Style: C'est quoi le rythme (1/2)

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Je commence cette série en parlant de rythme, car c'est ce qui me saute tout de suite aux yeux dans une histoire. Par exemple, sur Wattpad, je vois souvent des idées géniales, mais le texte ressemble à un résumé, l'histoire va trop vite, on ne peut pas se plonger dedans. Par contre, dans certains livres, je ressens l'effet inverse. Je dois attendre des pages et des pages pour qu'il se passe quelque chose! Argh! Alors zut... c'est quoi un bon rythme? J'ai pas de réponse mais voilà les outils que j'ai glané sur le net à ce sujet :

Outil 1: L'échelle des narrations

Pour commencer, voici les différentes façon de raconter une histoire, les outils de base de l'écrivain (récupéré sur reddit). On peut les ranger selon une échelle:

Exposition : On reste loin de l'histoire comme dans un conte de fée et on dit ce qui se passe dans les grandes lignes. Ex. Les cinq années qui suivirent, le chat grandit, poussant de plus en plus loin ses explorations et se battant pour se tailler un territoire à coups de griffes.

Narration dramatique : Là, on rentre dans l'action. Ex. Son rival grondait. Le chat feula, les oreilles en arrière, le poil hérissé, prêt à bondir.

Dialogue : Ex. « Miaahhh ! »

Description des détails sensoriels : On décrit un peu plus dans le détail les sensations pour plonger le lecteur dans l'univers. Ex. La nuit était noire, la lune éclairait à peine le jardin. Le battement des ailes d'un oiseau et le sifflement du vent rompaient seuls le silence.

Flux de conscience : Là, on rentre carrément dans la tête du personnage! Ex. Le chat ne pouvait pardonner à son rival. Il avait marqué de son odeur tous les arbres du quartier, poussant l'outrage jusqu'à essayer de s'emparer de son jardin.

Pour varier le rythme de l'histoire, on va vers le haut et le bas de cette échelle. Par exemple, quand on lit un texte en "flux de conscience", un passage qui prend 5 minutes au lecteur à lire peut à peine couvrir 5 secondes de temps dans l'histoire. Avec l'exposition, où on survole les événements et où on explique au lieu de décrire, cela va très vite. On peut passer un paragraphe à reporter des événements qui, dans l'histoire, se déroulent sur des années. Lors d'une scène d'action, pour accélérer le rythme, il faut réduire au minimum les descriptions et les pensées du personnage et ne garder que celles qui sont indispensables pour faire avancer l'histoire. Et vice-versa, si on veut que le lecteur se pose un peu, on revient sur la description et le flux de pensées.

Outil 2 : La ponctuation du récit et le souffle

Dans un texte, la ponctuation est là pour nous faire respirer. J'ai lu qu'il faut faire attention à son souffle quand on écrit. Par exemple, relie-toi à haute voix. Cela te donnera une indication sur le rythme de tes phrases. Flaubert avait un gueuloir pour lancer à voix haute chacune des phrases qu'il écrivait et réécrivait sans relâche jusqu'à atteindre la perfection. Enfin... ^-^

En tout cas, le lecteur retient son souffle quand il lit une phrase, même si c'est dans sa tête ^^ La longueur des phrases a donc un impact sur le ressenti du rythme. Ainsi, pour donner une sensation artificielle de vitesse et de tension, on peut utiliser des phrases courtes. On peut aussi accélérer le rythme en cassant la structure des phrases : éliminer le verbe, jeter un mot comme on jette un cri.

Ex. « Le chien gagnait du terrain. Le chat accéléra. Son souffle si proche... Un arbre ! Vite, grimper ! »

Au contraire, pour ralentir le rythme, on peut utiliser des phrases et des paragraphes plus longs. On peut ajouter des détails sur des éléments non cruciaux, de l'introspection, interrompre l'action pour parler d'une scène qui se déroule en parallèle. On peut aussi s'amuser à juxtaposer les propositions relatives pour donner de la force à une idée.

Ex. « C'était un bien mauvais chat, qui arrachait les rideaux, qui les déchirait jusqu'à ce qu'il n'en reste que des miettes. »

Mais bon c'est pas très joli. Autre technique, mais dangereuse et à n'utiliser qu'en ultime recours pour ralentir le rythme : on peut développer une métaphore. Victor Hugo était un chef pour ça ! Par exemple, dans « 93 », il tartine trois pages sur une comparaison entre un canon qui glisse sur le pont d'un bateau et un taureau. J'ai aussi lu quelque part la technique d'un auteur pour ralentir ses récits. Il lisait de la poésie avant de se lancer dans l'écriture. Baah... c'est la meilleure façon de multiplier par trois mon travail en phase de relecture, alors pas pour moi ^^

Enfin, ça c'est mon avis perso, je pense qu'il ne faut jamais perdre de vue que seule l'histoire compte. Ajouter des métaphores filées dans une scène d'action peut allonger ton texte mais ça va diminuer la tension. Est-ce une bonne idée ?

Outil 3 : Montrer et évoquer

Règle d'or des américains : « Show, don't tell. » Montre, ne raconte pas !

Raconter, c'est utiliser l'exposition pour survoler une histoire dans un format court. Cela crée un style très doux comme un conte de fées.

Ex. « Le voyage du petit berger à travers la montagne du destin dura des jours et des nuits. Avançant contre le vent et la neige comme on se bat contre un démon fuyant, le garçon ne désespéra jamais et atteignit enfin le sommet de la montagne. Il s'engagea dans le tunnel sombre qui menait à l'antre du dragon. Quand il parvint dans la chambre secrète de la bête, il combattit avec l'épée que la fée des vents lui avait donnée. La magie des éléments était puissante et le dragon expira sous les coups de l'épée magique. »

On a l'impression d'être assis devant le feu, les yeux mi-clos pendant que la nourrice nous raconte une histoire. On voit vaguement passer une montagne et un dragon, visions poétiques mais lointaines et floues. A aucun moment, on ne lève la tête pour regarder le reptile dans les yeux, à aucun moment on ne sent l'odeur des chairs cramées des chevaliers que le dragon a brûlé avant nous. Notre cœur ne bat pas la chamade. C'est pourquoi raconter ne suffit pas, il faut rentrer dans le sensitif pour nous faire ressentir le monde comme si on y était puis nous faire entrer dans l'action. Il faut montrer.

Ex. « Ses doigts étaient glacés, piqués d'engelures, à peine capables de bouger. Autour de lui, le monde était blanc de flocons qui tombaient drus. Sa capuche en fourrure enfoncée sur sa tête, les yeux à demi fermés, il progressait pas après pas, haletant dans la pente abrupte et s'enfonçant jusqu'aux genoux dans la poudreuse. Les sifflements du vent glacé recouvraient tout. Une rafale le repoussa soudain en arrière avec la force d'un démon. Il tomba à la renverse et resta là, allongé dans la neige, les larmes coulant de ses yeux et gelant sur ses joues.
« Je n'y arriverais jamais » pensa-t-il dans un sanglot désespéré.
La vision de sa petite sœur maigre à faire peur, affamée par les ravages du dragon le saisit soudain. Le sanglot se fit ouragan de douleur dans son cœur. Il se releva, comme un jouet brisé mais il se releva. Il fallait continuer, la survie du royaume en dépendait.
»

Bon, pour le dragon on repassera car à ce rythme notre jeune héros n'est pas prêt d'arriver ^^ Ça prend beaucoup plus de lignes pour couvrir la même portion d'histoire, le rythme est plus lent mais l'impact émotionnel plus grand.

Tout est affaire de dosage, savoir ce qu'on doit montrer, ce qu'on doit juste raconter.

Enfin, suite au prochain épisode, je vais dormir moi et puis c'est assez long comme ça ;)

A suivre:

- trouver un équilibre

- doser le suspense

- raccrocher les différentes parties



Style, scénar et persos, j'apprends à écrireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant