Les Ailes de l'Ensorceleuse

~CHAPITRE 8~

- Il faut qu'on parle.

Esmérya lève lentement les yeux vers moi, louchant un instant sur mon bras qui lui barre l'accès à la bibliothèque dans laquelle elle comptait se rendre.

- Non.

La jeune fille fait alors demi-tour et commence à repartir dans la direction qu'elle a empruntée pour venir. Je la rattrape en quelques enjambées et lui fait à nouveau barrage de mon corps.

- S'il-te-plait, il faut vraiment qu'on parle, lui demandé-je le plus gentiment possible, alors qu'intérieurement je bouillonne.

Elle pousse un sifflement agacé, tente de me contourner une seconde fois mais je reste fermement planté devant elle.

- J'ai dit non, assène-t-elle, débrouille toi avec tes histoires de v...

La jeune fille n'achève pas sa phrase, ses yeux verts s'écarquillant d'effroi pendant un quart de seconde. Trop tard. Je sais parfaitement ce qu'elle allait dire « tes histoires de voix ».

Je déglutis avec difficulté et lui demande dans un souffle :

- Comment tu sais ça ?

Esmérya secoue la tête de droite à gauche et évite mon regard.

- Comment je sais quoi ?

Ma nervosité monte d'un cran et je la saisis par les épaules, lui arrachant un cri de surprise.

- Esmé, je sais parfaitement ce que tu allais dire. Et c'est exactement pour cette raison que j'ai besoin de réponses. Comment tu es au courant pour...Pour ce truc dans ma tête ? Est-ce-que c'était toi ?

- Tu divagues complètement, Enzo, me répond-t-elle en plantant cette fois son regard flamboyant dans le mien. Je ne sais même pas de quoi tu parles.

Outré, j'ouvre la bouche pour lui expliquer ma façon de penser mais, prenant conscience de la présence de quelqu'un, la referme sans dire un mot. Jason, puisque c'est lui, s'approche de nous, visiblement terriblement curieux de savoir ce que je fais avec l'Ensorceleuse, dans un coin sombre, devant la bibliothèque. Le sourire qui s'étire sur ses lèvres ne me dit rien qui vaille et je soupire déjà à l'idée de l'entendre m'assaillir de questions.

Esmérya se retourne vivement vers mon ami, le salue d'un hochement de tête, puis me contourne pour de bon, certainement ravie qu'une opportunité de me fuir se présente.

Cependant, alors qu'elle me frôle avec la délicatesse d'un fantôme, je l'entends clairement me chuchoter :

- 17h. Chez moi.

Je retiens un sourire victorieux et glisse nonchalamment mes mains dans mes poches avant de rejoindre mon ami qui frétille d'impatience, les yeux brillants.

- Et bieeeeen, chantonne Jas en me regardant avec un sourire jusqu'aux oreilles, on a oublié de dire certaines choses à papaaaa ?

- La ferme, Jas, il n'y a rien du tout. Je l'ai bousculée, elle est tombée et je l'ai relevée. C'est tout.

- Dans un angle du couloir ? Tiens donc, que c'est intéressant ! Susurre mon ami en levant un sourcil.

- Il y avait une porte ! Me défends-je vivement avec une mauvaise foi absolue.

- Ooooh ? Derrière la porte en plus ?

Raaaaaaah ! Ce qu'il peut être exaspérant ce type ! Épuisé, je me contente de lever les yeux au ciel et de répondre par des « hmmm » à chacune de ses questions -toutes plus indiscrètes les unes que les autres.