Chapitre V

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Ensuite, tout s'est passé très vite. Les gens affluent, te présentent leurs condoléances, plus ou moins sincères. Il y a des jeunes, des vieux, des proches, des inconnus. Certains te serrent la main, d'autres baissent simplement la tête. Un mot, une phrase murmurée timidement, un regard réconfortant. Mes proches me serrent dans leurs bras, les inconnus nous observent de loin. Quelques uns se permettent un regard appuyé et mal placé en ma direction. Je veux leur cracher ma haine au visage. Une petite main dans la mienne me retient de faire une bêtise.

Ma tête va exploser. J'en ai assez de toute cette comédie pathétique. J'ai besoin d'être seule, dans ma bulle, mon monde. Essayer de respirer de nouveau. J'étouffe. Je veux hurler, frapper, briser, brûler, tout détruire. Tremblante et pâle, je m'éloigne de l'attroupement, et m'appuie contre un arbre, loin et à l'écart.

« Tu es vraiment jolie tu sais ? » Mon sang se glace, mes poings se serrent. Tout sauf cette voix. Pas lui, pas maintenant. Il ne devrait pas être là. Tout est de sa faute, j'en suis sûre. Lentement, je me retourne et fais face à Eliott. Il doit faire une tête de plus que moi, musclé et baraqué à souhait, le genre de mec devant qui tu baisses les yeux. Son visage m'insupporte, son sourire narquois me donne des envies de meurtre.

Je fais quelques pas, puis plante mon regard acidulé dans le sien, la bouche pincée et les joues rouges. Il me sourit. Le diable, ce garçon est le diable. J'ouvre la bouche pour l'insulter, mais le voilà qui commence à me caresser la joue. Je sens toute la rage monter en moi. Je suis une bombe à retardement. Je vais exploser, il va déguster le pauvre petit.

Sèchement, je lui attrape la main et plante mes ongles dedans. Je vois son visage se crisper, ses yeux se noircir. Allez, montre qui tu es vraiment. Il arrive à dégager sa main puis s'approche un peu plus près de moi, les sourcils froncés, le regard mauvais et un sourire méchant aux lèvres. Il va me cogner, ça va être ma fête.

Je ne sais pas ce qu'il se produit alors en moi. C'est comme si toute ma peine me rendait soudain plus forte, plus stable et plus rapide. Alors tout me paraît évident. Il est temps pour moi. C'est rapide, précis, douloureux. Mon poing me fait mal, mes phalanges sont toutes abimées. Mais son nez, son nez est tellement écarlate que je dois l'avoir cassé. Eliott peste, se tient la figure. Il se rue sur moi. Je l'évite, je suis bien plus agile que lui. Il tombe à la renverse, se relève et fonce de nouveau sur moi. Je me décale juste à temps et l'empoigne par les épaules. De toutes mes forces je le plaque contre un arbre.

« Écoute-moi bien sale enflure. Tu l'as détruite à tout jamais ! Tu auras sa mort sur la conscience. Moi, tu ne m'auras pas. Je ne te laisserai pas me faire encore du mal. C'est fini Eliott, je n'ai plus peur de toi. Avant tu pouvais me terroriser, avant tu pouvais avoir l'avantage sur nous. Maintenant tout est terminé. Tu me l'as enlevée, on sait tous les deux que c'est ta faute. Jamais je ne te pardonnerai, tu peux me faire confiance. Jamais je n'oublierai tout ce qu'on a injustement enduré à cause de tes conneries. Alors à partir d'aujourd'hui, entre nous deux c'est la guerre. Là c'est ton nez, demain ce sera ta jambe ! Que je ne te revoie pas t'approcher de sa tombe, de mes amis, ou de moi-même, sinon je te jure que tu m'auras au cul ! »

Les larmes ruissellent sur mon visage, je suis une furie enragée, hors de contrôle. Dans un dernier accès de colère, je le frappe dans l'estomac. Je relâche ensuite mon étreinte, Eliott tombe à genoux puis se relève. Il est sérieusement amoché. Il me jette un regard haineux style « on se reverra » en avançant de manière menaçante. Il jette soudainement un regard autour de lui puis s'empresse de s'éloigner. Si ses yeux étaient des couteaux je serais actuellement en charpie. Je sens alors toute l'adrénaline retomber. Je m'appuie contre l'arbre, me sentant soudain faible et minuscule. Mes jambes tremblent et flageolent. D'un revers de la main, j'essuie mes larmes de colère. Je regarde mes phalanges, elles sont littéralement écorchées à sang. Bon dieu ce que ça fait mal de détruire un faciès!

Je reprends calmement mes esprits, arrange rapidement mes cheveux et ma robe, puis entreprend de rejoindre le groupe. Dernière moi, quelqu'un m'observe et me suit, sans que je ne m'en aperçoive.

Love is a fool girlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant