Chapitre 20: Vivre ou mourir

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Jamais je ne m'étais sentis aussi faible.
J'avais l'impression de ne servir à rien. On avait beau essayer de me convaincre le contraire, je n'y croyais pas totalement.
Tous les gens autour de moi semblaient me filer entre les doigts.
Qu'est-ce que je devais faire? Sombrer dans mes pensées, essayer de trouver le but de ma misérable vie?
C'est exactement ce que j'ai fait.
Depuis combien de temps j'étais assise là, d'ailleurs?
Deux jours? Deux semaines?
Je ne pourrais pas répondre.
Tous les jours se ressemblent. L'éclatant orangé du lever du soleil, le bleu vivifiant de la journée et les nuages d'une teinte rosée du coucher du soleil, pour ensuite laisser place aux ténèbres, aux ombres menaçantes qui s'approche subtilement pour nous engloutir dès que l'on ferme les yeux.
L'océan était si beau. La lumière dansait sur les vagues et semblait s'harmoniser parfaitement avec le bleu profond de l'eau. Elles semblaient bouger en rythme.
Le sable piquait mes mains, s'enfonçait sous mon poids. Il était si fin, si parfait.
Et ce feu, cette fameuse soirée.
Il était si grand, ce n'était pas un feu de camp, mais bien quelque chose qui prenait feu. Je pouvais le dire par le nombre de survivants qui s'affairaient à tenter de l'éteindre.
Quasiment tous les survivants aidaient pour l'arroser.
Bon, tout le monde sauf moi, en fait.
Je ne voulais pas aller aider. Je ne voulais pas que ce feu disparaisse, il m'apportait chaleur et réconfort, ce que je n'avais pas reçu depuis quelques temps. Mais rien ne dure éternellement, et le feu avait fini par s'éteindre, rendant ainsi la nuit aussi noir que l'encre.
Puis les journées recommençaient et recommençaient.
Je n'avais pas conscience des gens qui allaient et venaient autour de moi. Certains venaient s'asseoir avec moi, tentait de me parler, mais je m'écoutait pas. Je ne pouvais plus écouter.
Charlie n'était pas venu, et j'avais le pressentiment qu'il ne viendrait pas. Je crois qu'il est encore ébranlé par le fait qu'il ait tué quelqu'un.
J'avais l'impression d'être dans une bulle, bulle que moi seule je contrôlait. Toute personne tentant de la percer échouait.
Toutes, sauf une.
Bonne.
J'avais conscience de sa présence près de moi. Je percevais sa voix à travers mon mur personnel, mais ses mots étaient dénudés de sens.
Jusqu'à ce que j'entende le nom de Ryan.
C'était comme s'il venait de creuser un tunnel jusqu'à moi, il pouvait enfin m'atteindre. Ses paroles retrouvèrent leur sens.
Il disait que ce qui m'arrivait avec lui n'était pas ma faute.
Mais c'était la faute de qui, alors?
Mon regard vide toujours posé sur l'horizon, j'avais beau essayer de trouver un coupable, je ne voyais que l'évidence.
Moi.
Qu'est-ce que j'avais fait pour mériter de me faire rejeter de la sorte? Je l'avais blessé? Déçu? Trahi?
Puis Boone continuait, j'attendais qu'il me dise qui était responsable de tout ça. J'attendais qu'il prononce mon nom, même s'il venait de me dire le contraire.
Sa réponse me fit perdre l'esprit pendant un instant. Comme si le temps s'était figé et que j'essayais de comprendre pourquoi, pour quel raison.
C'était la faute de Ryan.
La faute de Ryan.
Cette réponse ne comportait aucune logique à mes yeux. Pourquoi voulait-il s'éloigner de moi? Apparement, c'était de sa faute, pas la mienne.
J'avais beau repenser, repenser et encore repenser au problème, je ne trouvais toujours pas de réponse.
Boone ne m'avait rien dit de plus. Je ne sais même pas s'il était conscient que je l'écoutait. Il était partit, déçu que je n'ai fait aucun geste pour le remercier.
Après tout, c'est lui qui a réussi à m'atteindre.
Je restais là à fixer l'horizon en essayant de trouver une raison à tout ça, tout ce qui arrive ici, sans toutefois en trouver une. Je ne mangeais presque plus, je n'avais pas faim, d'ailleurs. Je buvais de l'eau dans ma bouteille de temps en temps, et quand elle était finalement vide, au moment où j'allais en boire encore, elle s'était miraculeusement remplie.
Sûrement quelqu'un qui m'emmenait de l'eau chaque jour.
Cela faisait plusieurs jours que ça durait.
Enfin, je crois...
C'est justement en me posant la question: "Mais depuis combien de temps je suis assise ici?!" que je ressentis un besoin, le premier depuis longtemps.
Ce n'était pas un besoin naturel, c'était plus une envie, une force, un ordre.
J'avais le sentiment que je devais me rendre aux grottes le plus rapidement possible.
C'était comme si mon instinct me soufflait ce que je devais faire, et je ne pouvais m'en empêcher.
Tout mon corps me hurlait d'y aller, mais une petite voix dans ma tête m'en empêchait.
Elle me chuchotait de ne pas y aller, que les conséquences de cet acte allait être désastreuse.
Je connaissais cette voix. C'était une voix masculine, mais je n'arrivais pas à l'identifier.
Comme si les connexions de mon cerveau s'étaient effacées, ne laissant qu'un vide que personne ne pouvait combler.
Malgré la petite voix qui m'intriguait au plus haut point, mon instinct prit le dessus et mon corps se leva du sable de lui-même.
Je m'étira pendant un moment. Je ne m'étais pas levée depuis longtemps, je crois, et mon corps en subissait les conséquences. C'est avec les jambes endolories et sans pleine conscience de mes actes que je me dirigea vers les grottes.

LOST: Perdus à jamaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant