Astronaut (Nine)

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Sa voix résonnait dans son esprit. Encore. Chaque fois qu'il fermait les yeux, il entendait sa voix. Il ne savait pas qui elle était, ni à quoi elle ressemblait. Il savait seulement qu'elle devait le sauver. « Je suis venue vous sauver, mon Docteur » étaient les mots qu'elle ne cessait de lui répéter. Au début, il avait pensé que c'était un souvenir d'une ancienne incarnation mais plus il y pensait, plus il était convaincu que ce n'était pas le cas. Ce ne pouvait pas être une partie de son futur. Il n'avait jamais pu voir son propre avenir. C'était pour le mieux. Ces rêves venaient sûrement du fait qu'il voyageait seul dans le temps et dans l'espace depuis trop longtemps. Ou c'était peut-être son subconscient qui lui envoyait un message : dernièrement, il avait été une véritable épave. Depuis la guerre du Temps, il n'avait rien fait de bien. Il ne faisait que se noyer dans la noirceur de son âme et attendait que la mort vienne pour le délivrer de son fardeau.

Cependant, il ne pouvait pas mourir. Il devait payer pour ce qu'il avait fait. Il devait vivre avec le sang de son peuple sur les mains. Il devait vivre et trouver un moyen de tout arranger. Il savait qu'il ne pourrait jamais oublier les images du massacre qu'il avait commis. La solitude et le fardeau qu'il portait étaient un prix correct. Les bonnes choses qu'il faisait pour d'autres personnes étaient juste une façon de soulager sa douleur. Il avait envoyé des messages dans tout l'espace en espérant que quelqu'un de son peuple lui répondrait mais il n'y avait jamais rien eu. Il n'y avait que lui. Il était le dernier et il avait mérité ce sort. Il était le seul à blâmer. Parfois, la victoire avait un goût amer. S'il avait su, il aurait choisi de perdre cette guerre et de mourir en héros plutôt que de détruire sa planète et de fuir comme le lâche qu'il était. La culpabilité se faisait plus lourde à porter chaque jour. C'était de plus en plus difficile de le supporter.

C'est pourquoi, même s'il ne comprenait pas pourquoi ça se produisait, il aimait tant entendre la voix quand il dormait. Il aimait entendre ces mots nuit après nuit car, alors, il oubliait la solitude qui le rendait fou. Durant un moment, durant un tout petit moment, il ne se sentait plus seul, comme si la voix était vraiment là avec lui. Ses cœurs étaient pleins d'un sentiment de pardon et il avait l'impression d'avoir un ami. Il adorait ces impressions mais elles ne duraient jamais. Chaque fois qu'il se réveillait, il affichait un petit sourire qui disparaissait sitôt que les souvenirs lui revenaient en mémoire. Ça lui faisait tant de mal qu'il se sentait incapable de bouger. Il avait arrêté de pleurer depuis longtemps. C'était inutile. Ça ne les ramènerait pas. Les messages, les prières, l'espoir... Rien ne les ramènerait jamais. Gallifrey avait disparu pour toujours. Quand il s'endormait, il repoussait ces souvenirs, juste pour quelques heures de pause, et il sentait presque coupable de ne pas rêver de son peuple disparu.

Cette nuit, il put découvrir un peu plus de cette étrange créature qui voulait le sauver. Il ne put voir que des yeux dorés et brillants, le regardant droit dans les yeux. Rien d'autre. Juste des yeux brillants et de nouveaux mots. « Je vous veux en sécurité, mon Docteur. » C'était suffisant. Il pouvait sentir la chaleur de ce regard sur lui. La créature n'avait ni nom, ni visage. Juste des yeux dorés et brillants et une chaleur qui le réduisirent en pièces. Ce n'était qu'un rêve et il voulait tellement qu'il soit réel que c'en était douloureux. La solitude était lentement en train de le tuer et la douleur devenait insupportable. Pourtant, cette douleur et cette solitude n'étaient pas dans le rêve. Il n'y avait qu'elle et cette impression d'être un autre homme, d'être quelqu'un qui en valait la peine. Quelque chose qui n'arriverait jamais, il en était certain.

Quand il se réveilla et réalisa que ce n'était, encore une fois, que ce rêve, la douleur le percuta de plein fouet et lui coupa le souffle. Des larmes coulaient sur son visage. Les premières larmes depuis longtemps. Pendant neuf-cent ans, il avait été un homme extraordinaire et étrange qui aimait la vie, qui riait toujours tout le temps et qui faisait l'idiot. Désormais, il n'était qu'une pauvre petite chose, complètement brisée de l'intérieur. Rien d'autre. Juste une épave vivante. Il était seul et tout était de sa faute. Il respira lentement et se leva, étourdi. Il avait besoin d'air frais. Il sortit. Le TARDIS avait atterri au milieu d'une forêt déserte. Ce n'était pas sur son ordre. La machine avait choisi cette destination exprès quand elle avait senti son besoin d'être loin de tout pour un moment. Rien de mieux qu'une soi-disant forêt hantée. C'était très obscur mais il s'en fichait. Ça reflétait le fond de son âme : sombre, effrayant, hanté de fantômes.

Brèves de TARDISOù les histoires vivent. Découvrez maintenant