Prologue

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« A mi me gusta te » tels étaient les derniers mots que j'avais écrits dans mon journal intime à son propos. « A mi » c'est moi, Mila Dimerson et « te » c'est lui, mon petit frère, Mathys, il est mort hier dans un attentat ainsi que mon père pendant que je prenais du bon temps à la plage. Il avait seulement quinze ans, il ne méritait pas cela, c'était un ange, si j'avais la chance de retrouver les auteurs de ces attentats je leur sauterais à la gorge et les égorgerais comme des cochons. Mon petit frère c'était tout pour moi, j'avais attendu deux ans avant sa naissance, je lui donnais le biberon, je lui chantais des chansons pour qu'il s'endorme, je le prenais dans mes bras pour le consoler lorsqu'il pleurait, c'était ma moitié, personne ne pourra jamais le remplacer. Maintenant à l'intérieur de moi il y a un gros vide, un trou, mon père et mon frère sont partis le même jour, ma mère et moi sommes anéanties, je me demande bien comment nous allons survivre à ça. Pour ma mère l'épreuve s'annonce bien pire, c'est son deuxième enfant qu'elle perd, j'avais un grand frère, je l'ai connu à peine deux ans, je n'ai aucun souvenir de lui, il est mort à six ans, en apprenant à faire du ski avec son moniteur. D'ailleurs j'ai beaucoup dû insister pour qu'elle me laisse faire du ski. Je suis donc à nouveau fille unique. Les enfants nés de familles nombreuses pensent que c'est un rêve d'être enfant unique mais moi c'est mon pire cauchemar.

Je m'avance vers la porte, pose ma main tremblante sur la poignée, laisse une larme couler, ouvre la porte et fais un pas dans la chambre de mon frère avant de me laisser tomber en pleurs au sol. Je revois toutes les scènes avec mon petit frère qui ont eues lieu dans cette chambre, du premier couché dans son berceau à la dernière bataille d'oreillers. Il n'aurait pas dû mourir, si j'avais su je l'aurais forcé à venir à la plage avec moi, ou alors je serais allée à sa place aider mon père. D'ailleurs vous devez sûrement vous demander pourquoi la mort de mon père ne me touche pas tant que ça. C'est évident qu'elle me touche moins que celle de Mathys car il était très peu à la maison, il était homme d'affaire et je le voyais vraiment peu, de toute ma vie j'ai dû passer maximum une semaine avec lui, il n'avait jamais le temps de s'arrêter de travailler et la il revenait à peine du travail, il avait décidé de « rattraper le temps perdu » mais maintenant c'est bien trop tard, il n'y a plus rien à rattraper, seulement des larmes à éponger.

Je sors de la voiture avec ma mère, je rentre dans le cimetière, regarde toutes ces personnes qui viennent tenter de nous consoler, je les laisse prendre ma mère dans leurs bras mais moi je les repousse et je continue mon chemin tout en pleurant. Je m'avance jusqu'à la tombe de mon frère et mon père. Je dépose une fleur dessus et m'assieds entre les deux cercueils, je mets ma tête contre celui de mon frère et laisse mes larmes couler.
Au loin je vois le président arriver, il est là pour rendre hommage aux victimes de l'attentat, mais personne ne peut comprendre notre chagrin, même pas le président et ce n'est pas ses condoléances qui vont nous remettre sur pied, qu'il parte d'ici ! Et vite ! Moi je ne veux pas du président ! Et de personne d'autre d'ailleurs ! Je veux être seule ! Je veux parler à mon frère comme s'il était toujours de ce monde, me remémorer à voix haute tous nos souvenirs et lui dire que jamais je ne l'oublierais, je veux dire à mon père que toutes ses absences sont pardonnées, qu'il aura toujours sa place de père dans mon cœur. Je veux crier pour exprimer ma douleur, faire sortir cette boule de mon ventre, pleurer jusqu'à vider mon corps de ses larmes.
Je me lèves sous le regard de tout le monde, donne un coup de pied à un pot de fleur et cours jusqu'à ne plus avoir de souffle, je m'allonge dans un champs, regarde le ciel puis ferme les yeux pour laisser les souvenirs former un film dans ma tête, mes larmes arrosant les brins de blés prêts à être moissonnés.

Without UsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant