatrices de l'apocalypse étaient encore visibles : des bâtiments à moitié effondrés, des rues pavées déformées par le temps, des machines anciennes recouvertes de rouille et de mousse. Mais c'était dans ces imperfections que résidait sa beauté. La ville portait son histoire comme une couronne, transformant ses blessures en quelque chose de vivant, de puissant.

Un éclat de lumière attira son regard. Une rivière serpentait au loin, ses eaux argentées reflétant le ciel qui se teignait de nuances d'or, de pourpre et d'indigo. Elle suivit son cours des yeux, remarquant les ponts anciens, certains intacts, d'autres brisés mais toujours debout, comme des sentinelles défiant le temps.

Itani ouvrit les yeux, laissant échapper un léger soupir. Lilithe avait ce pouvoir étrange sur elle : un mélange d'apaisement et de curiosité insatiable. Chaque détail, chaque coin d'ombre ou éclat de lumière, semblait murmurer une histoire qu'elle mourait d'envie de découvrir.

Perdue dans ses pensées, Itani fut brusquement ramenée à la réalité par un bruit derrière elle. Quelqu'un grimpait pour la rejoindre. Elle aurait pu être sur la défensive, mais cette respiration, ce rythme régulier et un peu précipité, elle le reconnaissait entre mille. La manière dont cette personne escaladait, pleine d'enthousiasme mais un peu maladroite, ne laissait aucun doute : c'était Tame.