Les jours s'écoulaient, paisibles, et les deux compagnons avaient perdu la notion du temps. Ils étaient heureux et cela leur suffisait. Ils ne suivaient aucune règle, faisaient ce qu'ils voulaient quand ils le désiraient. Arouas résumait sa nouvelle existence en trois mots. Liberté. Amour. Bonheur. Mais c'était trop beau pour durer, ils auraient dû s'en douter. Cette vie heureuse était en équilibre instable au bord d'un précipice, où elle pouvait tomber à chaque instant.
Cela arriva une journée où Arouas était parti faire un tour dans la forêt avec Plume. Il s'était aventuré plus loin qu'il ne le pensait quand il entendit quelque chose qu'il reconnut aussitôt et qui lui glaça le sang. Des chevaux hennissaient et des hommes ou des elfes conversaient. Cette rumeur était accompagnée par le fracas d'armes qu'on maniait. Une bataille se préparait ! Arouas se figea. Il mit pied à terre sans bruit et se rapprocha le plus silencieusement possible. Une foule d'elfes était rassemblée à la lisière de la forêt. Le prince aperçut même son père, sa sœur et Colgia, sa professeur d'apprentissage du combat. À l'horizon, se tenait un rassemblement à peu près égal d'humains. Entre les deux, se trouvait la Plaine Sanglante, ainsi nommée en raison des nombreux combats ayant eu lieu à cet endroit depuis la nuit des temps. C'était là que se déroulerait la bataille. Arouas se tapit dans les fourrés pour observer sans être vu. Un messager humain traversa la plaine sur un cheval au galop. Il s'arrêta devant Azigon.
- J'ai un message de la part de Grùk, mon vénérable roi.
- Parle, je t'écoute ! dit le roi des elfes d'une voix forte.
- Vous nous aviez dit que vous nous livreriez la sorcière et...
- C'est faux ! Je n'ai jamais dit une chose pareille. J'ai dit que j'allais y réfléchir.
- Et cela fait deux mois qu'elle a soi-disant disparu ! Si vous ne la livrez pas immédiatement au roi, nous lancerons nos troupes sur vous et nous tuerons les elfes jusqu'au dernier.
- Et bien, faites ! Je n'ai pas d'ordres à recevoir des humains. De plus, l'humaine n'a pas été retrouvée.
Arouas recula, veillant à ne pas se faire entendre. Il enfourcha Plume et quand il fut assez loin, il prit le galop. Il ne s'arrêta qu'une fois sur la plage et escalada à toute vitesse la falaise. Il pénétra dans leur cachette où se trouvait Leya. En le voyant tout essoufflé, elle lui jeta un regard surpris puis se rapprocha, inquiète de l'expression affolée qui se lisait sur son visage.
- Ça va ? s'enquit-elle.
Il secoua la tête, peinant à reprendre sa respiration.
- Une bataille... Il va y avoir une bataille... entre les... humains et les... elfes.
- Quoi ?! Où ça ?
- À la... Plaine Sanglante.
- Mais pourquoi ?!
- Parce que... mon père ne t'a pas livrée.
La jeune fille en resta muette d'horreur.
- Je vais me battre, dit Arouas.
Il entama alors la désescalade de la falaise et appela Plume. Celle-ci ne tarda pas à apparaître, suivie de Souffle. Il se jucha sur la petite jument. Leya Les rejoignit à ce moment.
- Je viens avec toi, déclara t-elle.
- Hors de question, trancha l'elfe.
- Mais c'est de ma faute !
- On ne pouvait pas te livrer à Grùk ! Et puis, tu ne sais même pas te battre.
- Tu oublies que je suis une sorcière, j'ai des pouvoirs qui pourraient aider ton peuple.
D'une voix plus douce, il essaya de la convaincre :
- Je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose. Ne viens pas, je t'en prie. Je t'aime.
Il pressa ses jambes contre les flancs de Plume qui prit le galop. Une fois dans la forêt, il se retourna et aperçut Leya et Souffle dans son sillage. Il leva les yeux au ciel afin de lui montrer son exaspération et, sachant qu'il ne pourrait la faire changer d'avis, continua sa route. Il mit pied à terre quand il fut arrivé à proximité de la plaine. Un sentiment d'appréhension lui étreignit le cœur quand il pensa à ce qu'allaient dire les elfes à son apparition, après plusieurs semaines d'absence. Il prit une grande inspiration et sortit de la forêt. Au début, personne ne le remarqua. Il fendait la foule avec aisance, le cœur battant. Progressivement, certains prirent conscience de sa présence. Ceux-là s'écartaient à son passage. Il se força à garder la tête haute, essayant de prendre une attitude princière alors qu'il mourrait d'envie de disparaître sous terre. Sa sœur le remarqua avant son père. Elle descendit de son cheval et courut vers Arouas. Un grand sourire illuminait son visage. Elle sauta au cou de son frère qui la fit tourner plusieurs fois avant de la reposer à terre. Ils se regardèrent un instant sans rien dire, savourant le bonheur de se retrouver puis elle lui prit la main et l'entraîna vers leur père. Le roi était toujours en selle et fixait son fils sans rien dire. Aucune expression n'habitait son visage mais Arouas se sentait coupable. Alors, il baissa les yeux, attendant les remontrances. Il se raidit lorsque son père mit pied à terre mais au lieu de le disputer, celui-ci l'étreignit avec force. Le prince, d'abord étonné, finit par lui rendre son étreinte.
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Arouas, prince elfe - Terminée
FantastikA son arrivée, elle bondit sur ses pieds et se mit à faire les cent pas, tel un lion en cage. Elle le toisa avec méfiance. [...] Ses cheveux soyeux lui tombaient sur les reins. Son teint hâlé faisait ressortir ses yeux émeraude, exactement comme dan...