Chapitre quatre

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-Nous voilà enfin rentrés ! Il faut chaud dehors, je commençais à suer comme un bœuf.

Je souris du manque de grâce de TaeHyun qui s'allongea de tout son long sur le lit. En position étoile, les yeux fermés, il semblait jouir d'une certaine tranquillité. Comme baissant sa garde le temps d'un instant. Je décidai alors de lui faire une blague. Je partis mine de rien dans la salle de bain et remplis un verre d'eau pour m'approcher de lui tout doucement.

-Tu me renverses le verre d'eau et je te fais la misère.

-Maiiis ! Comment t'as su ?

-Je sais distinguer entre une personne qui passe "mine de rien" et une personne qui vraiment passe comme si de rien n'était. Il y a une grosse différence ente ces deux comportements.

-Apprends-moi, alors.

-Si c'est pour m'avoir la prochaine fois, non merci !

-Allez !

-Bon, d'accord.

Il prit le verre d'eau de mes mains et le but d'une traite (laissant couler au passage un peu d'eau sur le coin de sa bouche, lui donnant un air sexy quand il essuya le liquide avec le bout de son pouce). Il me fit asseoir au bord du lit et écarta ses bras, l'air de dire "attention les yeux".

-Voici ta démarche.

Il se mit à marcher comme je le faisais. Il avait un très bon sens de l'orientation.

-Voici la démarche que tu viens de me faire.

La démarche ne me semblait pas si différente que cela. J'haussai les épaules et l'interrogeai du regard.

-Tu amorces ta démarche par le pied gauche, non par le pied droit. En entendant le pied droit, qui étais le plus proche de moi, je compris que quelque chose d'anormal se passait.

Il posa ses poings sur ses hanches et me regarda avec un petit sourire fier sur le visage, la tête penchée sur le côté. J'étais bouche-bée.

-Est-ce que tu sais anticiper les mouvements aussi ? Genre, comme si tu lisais dans les pensées des gens ?

-Hmm... un peu, oui. Ça dépend dans quelle situation.

-C'est-à-dire ?

-Dans une situation de combat, oui, j'anticipe les attaques et prépare donc ma défense. Dans la vie courante, étant toujours sur mes gardes et ayant un très bon sens de l'observation sans me vanter, je sais à peu près ce qui va se passer dans les secondes à venir autour de moi. Imaginons.

Il prit une bouteille dans le mini-réfrigérateur et se mit droit comme un piquet.

-Nous avons un serveur. D'accord ?

J'hochai la tête.

-Là-bas, dans la salle de bain par exemple, c'est la cuisine du restaurant. Qu'est-ce qu'il peut faire ?

-Rejoindre la cuisine.

-Ou ?

-Servir un client ?

-Ou ?

-Heu... heu... se casser la gueule ?

Il pouffa de rire et releva la tête.

-Entre autre, oui. Mais moi, je vais plutôt anticiper le fait qu'il n'est qu'un espion et cela va se voir à sa démarche. Quand il va servir un client il joue le rôle d'un serveur. Quand il va déambuler dans le restaurant, il joue le rôle d'un espion. Et ses gestes ne seront pas les mêmes. Toi, tu ne verras que les actions. Moi, je ne verrais que le langage corporel.

J'étais bouche-bée. Impressionnant ! Il ouvrit la bouteille qui était une bouteille de bière et s'assit à côté de moi.

-Ça fait combien de temps que tu es espion ?

-Deux ans. J'adore mon métier. Je me rappelle que tu m'as dit que ça faisait une semaine que je te surveille. Mais ça fait bien plus.

-Combien de temps ?

Il releva la tête vers moi.

-Trois mois.

J'écarquillai les yeux.

-Trois mois que je surveille une fille qui travaille dans une boulangerie, qui va danser au parc le samedi et qui va au club de danse le mardi soir. Sans oublier de faire les courses le jeudi et aller deux fois par mois à la piscine.

Je rigolai. C'était assez amusant de se croire dans un film, étant une cible surveillée et protégée.

-J'ai vu des choses que tu n'as pas vu autour de toi.

-Comme quoi ?

-Tu te souviens avoir perdu ton collier ? Tu l'as oublié à la piscine.

-Ah oui. Tu as vu qu'il n'était plus sur moi ?

Il se leva en me donnant sa bouteille de bière et partit fouiller dans sa valise. Il en sortit un bijou, un collier plus précisément. J'eus alors les larmes aux yeux, contente de le retrouver.

-Tu avais l'air très attachée à ce collier. Car je t'ai vu revenir à la piscine mais je ne pouvais pas te le donner, sinon tu allais me connaître. Et je ne pouvais pas non plus le glisser dans ta boîte aux lettres au risque de me faire voir. Alors, j'en profite pour te le donner maintenant.

Il monta sur le lit, se glissant derrière moi et accrocha lui-même mon collier à mon cou.

-C'est un héritage familial.

-Il a donc une valeur sentimental. Ça s'est vu sur ton visage, à mesure que tes larmes roulaient sur tes joues rosies par le froid alors que tu avais encore tes cheveux mouillées. Tu as même attrapé un rhume le lendemain et es allée chez le médecin deux jours après. Tu es ensuite allée à la pharmacie prendre ton ordonnance et j'ai deviné que tu ne travaillerais pas les jours suivants, restant chez toi pour te reposer. Sage décision, toi qui veux toujours en faire plus.

-Comment as-tu deviné mes traits de personnalité ?

-On devine la personnalité de quelqu'un en examinant ses gestes, ses passions, ses occupations. On dresse un portrait puis, au fil de nos observations, on confirme nos hypothèses.

-Donne-moi un exemple.

TaeHyun était toujours derrière moi, assis en tailleur. Je lui avais redonné sa bouteille, qu'il but un peu avant de reprendre la parole.

-Tu ne fréquentes aucun garçon. Quand tu en vois un, tu rougis et baisse la tête. Tu donnes l'air timide alors que tu es plutôt extravertie. C'est simplement parce que tu n'as pas l'habitude de côtoyer la gente masculine et que tu n'as certainement jamais eu de petit ami.

Je détournai les yeux, ce qui le fit sourire. Je l'avais deviné car il avait soupiré d'amusement. Il passa sa main dans mes cheveux puis se leva.

-Je vais commander le service d'étage, nous mangeons ici ce soir. Prends une douche si tu veux, ensuite nous mangerons, puis nous irons nous coucher. Si tu veux sortir demain, tu devrais te reposer.

Il se retourna.

-Comme tu ne fais pas de course, tu peux attraper quelques douleurs dans les jambes. Comme celle que tu as eu il y a un mois un demi, ayant couru après le bus pour rejoindre ton travail, ta voiture étant tombée en panne.

Il sourit tendrement puis tourna la tête vers la fenêtre. Cet homme connaissait tout de moi. Et moi, je ne connaissais rien de lui.

Save Me Then Love MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant