《 Cher journal,
Aujourd'hui était le premier jour de cours. J'étais angoissée.Je savais pertinemment que j'arrivais trop tard, les groupes seraient déjà formés, et à cause de mon incapacité à aller vers les gens je me retrouverais seule et complètement paumée. Comble du bonheur, il y a eu un problème avec mon inscription et mon nom n'était indiqué sur aucune liste scolaire : en clair, je n'existais même pas.
Ainsi, je me vis assigner une classe bien après le début des cours, ayant passé la moitié de la matinée à errer dans l'école pour trouver une bonne âme prête à me prendre en charge.
Et donc, en plein milieu de la quatrième heure, la terminale cinq vit débarquer dans son cours à l'improviste une pauvre fille associale et complètement perdue.Lorsque je traversais le couloir, à la recherche de la salle 212, je vis que plusieurs classes donnaient cours avec la porte grande ouverte -sûrement à cause de la chaleur pesante et presque insupportable- et priai pour qu'il en soit ainsi pour la mienne également. Si il y a une chose que je déteste, c'est bien frapper à la porte d'un local occupé ! Je ne sais jamais si le professeur m'a entendue toquer, si il va simplement me crier oui à travers la cloison ou venir m'ouvrir lui-même, comme pour m'accueillir poliment en enfer.
Mais quelle ne fut pas ma déception d'arriver devant un porte bel et bien close au-dessus de laquelle brillait une plaque avec le malheureux numéro 212 ! Je suppose que c'était prévisible. Depuis ma naissance, la chance n'avait jamais été de mon côté...
Je frappai deux coups secs, et entendant la voix grave du professeur s'interrompre dans son monologue, je pris l'initiative de tourner fermement la poignée et m'élancer dans la classe. Mon angoisse se transforma presque en affolement lorsque je vis trente-deux paires d'yeux fixées sur moi.
- Bonjour, me dit le professeur en appuyant sur la première syllabe d'un air interrogateur, comme pour me demander indirectement la raison de ma présence.
Il était très grand, avec des boucles grisonnantes et une paire de petites lunettes rondes et squelettiques menaçant de tomber à chaque instant de l'arrête de son nez. Il avait l'air surpris.
- On m'a transférée dans cette classe, expliquai-je en essayant de stabiliser le tremblement de ma voix.
- Tu as un papier?
J'acquiesçai, tentant d'économiser ma salive au maximum, et lui plongeai dans les mains le modeste bout de papier signé par la direction approuvant mon intrusion imprévue dans cette classe. Il le parcourut des yeux, ajouta mon nom sur sa liste, puis me le rendit avec un léger sourire.
- Va t'installer, m'ordonna-t-il simplement.
Je balayai la classe du regard, à la recherche d'un siège libre, si possible au fond de la classe où je pourrais tranquillement me faire oublier. Tous les élèves me fixaient, discutant à voix basse, certains riant de façon très indiscrète. Quelques uns avaient l'air intéressés, me déshabillant du regard, tandis que d'autres dormaient carrément sur leur table. Je me sentais extrêmement mal à l'aise, j'avais l'impression de n'être qu'une vulgaire bête de foire.
Je repérai deux places libres, l'une à côté d'un jeune garçon à la peau couleur chocolat dont le visage était caché par de gros dreadlocks, qui semblait plongé dans la contemplation de sa copie et ne m'accorda même pas un regard, l'autre à côté d'une jeune fille vraiment belle qui me dévisageait d'un air arrogant.
Sans réfléchir, je m'installais à côté d'elle.- Bien, reprenons la leçon, annonça joyeusement le professeur, comme s'il venait de se réveiller d'un lourd séjour au pays des rêves.
Je crus comprendre que nous étions en cours d'histoire, et il semblait parler des migrations des italiens en fin du dix-neuvième siècle. En jettant un coup d'oeil vers ma voisine, je vis qu'elle suivait les paroles de l'instituteur dans un gros manuel à la reliure rouge, livre qu'apparemment je n'avais pas en ma possession.
- E-Est-ce que je peux... regarder avec toi? lui murmurai-je timidement.
En la voyant de près, elle était d'une beauté mature, presque superficielle. Ses longs cheveux bruns étaient un peu trop lisses pour que ce soit naturel, ses sourcils un peu trop épais et bien dessinés, sa bouche un peu trop rouge pour que ce soit la couleur habituelle de ses lèvres.
Elle ne me répondit pas, mais posa son livre entre nos bancs en indiquant la ligne des ses longs ongles parfaitement découpés et ornés de petits motifs exotiques.
Cependant, je n'arrivais pas à me concentrer ni sur le texte ni sur la lecture à voix haute du professeur -non pas que cela ne m'intéresse pas, bien au contraire, l'histoire est une de mes matières favorites- simplement ma curiosité à propos de cet environnement nouveau l'emporta sur mon intérêt pour la matière. Ma voisine, par exemple, semblait bien plus âgée que moi. Une redoublante?
Je remarquai qu'elle portait un petit haut blanc, dont le col montait jusqu'à la naissance de son cou, mais s'arrêtait au-dessus de son nombril, où brillait un piercing argenté.
Elle avait une silhouette magnifique, et sa petite poitrine épousait parfaitement son corps mince et musclé. Moi qui avais toujours trouvé les gros seins plus attirants que les petits, maudissant mon buste un peu trop plat, me voilà en train de sérieusement réviser mon avis !Le cours passa lentement, je ne cherchais pas vraiment à engager la conversation avec elle -Amy, de ce que j'ai pu comprendre- et elle non plus n'avait pas l'air très entreprenante.
Lorsque la sonnerie retentit, ce fut presque avec soulagement que je ramassai mes affaires et suivis le courant des élèves vers la sortie de la classe, non sans échapper aux regards curieux qui ne semblaient pas avoir totalement oublié ma présence. Il était midi, et nous avions une heure pour déjeûner. Moment de la journée pourtant convivial, que je passai néanmoins seule à une table isolée de la cour, dissimulée par l'ombre fraîche du bâtiment, à l'abri des regards. J'avais simplement été me chercher un sandwich et une boisson à la caféteria, et passai l'heure entière à manger en tapotant distraitement sur l'écran de mon portable. 》Yan fut interrompu dans sa lecture par l'irruption de sa petite amie dans la chambre. Elle sortait de la douche, portant simplement un petit peignoir blanc et peignant tranquillement ses longs cheveux blonds.
- Qu'est-ce que tu lis?
- Un carnet, une sorte de journal intime. Je l'ai trouvé dans une des armoires du lycée, entre les manuels scolaires !
- Étrange cachette pour un journal intime. Et qui est-ce qui l'a écrit?
- Une certaine Linam. Elle était en terminale dans notre lycée.
- Était? Il y a une date?
- 2010.
- Elle avait probablement dix-sept ans à l'époque...
- Elle doit en avoir vingt-deux aujourd'hui.
Amanda posa le peigne sur la coiffeuse et rejoignit son petit ami sur le lit, posant sa tête sur sa poitrine et le laissant jouer avec les mèches encore mouillées de ses cheveux d'or. Yan avait toujours été fasciné par la précieuse chevelure de la jeune fille, épaisse et scintillante, qui se démarquait beaucoup en Thaïlande. En effet, elle n'avait hérité de sa mère que les yeux, légèrement en amande, tandis que le côté américain de son père semblait omniprésent chez elle. Sa peau qui bronzait facilement, son rire d'une franchise épouvantable, sa façon d'aborder calmement n'importe quelle situation et son ouverture d'esprit émerveillaient Yan à chaque instant.
- C'est intéressant?
- Très.
- Pourquoi est-ce que tu le lis?
- Parce qu'elle écrit bien. Et que sa vie semble mouvementée.
- Peut-être n'avait-elle pas envie qu'un inconnu y ait accès.
- Dans ce cas elle n'avait qu'à pas le laisser trainer.
Amanda sourit, et incrusta ses iris noisette dans les yeux de son petit ami en lui disant tranquillement :
- Fais-moi la lecture, mon coeur.
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Unknown Love
RomanceYan, un jeune thailandais de dix-sept ans, trouve par hasard le journal intime d'une jeune fille prénomée Linam qui était élève dans son lycée cinq ans plus tôt. Et plus il se plonge dans la lecture de son carnet, plus il devient gourmand de l'écrit...