René Descartes a dit un jour qu'il fallait douter tout ce qui pouvait être douté, mais entre vous et moi, à quel point pouvons nous douter? Dois-je douter l'amour, l'honnêteté et même la mort?
J'ai peur, terriblement peur. Non, pas de la mort, oh non! Après une semaine entière dans ce lit d'hôpital à fraterniser avec la mort, je sais qu'elle m'attends maintenant impatiemment, les bras ouverts. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, la mort lente est une expérience magnifique: maintenant que le monde entier sais que je vais mourir, j'ai enfin le sentiment d'être aimé.
Des amis que je n'ai pas vu depuis dix ans sont venus me voir, et j'aurai sûrement dû attendre encore plus longtemps si je n'aurai pas été en train de mourir. Ma fille est aussi venue faire un tour, et jamais dans toute sa vie m'avait-elle été si douce, si gentille. C'est en perdant quelque chose qu'on réalise à quel point on y tient, hein?
Non, je n'ai pas peur de mourir: j'ai peur d'être oublié. Dans les deux mois, même trois prochains mois, si je suis chanceux, je serai un sujet de conversation autour des tables, et je vivrai à travers les mots. Mais je deviendrai rapidement qu'un nom soufflé dans le vent, et la je serai mort pour de bon. Je n'ai pas peur de mourir.
J'ai peur de disparaître.