Chapitre 3

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Allan avaittoujours était inconscient. Égoïste, intraitable, dur. Il étaitcassant, parfois presque méchant et ne cachait pas le mépris quelui inspirait les autres.

Mais il étaitseul, lui aussi.

Comme elle.

Elle étaitasocial, arrogante, avait une tendance certaine à la critique etméprisait tout ces gens qui préféraient s'enfermer dans une casepour convenir à la société plutôt qu'être eux-même.

Elle ne savait pasfranchement comment tout cela avait débuté, mais dans le fond, quelimportance ? Ils n'avaient pas grand chose en commun -si cen'était rien- et se disputaient tout le temps. Il était son patron,un banquier dur et autoritaire, exigeant et elle n'était qu'uneparmi tant d'autre. Une différente, mais il ne le savait pasvraiment. Et puis, il s'en fichait pas mal.

Allan avaittoujours était inconscient et égoïste.

-Pourquoi,demanda-t-elle, et sa voix brisa le silence qui, l'espace d'un courtinstant avait régné en maître alors qu'elle digéraitl'information.

Il la dévisagea,cherchant sur ses traits la réponse, ou s'attendant peut-être à cequ'elle lui souffle. Elle savait ce qu'il voyait. Des cheveux court,fourchés au pointe, d'un châtain des plus banal ramenés en unequeue de cheval rapide, un visage rond aux joues pleines, des yeuxbleus clairs sous des sourcils un peu trop épais, une bouchepulpeuse pincée en une ligne sévère, une peau blanche, si blanche,que, souvent, on la pensait malade.

Elle n'était pasmoche, de plus, malgré sa petite taille, elle pouvait se venter deformes voluptueuses, mais elle n'était pas belle, non plus. Du moinspas ce genre de beauté fatale qui attire l'œil à tout les coups.

Elle n'était pasle genre de brune sulfureuse aux longues jambes qui écartait lescuisses plus vite que son ombre.

-Je ne sais pas,répondit-il en toute honnêteté, tu me manques, c'est tout.

Elle ne répliquapas. Pourquoi faire ? Elle pourrait lui balancer dans la gueuleun truc du genre « je t'ai manquée pendant que tu baisaiscette pauvre fille dans ton bureau alors que je poireautais en bas, àt'attendre pour le déjeuner ? », mais ça ne ferais riende plus que remuer la merde. Ils n'étaient pas ensemble.

-Tire-toi, Allan,je suis crevée.

-Non.

-Ce n'était pasune question. Tu te casse, sombre crétin. Tu n'es pas désolé, OK,tu va recommencer, OK aussi, j'en ai strictement rien à foutre, maispour l'instant, je ne veux pas, ne peux pas te voir, cria-t-elle ens'approchant de lui, mains sur les hanches.

-Je t'aime.

Elle se figea.

Le temps s'arrêta,en stupeur, attendant, silencieux, que le monde s'écroule, à moinsque ce sentiment venait d'elle.

Il mentait. L'amource n'était pas ça. Du moins, elle l'espérait.

L'amour ne pouvaitpas être cette obsession malsaine, se besoin constant de montrer àl'autre qui est le meilleur, le besoin de l'avoir. De le soumettre.

De le blesser.

Et quand bien même,il s'agissait bien là d'amour, et pas d'un jeux pourri dans lequelils se seraient tout les deux jetés corps et âmes dans l'intentiond'oublier, ou de connaître, ou elle ne savait plus très bien, ellene voulait pas de ça.

Elle ne voulait pasd'amour.

Parce qu'onoubliait d'aimer. On oubliait toujours l'amour.

-Tire-toi,répéta-t-elle en le contournant pour s'engouffrer dans son salonafin d'attraper sa veste en jean usée qui trônait sur le canapémarron, face à l'écran plat.

Elle enfila leblouson et se précipita vers sa porte d'entrée. Il fallait qu'elles'éloigne. Elle avait besoin de marcher, d'oublier.

Mais Allan avaitune autre idée en tête.

Il lui empoigna lebras et la poussa durement contre un mur.

-Tu ne vas nulpart.

-Je t'emmerde,connard.

Il explosa d'unrire sombre, mauvais, se passa une main dans les cheveux, ramenantses mèches blondes en arrière et s'approcha d'elle, dépassantallégrement les limites de son espace vitale, collant ses hanchescontre les siennes, maintenant ses bras au dessus de sa tête.

Eva sentait sonsouffle chaud lui caressait le visage et elle se maudit d'être siréactive. De perdre le contrôle. Comme chaque fois qu'il l'atouchait.

Si c'était paspathétique, ça.

Pauvre petite filletriste qui sombrait dans les affres de l'oublie chaque fois que sonpatron la touchait. Chaque fois qu'il posait ses yeux dur et sanspitié sur elle.

Elle se faisaitpitié souvent. Et ce moment ne faisait pas exceptions à la règle.

-Je t'aime,répéta-t-il.

-Vas te fairefoutre.

La prise de sesmains sur ses poignets se resserra un peu plus et elle grimaça dedouleur.

-Je ne mens pas,insista-t-il en rivant son regard au sien.

-Tu ne sais mêmepas ce qu'est l'amour, souffla-t-elle à mi-mots.

J'aime bien ce tempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant