Alive

264 32 68
                                    

« Salut Woohyun, c'est Sunggyu, ça fait longtemps n'est-ce pas ? Tu m'as peut être déjà oublié, enfin je n'espère pas. En tout cas moi je ne t'ai pas oublié. Tu dois te demander pourquoi je t'écris une lettre maintenant alors que nous ne nous sommes pas vu depuis plusieurs années. En plus, de la manière dont nous nous sommes quitté la dernière fois, tu pensais certainement n'avoir plus jamais de nouvelles de moi. En vérité je ne voulais plus te parler, je voulais juste t'oublier et laisser cette période de ma vie avec toi derrière moi. Mais tu sais, je n'ai pas réussi. Au contraire, je pensais à toi très souvent et n'ai pas bien vécu du tout pendant ces deux années sans toi. Mais bon, je me dis que pour toi tout a dû bien se passer, comme toujours, alors ça me va. Au début, je dois t'avouer que je t'enviais un peu. Tu as toujours eu tout pour toi, à commencer par un meilleur ami génial n'est-ce pas ? Tellement génial que tu ne le vois plus aujourd'hui... J'espère que tu ne m'en veux pas trop, mais j'avais mes raisons et je vais d'ailleurs te les donner dans cette lettre.

Donc, je disais que tu avais tout pour toi, une famille super, une beauté naturelle, ce qui attirait les filles. Ce qui était sans te déplaire. De toute façon, tu as toujours eu le contact facile et t'entendais avec tout le monde. Pas comme moi. Les gens m'ont toujours laissé à l'écart et moi je restais dans mon coin parce que je ne voulais parler à personne de toute façon. J'étais bien tout seul. La musique était ma seule amie. Elle était toujours là quand je n'allais pas bien, c'est à dire la plupart du temps, et m'apaisait. J'avais créé ma propre bulle autour de moi et ne laissais personne s'en approcher. Sauf que je t'ai rencontré et tu as petit à petit fragilisé cette bulle. Je me souviens encore du jour de notre rencontre comme si c'était hier. C'était pendant l'année de seconde. Un soir, je rentrais du lycée et tu t'es approché de moi pour me demander où il y avait une salle de jeux dans le coin, puisque tu étais nouveau dans le quartier. Je t'avais indiqué une salle pas loin, où j'allais de temps en temps. Et tu m'avais demandé si j'allais dans le lycée du quartier. J'avais acquiescé avec un mouvement de tête, tu m'avais souri en disant que nous allions nous voir souvent vu que tu allais y rentrer. Cette idée m'avait effrayé et je m'étais dépêché de te saluer de la tête avant de partir en direction de mon appartement. En me parlant de cette manière, sans préjugé ni critique ou pitié, comme personne ne m'avait jamais parlé, exceptée ma mère avant qu'elle ne décède, tu avais déjà commencé à t'approcher de ma bulle. Ce qui me troubla et m'effraya dès ce soir-là. Le lendemain matin, après avoir passé une nuit agitée, j'étais arrivé au lycée et m'étais assis à ma place, à côté de la fenêtre, au premier rang. J'avais essayé de continuer ma nuit sur ma table, la musique dans les oreilles, jusqu'à ce que le professeur entre dans la classe. J'avais alors relevé ma tête et arrêté la musique. Puis je te vis sur le pas de la porte attendant que le professeur te dise de rentrer. Tu me remarquas à ton tour et me souris. Je détournai aussitôt le regard vers le professeur. Je m'étais senti terriblement mal à l'aise à ce moment-là. Tu avais fini par rentrer et tu t'étais présenté : "Bonjour tout le monde ! Je m'appelle Nam Woohyun ! Prenez soin de moi, je vous prie." Et bien sûr, tu t'étais assis à côté de moi puisque c'était la seule place de libre vu que personne ne voulait s'asseoir près de moi. Je m'étais dit que tu t'étais placé là car de toute façon il n'y avait pas d'autre place pas parce que tu le voulais. Puisque tout le monde agissait de la sorte avec moi, pourquoi serais-tu différent. J'avais ce genre de pensées. Sauf que, tu t'en souviens ? Tu m'avais salué et dit que tu étais content d'avoir atterrit dans ma classe car tu ne connaissais personne d'autre. Je t'avais répondu que tu ne me connaissais pas non plus et m'étais tourné vers la fenêtre. Tu avais, par la suite, essayer de me parler mais je t'avais ignoré. Les jours qui suivirent, tu m'avais suivi partout parce que tu voulais être mon ami alors que tout le monde te disait qu'il ne fallait pas traîner avec moi. Ils disaient que j'étais asocial, inintéressant et inutile. Mais tu t'en fichais alors je me disais que tu allais certainement vite te rendre compte par toi-même que je ne valais rien et ainsi tu arrêterais de me suivre. Tu avais réussi à t'entendre avec tout le monde malgré cela. Au bout de quelques semaines où tu ne m'avais toujours pas lâché, j'avais fini par accepter de t'écouter et de t'adresser la parole. Je commençais déjà à m'attacher à toi. Plus le temps passait plus tu fragilisais ma bulle de solitude. Grâce à toi, j'avais appris à voir la vie sous un meilleur angle. Tu as été mon soleil dans ma vie sombre. Tu as réussi à me faire sourire et rire, même si la plupart du temps ce n'était que dans ma tête que je le faisais. Petit à petit, avec toi à mes côtés, j'étais moins renfermé sur moi-même et avais un peu plus confiance en moi. Le regard des autres envers moi avait aussi un peu changé. Ils me repoussaient moins. Peut-être parce que je paressais un peu moins pitoyable. Ça doit t'ennuyer que je te raconte cela, non ? Désolé, ça venait tout seul, et puis je voulais que tu saches ce que tu m'as apporté dans ma vie sinistre. A l'époque et encore il y a deux ans, je n'ai pas pu t'exprimer mes sentiments. Mais aujourd'hui, dans cette lettre, je veux être honnête avec toi. En vérité, je t'ai aimé à cette époque et je t'aime toujours. Je n'arrive pas à t'oublier, c'est fou. Tu dois être choqué, n'est-ce pas ? Ne m'en veux pas trop. Je me sens libéré maintenant que je te l'ai dit. Je ne te demande pas d'accepter quoi que ce soit bien sûr. Je veux que tu vives ta vie heureux avec ta famille et que tu ne préoccupes pas de moi. C'est pour cette raison que je t'ai laissé il y a deux ans. Je ne voulais pas être un poids pour toi. Et puis c'est vrai que te voir heureux avec des filles me suffisait au début mais c'était vraiment dur pour moi. Alors j'ai pensé que la meilleure solution était de m'éloigner de toi et de t'oublier. Mais je n'ai pas réussi, j'ai pensé à toi tous les jours. Peut-être que toi tu m'avais oublié, je ne peux qu'être désolé dans ce cas-là. Je voulais juste que tu saches, pour me libérer. Je suis si égoïste. Il y a une autre chose que je t'ai toujours cachée. Tu n'as jamais trop su comment j'en étais arrivé là dans ma vie. Tu ne m'as jamais demandé et moi je ne t'en ai jamais vraiment parlé. Je ne pense pas que c'était parce que tu ne voulais pas savoir mais tu attendais certainement que je t'en parle de moi-même. Ai-je raison ? Je suis un peu en retard, désolé. Je m'excuse tout le temps, ça doit être chiant non ? Désolé, mais je ne peux rien faire d'autre que d'être désolé. Bref, tu étais juste là quand j'en avais besoin et c'était ce qui était important. Pour ma part, je ne t'en ai jamais parlé parce que je ne voulais pas que cela change notre relation que je chérissais de plus en plus. Je présume que j'avais peur que ton regard envers moi change, que tu aies pitié. Je ne voulais pas qu'il y ait de malaise entre nous ou que tu te sentes mal pour moi. Tu avais une vie tellement heureuse que je ne voulais pas l'assombrir. Mais dans cette lettre je vais tout te dire. Tu savais vaguement que ma mère était morte mais pas de quoi. En réalité ma mère était atteinte d'une maladie génétique rare qui lui causait une hypertension artérielle. Et comme c'est héréditaire, elle me l'a transmis. Ainsi, depuis que je suis petit, j'ai toujours pris des médicaments et fait des examens régulièrement. Ma mère s'en voulait beaucoup d'avoir cette maladie et de ma l'avoir transmis et de me faire vivre ça. Cette hypertension a fini par attaquer ses reins. Elle était atteinte d'une insuffisance rénale et les médecins s'en sont rendus compte trop tard et ne pouvaient plus rien faire. Il aurait fallu qu'elle ait une greffe mais c'était déjà trop tard. Cela avait déjà atteint d'autres organes. C'est arrivé quand j'avais huit ans alors je n'ai pas trop compris à ce moment-là. Néanmoins j'avais compris qu'elle n'était plus là et que je ne la verrai plus alors elle me manquait énormément et ce encore maintenant. Elle manquait aussi beaucoup à mon père. Il n'a jamais pu supporter la mort de ma mère et a commencé à me rejeter parce que je lui faisais penser à ma mère et sa maladie. Les rares fois où tu es venu chez moi, tu ne l'as pas vu parce qu'il travaillait énormément, pour ne pas me voir et pour se remplir la tête. Quand je suis parti de la maison pour mes études, il a fini par ne plus m'appeler et puis j'ai appris qu'il était parti vivre à l'étranger. A partir de là, j'étais comme orphelin. Mais tu étais là. Tu étais là pour me redonner le sourire, pour me faire oublier tous mes problèmes. Quand je te regardais, je ne pensais à rien d'autre. Tu ne l'as jamais su mais tu étais devenu ma raison de vivre. Mais tu m'as apporté beaucoup de souffrance aussi. On est un peu masochiste quand on est amoureux, n'est-ce pas ? Ne t'en veux pas pour ça, cela ne me concerne que moi. Je n'avais pas à t'aimer. C'est pour cette raison que je t'ai laissé ce jour-là et que j'ai feint une dispute à partir d'une broutille. Depuis ce jour-là j'ai été très seul mais je ne pouvais pas revenir en arrière. Et puis je t'ai aperçu quelques fois à l'université et tu avais l'air heureux sans moi. Alors c'était mieux ainsi. De toute façon, comment aurais-tu pu être heureux avec un misérable comme moi? Tu ne l'aurais pas été au final et m'aurais rejeté. Ainsi, j'ai continué à aller à l'hôpital pour les examens et mon état ne s'arrangeait pas, il s'aggravait au contraire. Je commençais à développer moi aussi une insuffisance rénale, comme ma mère. Il me fallait une greffe de rein, et encore, il y avait beaucoup de chances pour que je rejette le greffon. De toute façon, je n'avais plus de famille alors on ne pouvait plus me sauver. Alors j'ai décidé d'attendre la fin à l'hôpital et de mourir comme ma mère. C'est mon destin, de mourir comme ma mère. Ma vie se résume à ça maintenant. Voilà tout est dit. Merci d'avoir été à mes côtés, même si ça n'a pas duré très longtemps. N'essaies pas de venir me voir à l'hôpital, je ne veux pas que tu me vois dans cet état. Je préfère que tu te souviennes de moi comme étant en bonne santé et avec un peu de joie de vivre. De toute façon, la fin approche alors tu n'auras peut-être même pas l'occasion de me voir. Peut-être même que lorsque tu liras cette lettre, je serais déjà parti. Enfin bon Dieu seul le sait. Merci d'avoir lu ma lettre jusqu'au bout, je me sens mieux maintenant que je t'ai tout raconté. Je peux partir en paix maintenant. Désolé d'être si égoïste. C'est vrai que je te laisse avec ça sur les bras mais je sais que tu finiras par m'oublier et que tu vivras heureux avec ta famille, sans moi. J'espère juste que l'on aura la chance de se rencontrer dans une autre vie et que cette fois-ci ce ne sera pas si triste. Adieu, Woohyun. Vis bien et ne saute pas de repas, d'accord ? Et ne pleure pas surtout. Je ne mérite pas tes larmes. Adieu. On se retrouve dans une prochaine vie, d'accord ?

AliveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant