-Prologue-

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Une nuit sans étoile, froide et perpétuelle était, depuis longtemps déjà, tombée sur le Parc. La lune, aussi rouge que le sang, éclairait de ses faibles rayons orangés le Royaume Enchanté. De ce lieu, d'où s'échappait habituellement une musique entrainante mêlée aux cris de joie des visiteurs, n'émanait maintenant plus qu'une ambiance malsaine entrecoupée de cris plaintifs et de hurlements à vous glacer le sang. L'odeur agressive du souffre emplissait l'atmosphère et achevait ce tableau infernal avec brio.

Toutefois, avec un peu de concentration, l'on pouvait entendre quelque chose de distinct. Un bruit comparable à nul autre dans cet enfer. Ce son régulier parvenait à nos oreilles. Les pas de course affolés de cette jeune fille qui remonte Main Street. Elle est terrorisée. Ses poumons sont en feu, elle tourne la tête et, voyant que personne ne la suit, continue sa rapide escapade. Déboussolée, alors qu'elle travaille dans ce parc depuis trois ans déjà, de grosses larmes coulent désormais sur ses joues encore jeunes et roses. La cause de son désespoir ? La grille du Parc, fermée, cadenassée, et sa fuite qui, soudainement, vient de prendre fin. La fragile Cast Member, affublée du costume victorien du Phantom Manor, s'agrippe aux barreaux humides de la grille et hurle pour qu'on lui ouvre.

Les pupilles de ses yeux  océans doublent de volume. Elle panique. Elle halète. « Cela » se rapproche. La jeune fille, percevant un infime craquement se retourne vivement. Appuyant son dos contre l'entrée verrouillée, elle scrute. Elle recherche, bougeant frénétiquement sa torche d'un coin à un autre. C'est ici ! Non c'est là ! Peut-être sur la fontaine devant elle ! Sa respiration est saccadé, les idées et les scénarios se bousculent dans sa tête. Le sang frappe dans ses tempes et un mal de tête aigüe pointe le bout de son nez.

- Qu'est-ce que vous me voulez ! Laissez-moi tranquille ! Au Secours ! Supplie la jeune Cast Member. Je n'ai rien fait de mal ! Pourquoi me faites-vous ça ! Je veux simplement rentrer chez moi !

Alors qu'elle balaie la zone de ses yeux toujours en mouvement un bruit attire son attention depuis la station de RailRoad. Le silence, qui depuis longtemps pèse sur le parc, est brisé par un rire d'enfant qui laisse notre frêle Cast Member pétrifiée de peur. Les haut-parleurs que l'obscurité dissimule, commencent à émettre des grésillements dont on peut comprendre une petite comptine jouée à l'envers. La Chose se rapproche... Elle le sait, elle le sent.

Des petits pas, comme ceux d'une centaine de souris s'avancent vers sa position. La vision de la jeune fille devient floue et son corps semble sur le point de lâcher prise quand douze coups se font entendre et raisonnent longuement dans l'ensemble du parc tel un funeste glas. S'en est trop. La jeune fille s'écroule au sol et un voile de nuit se pose sur son regard. Tu fais partie de ce monde...Tu fais partie de ce monde, répètent en écho des voix enfantines de plus en plus proches. Tu vas nous rejoindre...Tu fais partie de ce monde. La fragile Cast Member est étendue au sol devant la grille de Disneyland Paris.  Surplombée par le Disney Hotel qui semble être vide et délabré, la jeune fille est au paroxysme de l'épouvante. Une ambiance mortelle flotte dans l'atmosphère et l'odeur persistante du soufre polluant l'air le rend difficilement respirable. La jeune fille se recroqueville alors en position fœtale voulant se réveiller de cet affreux cauchemar...

Alors que les voix semblaient être à quelques mètres de sa position  celles-ci disparurent subitement, s'effaçant dans le silence. Et, de nul part, comme sortie du néant, une comptine se fit entendre. Malmené par le vent, le noeud de couleur rouge, qui attachait habituellement les cheveux de la Cast Member, s'envola et disparu derrière le sanglant éclat de la lune. Évanouie, tels furent les derniers mots qu'entendit la jeune fille cette nuit là :

« Fleurbageans, les rhododendroves,
Gyraient et gamblaient dans les wabes.
On frimait vers les pétuniove,
Et les momerhates engrabent »

 On frimait vers les pétuniove, Et les momerhates engrabent »

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Dark Side Of The MirrorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant