La nuit est tombée depuis quelque temps déjà. J'ai du attendre que mon père aille se coucher. J'ai enfilé un sweat et des baskets et commence à descendre les escaliers le plus silencieusement possible. Une fois en bas, je maudis le parquet de grincer au moindre mouvement mais me débrouille tout de même pour me retrouver devant la porte sans catastrophe. Je m'autorise alors à respirer à nouveau et me sauve de chez moi pour la première fois.
La nuit est froide, je frissonne et tire la capuche du sweat sur ma tête. Je connais le chemin par cœur, mais je commence à appréhender le trajet de nuit. Disons que le club n'est pas dans les beaux quartiers, et dès que la nuit tombe les loups sont de sortie. Mais il est trop tard pour réfléchir à présent. Je presse le pas.Je suis à deux rues à présent. Trois silhouettes d'hommes se découpent au bout de la ruelle sombre. Mon cœur s'emballe. Je ne peux rien faire à part accélérer le pas et tenter d'ignorer les battements trop rapides de mon cœur. Aucun enfant de cœur ne traîne dans ces rues la nuit. Je réalise alors que leurs éclats de voix se sont tus et relève la tête pour réaliser qu'il se sont déployés dans la rue de façon à ce que je ne puisse plus passer. Des sourires malsains s'étirent sur leur lèvres et ils me fixent, une lueur mauvaise dans le regard. Désormais, j'ai la certitude d'avoir fait une connerie, et d'être sur le point d'en payer le prix.
"Hey beauté, tu viens faire un tour"
"Non, je rentre chez moi la"
"Comment ça tu rentres chez toi? Moi et mes potes on pensait pouvoir passer un bon moment avec toi..."
Ils se rapprochent dangereusement de moi et me bloquent le passage.
"Laissez-moi passer"
"Pourquoi? On est pas pressés! Moi j'ai toute la nuit..."
J'essaie de me frayer un passage mais l'un d'entre eux me prend le bras.
"Laissez moi passer j'ai dit! Et me touche pas toi!"
"Ouhh attention ça mords! Y'a pas de soucis bébé, tout est cool..." Dit celui qui me tient en me caressant la joue.
Je panique et essaie de me dégager mais les deux autres m'attrapent et me poussent contre le mur. Je leur hurle de me laisser et appelle à l'aide, mais rien ne se passe.
L'un d'entre eux me dit de la fermer et se colle contre moi, sa tête répugnante contre mon cou. Je hurle et lui met un coup de genou à l'aveugle, mais je dois avoir bien visé car il se tord de douleur en se tenant l'entrejambe. Je m'apprête à partir en courant mais un second me frappe au visage. Sonnée je m'écroule sur le mur, et il en profite pour me toucher brutalement la poitrine. Je hurle à nouveau et il met sa main sur ma bouche. J'essaie alors de le mordre par tous les moyens mais n'obtient en retour qu'un rire sauvage."Sois pas une mauvaise fille ou ça pourrait finir très mal..."
J'essaie de parler mais sa main m'en empêche. Les larmes commencent à monter et j'ai du mal à respirer. Je ne sais plus quoi faire, mon cerveau marche au ralentit et je ne vois aucune échappatoire. Le troisième se rapproche à son tour, et de nouveau je me débat de toutes mes forces, criant à plein poumons. Mes coups partent dans toutes les directions et certains atteignent leur cibles, mais un genou vient ensuite s'écraser sur mon estomac et me coupe le souffle. Je m'écroule et suffoque tandis que pleuvent de nouveaux coups. Je suis au sol, repliée sur moi même
et j'encaisse, espérant sans doute que tout s'arrête enfin. La douleur insoutenable, la peur, le désespoir...
Puis quelque chose change dans l'atmosphère. D'autres personnes arrivent et s'en prennent à mes agresseurs. J'entend malgres mon oreille sifflante une voix familière."Bandes de fils de putes!!"
C'est Anthony. Et si j'en avait été capable, j'en aurais pleuré de joie. Avec lui, une autre voix se fait entendre...
"Kara!! Kara ça va?"
Et malgres le temps qui a passé, je reconnaît les intonations de Kaleb. Tout se passe de travers et rien ne va comme prévu, mais le chaos n'est pas total puisqu'il est de nouveau la, et que je ne suis plus seule. Je m'adosse au mur, récupère mon souffle m'aide de ce dernier pour me relever. Mes côtes sont douloureuses, j'ai une vision terrible et la tête me tourne, je dois également saigner de la bouche car un goût métallique à envahi mon palais. Les trois gars sont à présent dans un état aussi piteux que le mien, et je contemple la scène sans savoir quoi faire. Une larme coule sur ma joue; larme d'impuissance, de douleur et de désespoir. Je l'essuie rageusement. Alors qu'Anthony continue de se déchaîner contre les trois hommes, deux grands bras m'entourent et me serrent. Je m'y abandonne, retrouve l'odeur qui a bercé mon enfance et qui a nouveau me réconforte et efface ma peine. Je le serre contre moi comme jamais, comme si je devais le perdre la seconde suivante. Je ne peux même pas voir son visage mais je le retrouve tel que je l'ai laissé, ou plutôt tel qu'il m'a laissé.
"Kara je suis désolé pardonne moi. Je pourrais les tuer sur le champs ces fils de putes, les faire souffrir pour t'avoir touché...Dis moi que tu me pardonnes s'il te plait, je suis tellement désolé!!"
"Tu vas partir?"
Ma voix sonne comme un râle, fantomatique. On y perçoit les sanglots que je m'évertue à dissimuler.
"Non, non c'est promis. Suis moi, on va te soigner. Petite sœur..."
Je m'appuie sur lui, toujours soutenue par ses bras puissants, et nous nous dirigeons vers le club. Je sens son souffle saccadé, je perçois sa colère et sa frayeur.
J'essaie d'assimiler ce qu'il se passe mais je n'y arrive pas. J'ai eu tellement peur, mon cœur refuse de se calmer et mon corps entier tremble contre celui de mon frère disparu...La lumière du hangar s'allume brusquement et m'aveugle. Kaleb m'assois sur un banc et se précipite vers le bureau du coach. J'observe sa silhouette, me demandant toujours si tout cela est réel. Je veux voir son visage.
"Putain Kara, qu'est ce qui t'as pris de venir ici seule le soir!? T'es complètement folle ma parole, ça t'arrives de réfléchir!"hurle Anthony en entrant brusquement dans le club.
Je fixe ses poings couverts de sang sans pouvoir m'en détacher. Il se met à genoux devant moi et me relève le visage. Je sens la nervosité de son corps près de moi, sa respiration rapide et les battements incontrôlables de son cœur. Étrangement ça me calme.
"Je voulais voir Kaleb, j'ai pas réfléchi..."
"Vous vous connaissez?"
Kaleb se tient dans la lumière, une trousse de secours à la main. Je lève les yeux vers son visage, celui d'un homme à présent. Le même qu'auparavant, avec en plus une barbe naissante et les joues plus creusées peut être. Il semble surpris, et même inquiet de me voir avec Anthony.
"On parlera de tout ça après Kaleb, soignons-la d'abord" intervient le coach, apparaissant derrière lui.
C'est vrai qu'il vit dans le hangar. D'ailleurs celui-ci à quelque chose d'inquiétant la nuit, vidé de tous ses occupants. Une lumière jaune crue recouvre la pièce d'un halo étrange. Je reporte mon attention sur les trois hommes en fasse de moi. J'évite le regard de Kaleb qui m'observe comme s'il me voyait pour la première fois. J'évite celui d'Anthony également, trop dur, trop insistant. Reste le coach, qui détaille mon visage pour évaluer les dégâts, de son calme olympien habituel. Il prend la trousse des mains de Kaleb et me désinfecte les plaies du visage."Anthony a raison, tu n'aurais jamais dû venir ici seule."
"Je ne comprend toujours pas comment elle vous connait!"s'emporte Kaleb
"J'ai agit sur un coup de tête, je savais que Kaleb serais là." Je répond au coach en ignorant mon frère.
Il m'applique ensuite un pansements sur l'arcade sourcilière, puis examine mon corps avant de me dire que pour le reste, il faudra être patiente. Je saisi la pilule qu'il me tend, sensée apaiser la douleur en attendant, et l'avale.
Je me retourne à présent vers celui qui une fois de plus c'est révélé mon ange gardien, et prend une inspiration, prête à tout lui raconter.
VOUS LISEZ
Anger my dear friend
Novela JuvenilÀ 17 ans, gérer ses émotions est loin d'être une chose simple. Kara se laisse de plus en plus souvent envahir par la colère et la violence qui font rage en elle, et pour combattre ça elle a trouvé une solution: Boxing Club. Elle va entrer dans l'uni...