12-l'alerte

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Lorsque je rentrai au palais, l’aube pointait déjà à l’horizon. J’avais réussi à échapper à Feryn en me dissimulant dans la profondeur des bois, usant de mes sens aiguisés pour le semer. J’avais fini par chasser un cerf, absorbant juste assez de sang pour calmer ma faim sans me risquer à rester plus longtemps à découvert.

Avant de franchir les murs du palais, je pris le temps de camoufler mes yeux jaunes, les rendant d’un bleu commun parmi les elfes. Je vérifiai mon apparence dans une flaque d’eau, resserrai ma cape autour de mes épaules, et m’efforçai de paraître aussi normal que possible en rejoignant mes quartiers.

Mais l’agitation dans les couloirs dès le lever du soleil me mit immédiatement mal à l’aise. Quelque chose n’allait pas.

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Le lendemain matin, alors que je venais de terminer ma première ronde, un messager m’interpella.

« Vil, le roi te convoque immédiatement dans la salle du trône. »

Je sentis une tension froide descendre dans ma poitrine. Une convocation de Kerna n’était jamais un bon présage.

Je pris une profonde inspiration avant de me diriger vers la grande salle. En entrant, je trouvai Kerna debout près de la grande fenêtre, les mains croisées dans le dos, une posture autoritaire et intimidante.

« Majesté, » dis-je en m’inclinant légèrement.

Il se retourna lentement, son regard gris perçant me sondant avec intensité.

« Vil, » dit-il calmement, bien que sa voix portait une nuance de menace latente. « Nous avons un problème. »

Je me redressai, feignant la confusion. « Quel genre de problème, majesté ? »

Il s’approcha de moi d’un pas mesuré, son aura imposante rendant l’air presque suffocant.

« Cette nuit, un de mes gardes a repéré un intrus dans la forêt. Un Némérys. »

Mon cœur rata un battement, mais je gardai mon visage parfaitement impassible.

« Un Némérys, majesté ? Dans la forêt ? »

Il hocha la tête, ses yeux se plissant légèrement comme pour capter la moindre trace de mensonge.

« Oui. Il avait des cheveux blancs. Comme toi. »

Son ton était calculé, ses mots choisis avec soin pour provoquer une réaction.

Je laissai un silence calculé s’installer avant de répondre.

« Vous pensez que j’ai quelque chose à voir avec cet intrus, majesté ? »

Il esquissa un sourire glacial, un mélange de mépris et d’amusement.

« Dois-je le penser ? »

Je me permis un léger rire, bien que chaque muscle de mon corps était tendu.

« Majesté, je n’ai jamais quitté mes quartiers cette nuit. Vous pouvez demander à mes camarades. »

Kerna continua de me fixer, comme s’il cherchait à percer un mur invisible.

« Feryn prétend que cet intrus s’est enfui avec une agilité peu commune. Qu’il semblait… familier avec nos bois. »

Je haussai un sourcil. « Les Némérys sont connus pour leurs capacités physiques exceptionnelles. Mais je doute qu’ils soient familiers avec le territoire des elfes. Peut-être un éclaireur isolé ? »

Kerna resta silencieux un instant, avant de s’éloigner légèrement, son regard toujours rivé sur moi.

« Peut-être. » Il tourna la tête vers la fenêtre. « Si c’est un éclaireur, cela signifie que les Némérys pourraient préparer quelque chose. Une invasion, peut-être. »

Je fis un effort pour paraître préoccupé.

« Si cela est vrai, majesté, nous devrions renforcer la garde aux frontières. Peut-être envoyer des éclaireurs pour enquêter. »

Il se tourna brusquement vers moi, un sourire énigmatique sur le visage.

« Une suggestion avisée. Peut-être devrais-je t’envoyer, toi. »

Je m’inclinai légèrement, masquant le tumulte intérieur.

« Ce serait un honneur, majesté. »

Il me jaugea encore un instant, puis fit un geste de la main.

« Va. Mais garde une chose en tête, Vil : je déteste les mensonges. Et je déteste encore plus les traîtres. »

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En quittant la salle du trône, je sentis une sueur froide couler le long de ma nuque. Kerna avait des soupçons. Peut-être pas assez pour agir immédiatement, mais suffisamment pour garder un œil sur moi.

Je savais que je devrais être encore plus prudent. Non seulement pour protéger mon identité, mais aussi pour protéger Rûn. Car si Kerna découvrait la vérité… je savais qu’il n’hésiterait pas à m’utiliser comme prétexte pour justifier sa cruauté.

le voyage de VilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant