Les Élémentaires

I

- Iris, dépêche toi! Carter et Alex sont déjà là.

Je finissais d'appliquer mon baume à lèvres et attrapa mon sac. Je fis un bref signe de main à Calliope et sortit sous les Klaxons de mon ami. Je pris place derrière Carter qui se tourna vers moi alors qu'Alex démarrait.

- On va encore être en retard à cause de toi, tu nous offres quoi en guise de pardon?

Je lui montrais mon majeur accompagné d'un sourire forcé alors qu'il se replaçait correctement, fier de sa remarque. Ne vous fiez pas aux apparences, Carter est un de mes meilleurs amis. Tout comme Alex. On se connaît depuis toujours, on a grandi ensemble.

- Sinon, t'es au courant pour la soirée de demain soir? me demanda Alex.

- Evidemment, je te rappelle qu'Alice est dans ma classe.

- Je sais, mais comme t'as pas confirmé ta présence on pensait que tu nous lâcherais.

- Jamais.

Le reste du trajet jusqu'au lycée se fit dans le calme. Lorsqu'on arriva, tous les regards se tournèrent vers nous. On s'y était habitué depuis le temps, mais parfois c'était pesant. Nous n'étions populaires que malgré nous. Les gens n'étaient intéressés que par notre histoire, histoire plutôt originale je vous l'accorde. Nous nous étions rencontrés à l'orphelinat. Tous trois abandonnés aux portes de l'Eglise Saint-Joseph de Los Angeles à quelques mois d'intervalles. Alex était le plus vieux de nous trois et Carter le plus jeune. Cette enfance plus que tumultueuse nous avait rapproché et nous étions devenus inséparables. Alex et Carter avait réussi à être adopté par la même famille, s'étant fait passé pour des frères les parents avaient craqué et avaient décidé de ne pas les séparer. J'avais été adoptée deux mois plus tard par Calliope, une avocate très peu renommée qui n'arrivait pas à payer les factures. Je m'étais toujours demandé pourquoi elle avait demandé la garde d'un enfant, alors qu'elle ne parvenait pas à subvenir à ses propres besoins. Mais elle avait enfin répondu à mes questions. Et la vérité m'avait donné des sueurs froides. Nous nous étions beaucoup rapproché grâce à cela et j'avais accepté ma « condition ».

Je pris mes affaires de français et rejoignis ma classe composée d'une vingtaine d'abrutis que je ne pouvais pas m'encadrer. Je pris place au fond et augmenta le son de ma musique avant que le professeur n'arrive. Je gribouillais dans mon carnet, secouant la tête au rythme de ma musique. Je faisais encore et toujours ce même dessin ressemblant à une sorte de symbole que je n'avais trouvé nul part sur Internet. Je comptais en parler à Calliope, mais je ne trouvais jamais le temps. J'interrompis ce que je faisais et coupais ma musique quand je vis Mr Haubort rentrer dans la salle. Toutes les places étaient prises à part, bien évidemment, la chaise à côté de moi. Cela ne me gênait pas plus que ça.

- Bonjour chers élèves, aujourd'hui nous allons parler de la place qu'a la France dans l'Union européenne.

Je perdis instantanément toute concentration et commença à divaguer. Je m'étais toujours demandée pourquoi je n'arrivais pas à m'adapter à cet environnement banal. Carter avait toujours été le plus sociable et avenant de nous trois, Alex était le plus intelligent et le plus calme et moi j'étais l'inaccessible, celle au caractère indomptable que personne n'osait contrarier. J'étais le vilain petit canard finalement, dans tous les sens du terme. Pourtant, je n'avais pas le physique qui collait à la personnalité. J'étais assez grande, mes cheveux étaient courts, bruns et épais, mes yeux étaient noisettes et viraient au noir lors de mes crises de colère et j'avais une corpulence normale. J'étais tout ce qu'il y avait de plus banal et malgré tout, les gens me donnaient une certaine importance. C'était sûrement du à mon lien avec les deux garçons que toutes les filles s'arrachaient. Alex et Carter avaient toujours eu cet effet d'attraction auprès de la gente féminine. Et pourtant, ils étaient autant différents sur le plan physique que sur leur caractère. Alex était blond aux yeux bleus alors que Carter avait des cheveux noirs et des yeux de la même couleur. En repensant à leur physique plus qu'opposé, je me demandais comment ils avaient réussi à se faire passer pour des frères. Cette pensée m'arracha un sourire alors que le cours se terminait. En regardant mon emploi du temps, je m'aperçus que j'avais une heure de creux. Je me décidai à sortir du lycée afin d'attendre que les garçons sortent à la pause du midi. Je m'assis sur un des murets et recommença à griffonner mon dessin.