Chapitre 35 : Mort

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Edouard Lemonnier : Tu n'as pas réussi à la joindre ?
Victor : Non, j'ai du mal. Je veux la laisser vivre, mais elle n'est pas du genre à nous laisser sans nouvelles...
Edouard Lemonnier : Je ne peux pas repartir sans savoir comment elle va.
Victor : Et Théo ? Les parents de ses amis sont bien gentils, mais...
Edouard Lemonnier : Je l'ai laissé avec Maître Aubert.
Victor : Tu as fait ça ?!
Edouard Lemonnier : Je n'avais pas le choix. Théo voulait rester avec moi, j'ai voulu lui éviter l'ambiance du Palais, ça lui aurait rappelé de mauvais souvenirs. Tu sais qu'il a demandé à voir la juge Nevers ?

Colas : Pourquoi tu ne me l'as pas dit ?
Léa : Qu'est-ce que ça change ?
Colas : Au moins je comprends pourquoi vous vous lancez ces regards.
Léa : Fred et moi c'était une parenthèse. Je suis allée vers lui mais je savais qu'il n'était pas "seul".
Colas : Mais ce n'est un secret pour personne que la juge et lui...
Léa : Ils ne sont pas officiellement ensemble.
Colas : Pas faux.
Léa : Bon, c'est fini ta crise de jalousie ?
Colas : Mais je ne suis pas...
Sans lui laisser le temps de finir, elle s'approche sans réelle pudeur et appose ses lèvres sur les siennes.

Florence quitte le Palais avec des écouteurs dans les oreilles : en quelques jours, elle a perdu une fidèle amie, partie s'installer à Londres, et une connaissance précieuse, un lieutenant important, un ami de longue date, et un amant...
  Les mains dans les poches, elle arrive à la Brigade pour retrouver le commandant Marquand, à qui elle a des informations à transmettre. Elle passe sa tête dans plusieurs bureaux et en profite pour saluer ses collègues. Florence ouvre la porte close d'un bureau, l'inscription sur la porte l'intrigue.
Sans plus chercher à retrouver le commandant Marquand, elle quitte la Brigade les larmes aux yeux. Lemonnier l'interpelle par l'épaule, la conduit vers le café le plus près et sèche ses chaudes larmes.
Édouard Lemonnier : Alors... Qu'est-ce que c'est que ce gros chagrin ?
Le sourire démuni de Florence l'informe sur ses doutes : la juge est sensible et émotive, première nouvelle !
Florence : Je ne veux pas en parler Lemonnier, j'ai honte...
Édouard Lemonnier : Je ne vais pas vous forcer, je ne suis pas là pour ça, vous me connaissez. Mais sachez que si les murs ont des oreilles, les greffiers en ont aussi ! Notre travail est de prendre des dépositions, mais aussi d'avoir une oreille attentive, pour être au parfum. Alors je sais bien des choses, et j'aimerais que vous me fassiez confiance. J'ai senti lors de notre dernière rencontre que vous étiez à l'aise pour me parler : c'était le témoignage de notre amitié, j'ai pris mon rôle d'ami très à coeur.
Elle se blottit contre lui, enlève son bonnet bleu et se débarrasse de ses gants. Ses mains sont tremblantes, elle a froid mais est surtout fragilisée par sa récente découverte.

Colas l'a vue entrer. Il l'a vue s'enfuir, aussi. Il a des remords, mais ne sait plus pour qui son cœur bat. Léa le rend heureux, ils se croisent et se sourient, est-ce une amourette ? Une fois leur moment terminé, Léa s'approche de la porte et presse la poignée. Il aurait besoin d'elle encore longtemps, pour lui parler, pour que leur relation prenne de vraies proportions...
Colas : Attends !
Léa : J'ai du boulot.
Sa douce voix l'emmène si loin qu'il tarde à répondre. La convaincre de rester est bien difficile.
Colas : Il faut qu'on parle, non ?
Léa : De quoi ?
Colas : Toi et moi...ce n'est pas rien ?
Léa : Pourquoi tu me demandes ça ?
Colas : T'es bien une flic, toi !
Léa : Quoi ?
Colas : Tu ne réponds jamais à mes questions.
Léa : Qu'est-ce que tu veux savoir ? Oui, je t'aime, et oui, tu me plais. Oui, j'espère que ça durera... C'est tout ?
Un bisou d'au-revoir et elle s'engage dans une course contre la montre pour arriver à l'heure à son rendez-vous.

[Conversation par messages]
Florence : Excuse-moi, je n'ai pas pu faire ce que tu m'as demandé... Alice, pourquoi tu n'appelles pas Marquand ? Ce serait plus simple, et puis, il serait tellement heureux !
Alice : C'est plus compliqué que ça, crois-moi, je sais ce que je fais.
Florence : Tu ne m'en veux pas de ne pas lui avoir transmis ton message ?
Alice : Non, et puis, tu es la seule à qui je puisse parler. Tu n'as rien dit ni à Victor ni à Édouard ?
Florence : J'ai tenu bon. Les Lemonnier me donnent du fil à retordre ! Quand mon ancien greffier m'a consolée, j'aurais pu lui dire tout ce que j'avais sur le coeur, mais tu es mon amie et je ne peux pas te trahir.
Alice : Je t'en remercie. Je conçois que cela soit difficile pour toi de taire les nouvelles que je t'annonce.
Florence : Et ton retour ? Tu m'en avais parlé au téléphone, mais depuis, je n'ai plus de nouvelles.
Alice : J'y réfléchis encore, ça devrait se faire bientôt. N'en parle surtout pas au commandant, d'accord ?
Florence : Tu me connais.
Alice : Merci. Et pourquoi Lemonnier t'a consolée ? Que s'est-il passé ?
Florence : C'est compliqué. Je t'en parlerai quand tu reviendras.
Alice : J'attendrai.
Florence : Et pour Marquand... Je suis face à un dilemme. Il m'a dit la semaine dernière, quand il est venu et parce que c'est bien dur de le croiser ici (il ne vient jamais), qu'il prendrait un billet pour te rejoindre. Il était très sérieux et je n'ai pas eu le temps de lui faire entendre raison.
Alice : Quoi qu'il arrive, garde tout cela pour toi... J'hésitais à l'appeler, je ne tiens plus, c'est abominable... Je l'appellerai demain, c'est un supplice et j'enfreins les règles que je m'étais fixées mais...
Florence : ...tu l'aimes ! Bonne soirée et bonjour à Paul !
Alice : Je t'adore. À bientôt.
[FIN]

Inquiet pour son supérieur, le lieutenant rend visite au commandant, qui a fini par hiberner totalement. Face à une porte antipathique de par sa couleur verdâtre, Antoine fait la moue, il a peur de déranger.
Antoine : Vous êtes là ?
Marquand a pris l'habitude d'ouvrir sa porte dans les secondes qui suivent la sonnerie, il s'attend chaque fois à ce que ce soit Alice. Mais c'est Antoine, et sa tension redescend à grande allure quand il le constate.
Fred : Entre. J'ai rien à te proposer, désolé.
Antoine : Vous n'avez pas à manger ?
Fred : Je dois avoir une pomme.
Antoine : Je parlais pour vous, il faut que vous mangiez...
Fred : T'inquiète pas, va. C'est gentil d'être venu me voir.
Antoine : Vous avez perdu du poids. Et votre maison... Vous ne rangez plus ! Je ne peux pas vous laisser comme ça, en tant que collègue mais aussi en tant qu'ami.
Fred : Je suis très bien comme ça. J'ai déjà eu droit à une leçon de morale de ma fille donc si tu peux éviter...
Antoine : Je ne vais pas vous déranger plus longtemps. Appelez-moi si vous avez besoin de quelque chose.
Fred : Je n'y manquerai pas.

Fred est déçu de devoir inquiéter tout son entourage. Ce n'est pas pour lui qu'il faut s'inquiéter, il tiendra jusqu'au bout, mais c'est Alice qui est exposée au danger, seule avec Paul. Sur qui peut-elle tomber ? Et comment Paul vit ce voyage ? En se posant toutes ces questions, il se souvient qu'il a encore la clé de l'appartement d'Alice...
Il s'y rend et, jusque tard dans la nuit, s'imprègne de tous les bons souvenirs. Installé sur le canapé du salon, il balaye l'appartement du regard.
Les escaliers, qu'Alice monte après que Paul ait fui vers sa chambre...
La porte d'entrée, par laquelle il arrivait pour consoler Alice, qui l'appelait alors que les étoiles brillaient dans un ciel assombri, des larmes ruisselant sur ses joues...
Ce canapé, où il devine qu'Alice a fait ses séances d'hypnose. Il regarde alors d'autres endroits. Où Chahine s'est installé ? Est-ce qu'il a été là où Marquand est assis en ce moment ? Le chirurgien est chassé de ses pensées et Fred se console avec l'idée que Mathieu n'ait jamais pénétré dans l'appartement.
Laissant traîner sa lourde main sur les pages de livres lus par Alice...
Il monte à l'étage. La chambre de Paul est ordonnée, il en est étonné. Des peluches qui font la taille de la paume de sa main envahissent le petit lit où dort le fils d'Alice. Sur les murs figurent des dessins. Il fait demi-tour, de peur de salir l'Univers innocent de Paul.
La chambre d'Alice n'est plus la même sans elle. Il n'a pas le droit de venir chez elle alors qu'Alice n'est pas là, mais il s'en rend compte trop tard. Et puis, ç'a été sa maison, aussi...
Dans le tiroir de la table de nuit, il trouve une feuille pliée en quatre. Il referme le tiroir et fait le tour du lit. Dans l'autre tiroir de la table de nuit qui se trouve de l'autre côté du lit, il trouve un carnet qu'il reconnaît bien vite. Tout cela appartient à Alice. Il referme la porte de la maison, plein de nostalgie, alors qu'Antoine éteint son ordinateur. Le lieutenant a géo localisé le portable de son commandant, il le surveille chaque soir pour vérifier qu'il ne se mette pas en danger...

Alice Nevers, juge d'instructionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant