Sous ton emprise

chapitre 3

Lenne n'avait pas dormi de la nuit. Les échos de sa dispute avec Evan tournaient encore en boucle dans son esprit. Chaque mot, chaque regard, chaque instant où elle avait cru percevoir une once de sincérité dans ses paroles revenaient la hanter. Elle s'était retournée des dizaines de fois dans son lit, le cœur lourd, les larmes brûlant ses joues. Pourquoi était-elle incapable de le sortir de sa vie, de son esprit, alors qu'il était clairement le pire choix possible pour elle ?

Au matin, elle se traîna hors du lit, enfilant distraitement un sweat trop large et un jean. Elle devait sortir, marcher, respirer. Le ballet était toujours son échappatoire, mais ce jour-là, même danser semblait impossible. Elle attrapa son sac et quitta son petit appartement sans but précis, les rues de la ville baignées dans une lumière grise et froide.

Ses pas la menèrent presque instinctivement vers le parc où elle allait souvent pour se vider l'esprit. Les arbres étaient dénudés, leurs branches comme des mains squelettiques tendues vers le ciel. Elle s'assit sur un banc, le regard perdu.

— Lenne.

Elle sursauta, son cœur ratant un battement. Evan était là, debout devant elle, les mains enfoncées dans les poches de sa veste en cuir. Il avait cet air nonchalant qui la mettait hors d'elle, mais ses yeux… ses yeux étaient différents. Plus sombres, plus troublés.

— Qu'est-ce que tu fais ici ? murmura-t-elle, la gorge sèche.

Il ne répondit pas tout de suite. Il s’assit à côté d’elle, suffisamment près pour qu’elle sente la chaleur de son corps, mais sans la toucher. Elle sentit son propre souffle s’accélérer, partagée entre l'envie de fuir et celle de rester.

— Je voulais te parler. Je… Je crois que je t'ai laissé une mauvaise impression hier soir.

Elle éclata d'un rire amer, secouant la tête.

— Une mauvaise impression ? Tu te fous de moi, Evan ? Tu… tu crois que tout se résume à une impression ?

Il resta silencieux un instant, comme s'il pesait ses mots. Puis, contre toute attente, il sortit quelque chose de sa poche. Une enveloppe froissée.

— Qu'est-ce que c'est ? demanda-t-elle en fronçant les sourcils.

— Lis-le.

Il posa l’enveloppe sur le banc entre eux. Elle hésita, fixant le papier comme s’il était une bombe sur le point d’exploser. Finalement, elle tendit la main, ses doigts tremblants déchirant le bord de l’enveloppe. A l’intérieur, une lettre manuscrite, les mots griffonnés à la va-vite, mais écrits avec une intensité palpable.

— Evan… murmura-t-elle en lisant les premières lignes.

*"Lenne, je sais que je suis mauvais pour toi. Peut-être le pire que tu puisses choisir. Mais je ne peux pas m'empêcher de revenir. Tu mérites mieux, et pourtant, une partie de moi espère que tu resteras. Hier soir, ce que tu as vu… Ce n'était pas ce que tu crois. Je veux que tu saches la vérité, mais j'ai peur que cela te fasse fuir."*

Sa gorge se serra alors qu'elle relevait les yeux vers lui.

— La vérité ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'est-ce que tu me caches encore ?

Evan se passa une main dans les cheveux, visiblement nerveux. Elle ne l'avait jamais vu comme ça, lui qui était toujours si assuré.

— Je ne peux pas t’en parler ici. Mais si tu veux savoir… si tu veux vraiment comprendre, rejoins-moi ce soir. À la vieille salle de boxe, à 21 heures. Pas avant.

Lenne le fixa, partagée entre la colère, la curiosité et une pointe de peur. Tout en lui criait danger, et pourtant, elle savait qu'elle irait. Parce que c'était Evan. Et qu'il était le seul à pouvoir la faire se sentir aussi vivante qu'elle était brisée.

Il se leva, la laissant seule avec l’enveloppe froissée entre les mains. La journée lui sembla interminable, chaque seconde étirée par l’anticipation et l’appréhension. Lorsque l’heure arriva enfin, elle se retrouva devant la vieille salle de boxe, son cœur battant à tout rompre.

La porte était entrouverte. Elle poussa doucement, entrant dans la pénombre. L’air était lourd, chargé d’une tension qu’elle ne pouvait ignorer. Evan était là, debout au centre du ring, comme s’il l’attendait depuis toujours.

— Tu es venue, murmura-t-il, une étincelle indéchiffrable dans le regard.

Elle s’approcha lentement, ses jambes lourdes comme du plomb. Mais avant qu’elle ne puisse dire quoi que ce soit, un bruit sourd retentit derrière elle. Elle se retourna brusquement, son souffle coupé. Deux ombres se tenaient à l’entrée, leurs silhouettes menaçantes.

— Evan, qu’est-ce qui se passe ? murmura-t-elle, sa voix tremblante.

Mais il ne répondit pas. Il ne bougea pas, ses yeux fixant les deux hommes comme s’il les connaissait. Et soudain, Lenne comprit que cette nuit allait changer sa vie, d'une façon qu'elle n'était pas prête à affronter