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Laetï s'asseya une dernière fois de sa vie sur ce muret qu'elle aimait tant, sortie pour la dernière fois de sa vie son paquet de Malboro dont elle raffolait et détester à la fois, et mis pour la dernière fois de sa vie la cigarette entre ses lèvres.

Elle avait décidée d'arrêter. Sage décision, n'est-ce pas? Elle n'en avait plus besoin, ce garçon, qu'elle venait de rencontrer, avait su combler le vide de son âme et le trou dans son coeur.

Hayes viendra dans quelques minutes, elle ne voulait pas le croiser, elle n'en avait pas le courage, elle posa simplement le papier et le paquet sur le muret avant de s'en allait. Pour la dernière fois de sa vie.

Lorsque Hayes arriva cinq minutes plus tard, il fut très surpris de ne pas trouver la fille qu'il aime, mais une lettre à la place. Il s'assit sur ce muret qu'il connaît bien maintenant, et pris la feuille entre ses doigts. Il ne voulait pas l'ouvrir, car il savait que tout allait changer. Les lettres sont toujours synonymes d'adieu. Et il ne voulait pas lui dire adieu. Pas à Laetï. Il l'aimait trop pour ça.

Il inspira un grand coup.

Hayes,

T'es tombé sur la mauvaise personne. Mais d'un côté c'est pas de ta faute, c'est moi. Je sais que tu me connais depuis plus longtemps que je te connais. Je sais ce que tu ressens à mon égard. Je sais tout, mais toi tu ne sais rien. Alors aujourd'hui je vais tout te dire.

On a détecté mon cancer à l'âge de 14 ans. Une leucémie, le truc bien fatale. Je sais ce que tu vas me dire, "dans ce cas pourquoi fumer, c'est ridicule!". C'est vrai. Mais j'ai toujours voulu tout contrôler dans ma vie, même ma propre mort. Je voulais pas me faire entraîner par une maladie, si je devais mourir c'est que je l'avais décidé. Alors j'ai commencé à fumer une fois, plusieurs fois, puis jusqu'à un paquet par jour, pour accélérer le processus.

Au moment même où tu lis ce mot, c'est trop tard. J'ai du me jeter d'un immeuble ou me tailler les veines, qui sait ? Seul l'avenir te le diras. Mais ne crois pas que je regrette ma vie sur Terre. Que je regrette notre petite semaine passée entre toi et moi. Que je regrette les regards que tu me lançais dans la cour. Que je regrette ta voix lorsque tu me questionnais sans cesse. C'est faux. Je ne regrette aucun moment passés avec toi, sois-en sûr. Ne m'en veux pas. Je voulais te le dire avant que l'on s'attache l'un pour l'autre, mais malheureusement je me suis habitué à toi, à ton odeur. La vérité c'est que tu étais l'inconnu que j'ai toujours connu.

Avec cette lettre tu trouveras une dernière cigarette, retournée. Tu sais, on dit que lorsqu'on laisse la dernière cigarette à l'envers et qu'on fait un voeux, il se réalisera. Je t'offre mon dernier voeux, je n'ai plus rien à espérer si ce n'est que ta vie soit plus longue et plus belle que la mienne.

Ne m'oublie pas, car moi je n'aurais jamais la force de t'oublier, Hayes.

Smoke | Hayes Grier Où les histoires vivent. Découvrez maintenant