Chapitre 1: Partie 1

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Bonne lecture ~♡

Tout a toujours été simple pour moi.

Mes parents sont avocats à New York City, mon frère vit à la maison et vient de fêter ses vingt ans. Il va depuis deux ans à l'université, dans le quartier de Greenwich Village, dans l'arrondissement de Manhattan.

Je ne le vois pas souvent tout comme mes parents, mais nos relations sont quelque peu tendues. Il m'arrive de temps à autre de le retrouver bourré et drogué devant la porte, en général je le traîne dans l'entrée tant bien que mal et je le laisse se débrouiller.

J'ai toujours eu ce que je voulais.

 Mes parents  compensaient leur manque de présence par l'argent et ce depuis mon plus jeune âge. Tout cela me convient, bien que je mène une existence plutôt vide et qui peut paraître froide, en réalité, je ne manque de rien. Et cela me suffit.

D'autant plus que mon nom et mon apparence m'ont toujours permis d'être une de ces coqueluches, jamais vraiment seule mais pas vraiment entourée par des amis au premier sens du terme. Je les qualifierais plutôt d'amis par procuration, en étant avec moi, ils s'assuraient une certaine image et étaient qualifiés de « populaires ».

Enfin, je le pensais, je pensais que tout allait bien, je n'étais pas à plaindre. Pourtant, lorsque je voyais ma mère rentrer avec d'autres hommes le soir, alors que mon père était au bureau, ou que mon frère et moi nous comportions comme des étrangers, quelque chose se brisait en moi... 

C'était infime mais douloureux, mon cœur se serrait doucement. J'étais vide, ridicule dans mon petit monde. Meneuse de tout mais maîtresse de rien.

Je me sentais stupide, "quel genre de monstre étais-je pour me plaindre alors que j'avais tout", ne cessais-je de me répéter... Je me sentais détruite de l'intérieur mais gardais mon masque extérieur. Me contentant de faire ce que j'avais appris, être une « bonne fille », comme on me l'avait si bien répété...

Malgré tout, j'étais cette bonne fille qui faisait des mauvaises choses. Je voulais que mes parents posent enfin leurs yeux sur moi, qu'ils me voient telle que j'étais, perdue.

Perdue, dans ce que l'on m'avait inculqué, perdue, dans un entourage où il fallait ridiculiser ou être ridiculisé. J'étais devenue une Reine de glace au cœur de pierre. Une beauté froide dont personne n'avait réellement envie de s'approcher.

Mais un jour, ce fût trop, le manège auquel je jouais m'avait lassé.

Ce jour là, je le passai avec Britt. 

Brittany de son vrai prénom, habitait à quelques pâtés de maison de chez-moi. Elle traînait avec moi parce que je faisais certainement « jolie » à côté d'elle, la grande blonde décérébrée. Ensemble, nous n'étions qu'apparence. Il nous suffisait d'être superficielles et de juger les gens pour être de bonnes amies. 

Dans nôtre lycée, les règles étaient simples, il fallait écraser pour être respecté. Et c'est ce malheureux Tobias Martens, un redoublant tout fraîchement débarqué dans l'établissement, qui était la cible de nos mauvaises blagues. 

Je ne lui avais jamais parlé, si ce n'était pour participer à son lynchage, en partie parce que cela aurait fait du grabuge et que je voulais tout sauf lancer des rumeurs ridicules à mon compte. En bref, il était plus vieux de deux ans que nous, il avait ce drôle de style négligé et personne ne l'approchait de peur de devenir le mire suivant.

Britt a commencé à lui jeter des piques en début d'année, et disons que j'avais participé activement à ses humiliations. Je n'en étais clairement pas fière, mais c'était le seul moyen que je croyais avoir pour m'intégrer.

Ce jour-là pourtant, j'étais lasse, j'avais essayé de la calmer, mais lorsqu'elle commençait autant dire qu'il était très compliqué et périlleux de lui faire entendre raison.

J'aurais vraiment aimé l'aider, mais j'étais restée là, spectatrice de l'humiliation publique que Britt lui infligeait. J'avais pourtant réussi à l'éloigner avant que Tobias perde son sang-froid, qui était vraiment impressionnant, mais j'en étais convaincue après le regard plein de rancune qu'il m'avait jeté, j'étais aussi pourrie que les autres.

Cette constatation m'avait fragilisée et le soir en rentrant, je n'avais eu qu'une envie, me jeter à corps perdu dans les études ou n'importe quelle activité me permettant de penser à autre chose. 

A la maison, je lançais mon habituel « je suis là », auquel le silence répondait, j'avais passé le seuil et étais directement montée à l'étage pour rejoindre ma chambre.

J'avais alors malencontreusement croisé Sean, le seul et l'unique. Il empestait la fumette et j'essayais de passer à côté de lui sans faire de bruit, mais me pris le pied dans l'un des cartons que ma mère n'avait jamais pris le temps de défaire.

Le son fracassant des objets à l'intérieur du carton qui s'entrechoquèrent, me fit grimacer et en levant les yeux sur Sean tout en attrapant la boîte, je me rendis compte qu'il me jetait un regard très mauvais... Merde. Il avait certainement bu la veille et le boucan que je venais de faire lui faisait probablement mal à la tête...

« Tu voudrais pas arrêter de faire chier, une fois dans ta vie ?! », m'avait-il simplement lâché au visage, d'un ton sec. 

J'avais encaissé le coup et en baissant la tête, avais longé le couloir jusque dans ma chambre. Cela faisait mal, pourtant j'avais l'habitude de sa méchanceté démesurée...

« Arrêter de faire chier »... ? Pourquoi ces simples mots m'avaient tant touchée ce jour-là ? Je n'avais pas la réponse et ce constat me perturbais d'autant plus. Je me sentais ridicule, je me demandais pourquoi j'étais si sensible alors qu'à l'accoutumé ce genre de remarques ne me gênait pas.

Et malgré tout mes efforts, cette après-midi, je ne pus me plonger entièrement dans mes devoirs... Mon esprit ressassant inlassablement les mauvais moments de la journée.

Le soir, je vis dans l'entrée des chaussures de sport, le genre de chaussures que mon père ne porterait jamais car ce n'était sûrement pas assez prétentieux pour lui. 

Je me demandais à qui elles pouvaient bien appartenir et en passant dans le couloir, je me rendis compte que ma mère n'était pas seule dans la chambre à coucher.

Avant de partir vers ma chambre, je fis un crochet à la salle de bain. Là, devant moi, je vis mon reflet dans le miroir. Ma tête était déconfite, j'étais dans un état lamentable, c'était terrible... Je soupirai me disant que la tension sur mon visage allait disparaître, mais mon expression resta la même...

Je pris le temps de me regarder un peu plus et sentis le dégoût monter en moi. J'étais une sale ingrate, j'avais tout et j'osais afficher ce genre d'expression. Une pauvre égoïste ridicule, trop bien dans son petit confort pour avoir de sérieux problèmes.

Je baissais le regard et mes yeux tombèrent sur la boîte d'aspirine de ma mère. Elle en prenait beaucoup, après tout, elle devait avoir le poids de sa culpabilité sur les épaules. Entre son travail de briseuse de mœurs et ses adultères...

Je pourrais en prendre...

Juste quelques-uns...

DrownedOù les histoires vivent. Découvrez maintenant