La conversation animée entre les deux garçons n'avait pas échappé à Mitria et Baltus qui écoutaient derrière la porte. Se regardant en apprenant la nouvelle, ils chuchotèrent l'air inquiet. Magnus qui passait par là, fronça les sourcils et leur fit signe de s'éloigner.
Ils gagnèrent les cuisines où Zonta s'afférait en compagnie de petits mitrons.
« Tu ne sais pas la dernière ? Le maître va nous quitter pour la Germanie. »
« La Germanie ?» grimaça Zonta qui se remémorait les horribles tueries dont elle avait été témoin dans son enfance.
« L'Empereur l'envoie au sein des légions d'Aétius...qu'il a bien l'air de connaître intimement , par ailleurs... » ricana Mitria goguenard en clignant de l'œil en direction de Baltus. Il fixa ensuite Yaël avec un air de défi. Le coup fit mouche. Le jeune germain indisposé quitta la pièce en croisant Magnus dans le couloir.
Ce dernier pénétra dans la cuisine dont l'atmosphère généralement joyeuse était devenue lourde. Seul l'œil amusé de Mitria dépareillait de l'assemblée.
« Qu'est-ce que tu racontes encore langue de vipère ? » hurla Magnus en direction de l'esclave perfide.
« Magnus, est-ce vrai que le maître part pour la Germanie ? » demanda timidement Zonta.
Visiblement surpris, mais se reprenant aussitôt, l'affranchi rétorqua fermement : « Les affaires du maître ne vous regardent pas ! ».
Il tourna alors les talons en ne laissant pas paraître son émotion. Il se dirigea ensuite vers la chambre du Dominus d'où il vit s'éloigner Micianus, toujours aussi exubérant, raccompagné par un serviteur. A cet instant, il croisa le regard d'Aulus qui lui demanda d'approcher.
« Où sont donc passés tous mes serviteurs Magnus ? »
« Je les ai chassé. Ils écoutaient à ta porte. Ils ont tout entendu Aulus. Et tout le monde est très inquiet.» lança-t-il un peu gêné de tant de curiosité.
« Fais moi préparer un bain au lieu de gémir comme une vieille femme et retrouve moi ces maudits esclaves ! » ordonna le jeune homme.
S'exécutant sans un mot, Magnus se retira pour aller distribuer des ordres dans la maisonnée.
Peu après, aidé de Mitria, Baltus et Yaël, les esclaves chargés de sa personne, Aulus se glissa dans la douceur d'une eau parfumée de coûteux parfums d'Orient.
Yaël lui massait le dos, Baltus lui nettoyait délicatement les pieds et Mitria lui apportait les objets de toilette.
Dans le fond de la pièce, un musicien jouait habilement de la lire accompagnant un jeune chanteur à la voix divine. La douce mélopée un peu triste invitait chacun à la rêverie.
Le maître resta muet, perdu dans ses pensées.
La soirée ne fut pas plus joyeuse. Le jeune patricien ne desserra pas les dents lors du repas familial, sa mère et sa sœur n'osant pas lui adresser la parole.
Aulus alla se coucher tôt, refusant la compagnie de Yaël ou de tout autre esclave.
Cette situation hors du commun inquiéta la mère du jeune homme qui s'en entretint à voix basse avec Magnus.
Yaël s'était allongé sur sa banquette ne pouvant fermer l'œil. Qu'allait-il devenir si le maître partait ? Sa situation privilégiée ne tarderait pas à devenir caduque. Et qui sait, si le maître ne revenait pas. On l'enverrait sans doute ailleurs ou pire on le vendrait à quelqu'un d'autre. Ce ne fut que tard dans la nuit qu'il tomba dans les bras de Morphée. Il ne fut réveillé en sursaut que par le son de la voix du Dominus qui l'appelait : « Yaël, viens... ».
Les soupirs de plaisir qui émanèrent bientôt de la chambre du jeune homme eurent tôt fait d'égayer toute la villa qui s'éveilla de bonne humeur.
Aux cuisines, Zonta plaisantait avec Baltus tout en donnant des ordres à une tripotée de petits mitrons encore tout ensommeillés.
A l'issue de leurs ébats du matin, Aulus et Yaël, les yeux dans les yeux se chuchotaient des mots doux et se complimentaient sur leurs performances respectives.
« Yaël, je ne pourrai me passer de toi. Tu m'accompagneras en Germanie. En tant qu'officier, j'aurais le droit d'avoir un serviteur. »
Le jeune germain offrit un grand sourire à l'annonce de cette nouvelle qui semblait le rassurer.
Et c'est tout joyeux qu'il s'acquitta des nombreuses tâches domestiques qui occupaient ses journées au service de son jeune maître. Les autres serviteurs s'étonnaient d'un tel comportement. Ils en comprirent rapidement la signification à l'annonce par Magnus de la nouvelle qu'il tenait du Dominus en personne.
« Je prendrais Yaël avec moi. Ta mission est finie. »
« Mais, Aulus... »
« Chut !!" murmura-t-il à voix basse..."Tu viendras aussi en Germanie, seul, et tu t'installeras discrètement dans la ville voisine. Là, peu après, tu te feras engager dans les troupes auxiliaires germaines...Ainsi, nous ne nous quitterons pas mon ami.»
Cette solution semblait ravir Magnus qui pourrait ainsi garder un œil sur son jeune protégé. Même longtemps après avoir passé la toge virile, ce dernier ne lui semblait toujours pas mûr pour gérer seul sa destinée surtout avec une famille comme la sienne.
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Le trône divin (BxB)
Fiksi SejarahLe trône divin décrit l'irresistible ascension d'un jeune et beau patricien romain. Il devra franchir quantité d'obstacles et procéder à bien des renoncements avant d'atteindre presque malgré lui les sommets de l'Empire. Sa forte attirance pour les...