Dead Land

V - Vivre en société

Cinquième épisode
« Vivre en société »

Deanna m'a l'air gentille. Pourtant, c'est plus fort que moi : je reste fermée comme une huitre. Il y a beaucoup trop d'inconnus ici. Je déteste ça. Ils me regardent tous un peu de loin comme si j'étais une curieuse créature potentiellement dangereuse.Ils ne pourraient pas regarder ailleurs ? C'est trop demandé ?

Deanna vient de me souhaiter la bienvenue et je n'ai toujours rien dit. Mon cerveau bouillonne. Aller je dois dire un truc...

- Merci.

Ma voix aurait pu être un peu plus communicative, mais pour l'instant ça semble suffire. Elle me demande de la suivre puisqu'elle a soi-disant une sorte d'entrevue à me faire passer.

Je hais les entrevues. Je les détestais même quand j'étais obligée de les suivre pour me trouver un job avant. Devant mon air sans doute pas très emballé, elle ajoute, patiente :

- Ne t'en fais pas, nous ne ferons que discuter.

Je la suis un peu à contrecœur et Vita trottine derrière moi. Alors que tout le monde lui lance des regards plus ou moins réprobateurs, Deanna, elle, se retourne et lui offre un sourire brillant :

- Tien ? Tu veux venir avec nous ?

Vita la regarde et secoue la queue, bien contente qu'on lui donne un peu d'attention et la femme ajoute :

- C'est d'accord. Vous passerez l'entrevue ensemble.

Je trouve ça un peu bizarre, mais je la suis sans relever ce qu'elle vient de faire. Je suis bien mal placé pour juger les gens qui s'adressent à des chiens comme s'ils étaient humains...Nous entrons dans sa maison. Elle est vaste et bien entretenue, ce qui jure avec toutes celles à l'extérieur de l'enceinte. Nous prenons place dans le salon et ma chienne, toujours aussi curieuse, se balade au travers de la pièce en foutant sa truffe un peu partout. Je l'observe rouler gaiement sur un tapis alors que Deanna prend la parole. Est-elle en train de programmer... Une caméra ?

- Tu es d'accord si je filme l'entrevue ?

Je la regarde d'un œil septique. D'accord, je me demande pourquoi elle tient tant à filmer cet entretien, mais ce qui m'agace surtout c'est...

- Elle fonctionne ?

Ma voix trahit mon incrédulité. Elle me sourit.

- Oui. Nous avons l'électricité et l'eau courante, me précise-t-elle.

J'écarquille les yeux. Qu'est-ce que c'est que cet endroit ?! Elle émet un gloussement devant mon air interloqué.

- Alors ? Redemande-t-elle, ça te va ?

Je suis un peu prise au dépourvu par les nouvelles informations.

- Heu... Oui c'est bon.

Sitôt dit, je la vois appuyer sur un bouton et venir s'asseoir sur un canapé en avant de moi.

- Alors Kenna, entreprend-elle, dis-moi quel est ton nom entier ?

Je prends une seconde pour me demander ce que je dois répondre. Est-ce vraiment nécessaire ? Est-ce que j'ai une minime chance de me convaincre de tout faire pour rester dans un endroit pareil ? Je jette un regard à l'extérieur. J'y vois quelqu'un promener son chien. C'est un enfant. Je regarde le sol quelques secondes. Il y a beaucoup de monde ici. Je n'ai jamais vraiment apprécié vivre en société, mais...

- Kenna Woods, répondis-je finalement.

La mairesse qui jusque là m'avait laissé tout le loisir de réfléchir, enchaîne :