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J'aimais l'odeur et le style vintage que rendait ma chambre. La tapisserie jaunâtre ornée de fleurs et la commode en vieux chêne donnaient l'aspect qu'une femme était passée par là. L'odeur usée des draps, la tête de lit brodée à la main. 

J'avais remarqué qu'il y avait encore des tas d'objets personnels, des vêtements d'hommes vieux et propres étaient rangés dans la commode, ainsi que du parfum, sûrement cher à l'époque, j'ouvris le flacon et une forte odeur d'alcool se dissipa dans la pièce, recouvrant même l'odeur de vieillesse. 

J'avais trouvé une lame de rasoir accrochée à un manche et  une brosse à dent, vieille et pourries.


Romy était dans sa chambre, juste en face de la mienne. J'entendais la musique traversait le couloir pour m'adoucir les esprits. J'avais récupéré mon téléphone et avait réussi à capter du réseau près de ma fenêtre. 

"28 sms en attente de lecture. "

"86 messages vocaux en attente  de lecture."

"102 appels manqués."  

Léa, avait dû user tout son forfait mobile alors que je l'avais prévenu des orages à venir, et que si c'était trop dangereux, je resterais dans l'hôtel ou l'auberge la plus proche. 

On sortait ensemble depuis deux ans, mais j'avais l'impression qu'elle avait changée, et que mes sentiments avaient suivi la danse. 

Elle était ma femme parfaite, magnifique, fine, intelligente. Mais le seul défaut était la jalousie. Je  sais, une pointe de jalousie ne fait pas de mal, cela prouve l'amour, tout ça, tout ça. Mais de la jalousie au point de m'appeler 102 fois dans une journée, alors que je l'avais prévenu de mon retour tardif, était abusé. 

Léa n'avait pas toujours été comme ça. Quand je l'ai rencontré, elle était simple, jolie, calme et sereine. Elle me faisait confiance plus qu'à n'importe qui. Mais d'un jour à l'autre, dans  un déclic surnaturel, elle était devenue cruelle, froide et égoïste. Ne donnant sa confiance qu'à son propre elle même.

Je ne sais pas qui ou quoi à été le déclic, mais sûrement pas moi.

Je décidai de l'appeler pour la rassurer. Sans lui raconter toute l'histoire. 

Elle décrocha à la première sonnerie. 

-Allô ? Luc ? T'es où ? J'ai failli appeler les flics, pourquoi tu ne répondais pas ? 

-Heu... Je viens d'arriver dans une auberge, j'ai fait des photos, mais en partant l'orage est tombé. J'ai préféré m'arrêter. J'ai bien fait, non ? 

-Tu aurais au moins pu m'appeler.

Elle me parlait avec aucune envie, mais comme si un homme cagoulé tenait un fusil sur sa tempe en lui dictant les mots.

-Je suis dans un coin paumé, il n'y a vraiment pas beaucoup de réseaux.

Elle me croyait, pour une fois. Je savais mentir plus que n'importe qui, simplement parce que j'ai passé mon enfance à le faire. Les adolescents mentent pour sortir ou pour avoir de l'argent de poche, moi, j'étais déjà différent à 13 ans. Je mentais pour cacher mes sentiments, parce que je savais que si quelqu'un réussissait à les percevoir, je serai devenu trop vulnérable pour ce monde. Avec le temps, cette manie de mentir m'était passée, à moitié. Je savais mentir, mais je ne l'utilisais que quand il y a nécessité. La voix me criant dessus que je ne l'écoutais pas, me rappela que là, il y avait vraiment nécessité.

-Excuse-moi chérie. Je vais en profiter pour rester ici, les vues sont magnifiques, et il y a des tas de choses à photographier.

Sale garce.

Avant qu'elle ne pût riposté, je raccrochai. 

J'étais assis sur une chaise en bois, tournant dos à la porte. En me levant, je constatai que Romy était dans l'entrée de ma chambre et que la musique était éteinte. Elle me regardait, étonnée.

-Je voulais te dire bonne nuit. 

Eh merde !

Elle m'avait parlé doucement, d'une voix timide que je commençais à bien connaitre. 

J'étais gêné qu'elle est entendu la conversation. 

-Oh,  j'ai un peu faim, tu viens grignoter un truc ? 

J'avais lancé cela sans hésiter. J'avais envie de passer encore du temps avec elle. 

Elle hocha la tête et on descendit en silence. 


J'avais réussi à la traîner sous un plaid pour regarder un vieux film qui ne m'apportait pas plus qu'un documentaire sur la bave d'escargot. 

On mangeait des chips aux sels en regardant un film français. Je connaissais la plupart des comédiens et je crois même l'avoir déjà vu. Mais j'étais trop concentré à me  demander si je devais la prendre dans mes bras, lui parler ou faire quelque chose, pour suivre le film. 

Àla fin du film, elle se tourna vers moi.

-C'était qui au téléphone ? 

Elle connaissait la réponse, ce n'est pas sa sœur qu'on appelle chérie.

-Ma copine.

-Pourquoi tu ne me l'as pas dit ?

Sa voix tremblait, elle s'en voulait. Elle n'était pas en colère, mais semblait déçue. Elle aussi, venez de perdre sa confiance en moi. 

-Qu'est-ce que ça aurait changé ? 

Elle avait les larmes aux yeux, et maintenant, c'est moi qui m'en voulais de ne rien lui avoir dit. Mais au fond, si je lui avais dit, il n'y aurait pas eu cette complicité entre nous.

-Je... Je ne t'aurais pas embrassé. Tu aurais fait tes foutues photos et tu serais parti. 

J'ai décidé d'ignorer ses mots et d'attaquer. 

-De quoi as-tu peurs ? Qu'est-ce qui t'effrayes au point d'avoir peur de dormir ici seule ?

J'avais parlé lentement, sans aucune colère. 

J'essuyai une larme, qui coulait sur sa joue, avec mon pouce. Et profita de l'occasion pour regarder ses lèvres, elles tremblaient. Je détournai mon regard et plongeai dans le marron de ses yeux. 

J'attendais une réponse, elle le savait. 

Le noir n'est pas triste, il est poétique.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant