Le calme avant la tempête

349 24 5
                                    


Vendredi 15 mai

Ces derniers jours ont été parfaits. Pas la moindre ombre au tableau. Je n'osais plus l'espérer. Juste elle, moi et notre quotidien de couple installé. Chaque matin, nous partons pour le travail, je la serre dans mes bras pendant tout le trajet, puis nous nous mettons au boulot. Elle apprend incroyablement vite, elle s'intéresse à tout et j'ai vraiment beaucoup de plaisir à partager mon univers professionnel avec elle.

Elle instaure une légère distance entre nous, au bureau, distance que je franchis parfois pour lui voler un baiser, lorsque nous sommes un peu seuls. Mais je n'en abuse pas. Je sais qu'elle préfère que l'on ignore que nous sommes un couple, alors je respecte son choix, pour le moment.

Je ne suis pas un homme de compromis, je découvre la manœuvre. Accepter de transiger, c'est perdre un peu du contrôle qui m'est tellement nécessaire. Pourtant, avec elle, il est sérieusement mis à l'épreuve.

De son côté, elle n'est pas non plus un modèle de maîtrise de soi. Annabelle est un être à vif, oscillant sous les forces, parfois contraires, des éléments. Elle fait de son mieux pour stabiliser son humeur, je le sais. Mais elle reste fragile, psychologiquement parlant. Elle a une piètre image d'elle-même, et je travaille énormément sur cet aspect afin de la mettre en valeur, tant au niveau professionnel qu'au niveau personnel. Elle doute et doit être régulièrement rassurée sur les sentiments que j'éprouve pour elle, mais aussi sur l'image que j'ai d'elle.

Chaque soir, nous nous couchons, dans mon lit, ce lit que j'avais pourtant juré de ne jamais partager avec personne. Chaque soir, je la caresse, embrasse sa peau, lèche ses plaies, apprivoisant doucement son corps qu'elle m'abandonne avec de plus en plus de confiance, et chaque soir, je réclame d'elle la pareille, ce qui est un peu plus compliqué.

Mon corps est l'ennemi, j'en ai bien conscience. Je ne veux pas l'obliger à l'aimer, je veux que cela vienne d'elle, alors je la laisse faire à son rythme. Je n'impose rien, je suggère. Je ne réclame pas, je guide. Chacun de ses pas dans ma direction est un enchantement, et je fais en sorte qu'elle ne fasse jamais marche arrière. Ses mains, tout d'abord timidement posées sur mes hanches, prêtes à prendre la fuite au premier frémissement, ont fait des progrès.

Allongée sur le ventre, près de moi, elle parcourt désormais mon torse, mon ventre, du bout de ses doigts. Un temps observatrice, elle m'a prouvé, hier soir, qu'elle pouvait également me toucher pour me donner du plaisir. Du plat de la main, elle a caressé mon ventre, tandis que ses lèvres s'aventuraient sur mes mamelons, les léchant l'un après l'autre, en guettant mes réactions. Je ne lui ai bien entendu rien caché des sensations qu'elle me procurait, lui exprimant mon bien-être, l'en remerciant et l'encourageant à poursuivre. Lorsque le dragon s'est réveillé et qu'elle a eu un mouvement de retrait, je l'ai doucement rassurée et l'ai engagée à continuer, sans lui prêter attention.

Elle n'a pas pu s'empêcher de le guetter, comme s'il avait une vie propre et risquait à tout moment de l'entraîner dans le fond du lit. Je la trouve cocasse, même si je ne le montre pas. Elle pourrait s'en vexer et ce n'est pas ce que je veux. J'imagine qu'elle se demande à quoi il ressemble, s'il lui rappellera les LEURS, s'ils sont similaires. Je n'ai pas la moindre maîtrise sur ce sujet. Pas moyen de changer de modèle. Je n'en ai qu'un et il va devoir faire l'affaire. Nous serons fixés ce week-end.

J'ai en effet prévu un petit séjour en amoureux, à l'abri du monde extérieur. J'ai loué une jolie maison, nichée à flanc de montagne, au pied d'une source chaude. Je suis déterminé à profiter de ces eaux accueillantes pour l'aider à se détendre et à assimiler la nudité, notre nudité à tous les deux. Je n'ai pas d'intention triviale, je veux juste tenter de lui faire accepter mon corps, dans sa totalité, ennemi compris. Dompter ses peurs prendra du temps, j'en ai conscience mais, même si je ne veux pas la brusquer, je ne souhaite pas non plus la laisser s'installer dans ses peurs.

Si nous voulons devenir un couple comme tous les autres, je vais devoir la convaincre, doucement, que je n'ai rien à voir avec les monstres de ses cauchemars, que tous les hommes ne sont pas des animaux et que le sexe peut être une source de plaisir intense. Vaste programme ! Pourvu qu'il ne nécessite pas des années d'études...

Il est midi passé, elle observe une série de schémas qu'elle va devoir scanner et mettre en page pour une présentation prévue ce lundi. Ils sont posés sur une petite table, à deux mètres à peine de mon bureau. Elle réfléchit à la meilleure façon de les présenter de manière claire et ludique. Ses sourcils froncés, mordillant sa lèvre inférieure, elle est l'incarnation parfaite de la concentration, mais aussi de la tentation.

Légèrement penché en avant, son corps parfait, moulé dans une robe bleu électrique, s'arrêtant au-dessus du genou, réveille en moi des instincts primaires. Lentement, je quitte mon bureau et m'approche d'elle. Du coin de l'œil, elle me voit arriver, mais ne bouge pas. Je viens me positionner juste derrière elle et dépose un baiser délicat dans son cou.

— Je ne peux pas me concentrer, si tu fais ça, dit-elle.

— C'est l'heure de déjeuner, mon ange, et j'ai bien l'intention de t'emmener dans ce petit restaurant thaï dont tu m'as parlé hier.

— Pas aujourd'hui, Greg. Tu sais bien que certains de tes collaborateurs y organisent justement une petite sauterie pour le départ de je ne sais plus qui, d'ailleurs. Nous ne pouvons décemment pas nous y présenter ensemble.

— Et pourquoi cela, Mme Delcourt ?

— Je ne suis pas ta femme, Greg.

— Mais tu vas le devenir, fais-moi confiance, je ne renonce jamais.

— Greg, je pensais que nous avions réglé la question...

— Toi, tu as réglé la question. Pas moi.

Elle ne me connaît pas encore très bien, à ce que je vois. Même si je comprends ses réserves, même si j'ai remis mon projet à plus tard, je l'ai toujours en tête et je saurai le mener à bien.

— Tu es vraiment infernal quand tu veux !

— N'est-ce pas une des choses qui te séduisent chez moi ?

Je poursuis mes caresses, tandis que nous nous chamaillons gentiment. Mon nez court le long de sa jugulaire tandis que mes lèvres baisent sa clavicule.

— Peut-être, dit-elle dans un soupir.

C'est le bon moment pour passer à l'attaque.

— Alors, l'affaire est réglée, prends ton sac, nous allons déjeuner. Au diable les ragots, je me fiche que l'on sache que je t'aime, j'aurais même plutôt envie de le crier sur la place publique. Donc... nous allons déjeuner thaï !

Et tandis que je saisis sa main et l'entraîne vers les ascenseurs, je songe au week-end surprise qui nous attend, dans quelques heures, et au jet qui patiente déjà sur le tarmac.

Je m'appelle Greg, et même si j'aime follement cette femme, je ne la laisserai pas me mener par le bout du nez... du moins pas à chaque fois.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Feb 28, 2016 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Diary of Rebirth Tome 2 : ChérirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant