1643
Les cinq individus arrivèrent à un tènement, ferme dépendante d'une seigneurie. Ziwei (紫薇) défila son regard sur la moyenne demeure délabrée, remarquant une toiture en paille, ciselée à du bois mal ciré. Les murs humides donnaient l'impression que l'habitat allait s'effondrer d'une minute à l'autre, emportant toute vie humaine demeurant en lui. Suying (素莹) déglutit difficilement, constatant que XiaoYanZi (小燕子), Liuhong (柳红) et Liuqing (柳青) vivaient dans le danger constamment, même en ayant un toit sur leur tête. Elle et Son Altesse Royale découvrirent une grande cour, là où se trouvaient, près de la grande porte d'entrée, deux chaises en bois face à une table de la même matière. Plus loin, dans un coin, se trouvaient quelques bassines d'eau et des planches de bois qui permettaient le lavage de vêtements.
Des rires d'enfants adoucirent l'atmosphère et la vision de cette habitation presque en ruine. Un groupe d'une dizaine d'entre eux sortit en courant par la grande porte, et cria le nom de XiaoYanZi à de multiples reprises.
— XiaoYanZi, tu es revenue ! firent-ils tous en chœur, gagnant un sourire attendri de la princesse.
La concernée se mit à rire en synchronisation avec eux, puis se baissa, bras grands ouverts afin d'attraper une petite fille. Elle referma le cercle autour de ses petites hanches, et lui posa un baiser baveux sur la joue. La fillette rigola en priant XiaoYanZi de se stopper, puisque cela la chatouillait. Aussitôt, tous les enfants entourèrent la rebelle et lui firent un câlin collectif.
— Alors, bande de garnements, fit XiaoYanZi, vous avez été sages avec votre grand-mère ? demanda-t-elle d'un ton faussement sérieux.
— OUI ! crièrent-ils, riant aux éclats.
— C'est bien, acquiesça-t-elle d'un hochement de tête, avant de se relever.
Se tournant vers Ziwei et Suying, elle aperçut ces dernières, sourire jusqu'aux oreilles, probablement touchée par ses gestes affectueux. Quittant les petits, une main entrelacée à celle de la petite fille, XiaoYanZi s'approcha lentement de ses invitées.
— Quand je disais qu'on était nombreux, je ne plaisantais pas, pouffa-t-elle. J'ai accueilli ces enfants, seuls, sans famille. Je ne pouvais pas les voir ainsi, ils ne méritent pas de vivre dans de telles conditions, à leur jeune âge. Ils méritent de vivre comme tous les gamins. La famine et la misère ne devraient pas leur être familiers. Je souhaite qu'ils gardent cette part d'innocence en eux, jusqu'à l'âge adulte. Je veux qu'ils profitent pleinement de la vie.
La souveraine étira un sourire franc, attentive à chaque parole de son amie.
— J'ai fait de moi leur famille, et j'ai fait d'eux la mienne, acheva-t-elle, une certaine fierté tonnant dans la voix.
Ziwei pouvait sentir toute la fierté que ressentait XiaoYanZi en cet instant actuel. En présence de ces enfants, c'était comme si son monde ne tournait plus qu'autour d'eux, et que le reste ne comptait plus. Ce n'était pas un fardeau pour elle, c'était du plaisir, et rien que du plaisir. D'autant plus que l'amour qu'elle portait à l'égard de ces petits pouvait se sentir à des kilomètres. La princesse sentit une pointe d'admiration envers sa nouvelle rencontre. Si brave, courageuse et n'ayant peur de rien, Ziwei aurait aimé être à sa place, savoir que rien ne lui échappait d'entre les mains, qu'elle avait encore le contrôle de sa vie. Or, elle avait comme l'impression de faillir au fur et à mesure, comme si sa longue quête ne serait que vaine, et sans espoir de se conclure. Elle baissa la tête, son humeur étant soudainement redescendu à zéro suite à ces pensées pessimistes qui l'assaillaient avec tant de brutalité.
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Bataillons sanguinaires
Historical FictionSuite au décès de sa génitrice, Zǐwēi Xià, progéniture non-reconnue de l'actuel empereur de la dynastie Ming, Chóngzhēn, quitte sa province natale pour aller retrouver son père. À Pékin, elle y rencontre alors Xiǎo Yànzi, une jeune chinoise au Kung...