Je me croyais invincible. Oui c’est ça. Invincible, dans tes bras, avec toi, tout le temps. Si tu pouvais arrêter de pleurer un moment et me regarder comme avant. En fait, ton regard pour moi est le même que celui d’il y a un an. Sauf qu’il n’y a pas cet océan de tristesse et de désespoir. Je me rappelle de chaque secondes passées avec toi, chaque nanoseconde même! Tu te rappelles, l’année dernière, dans le cours d’informatique? Te rappelles-tu lorsqu’on était l’un à côté de l’autre, et que j’étais la seule fille? Moi, je m’en rappelle… Je me rappelle à quel point j’aimais ce cours, à quel point j’aimais ma place, à quel point j’avais hâte de m’y rendre! Tu étais tellement timide! Et tu l’es encore. Un jour, j’ai respiré un grand coup et je t’ai dit la phrase que j’avais révisé autant de fois que mes notes pour un examen important : « Tu fais quoi ce soir? » Tu m’as regardé et balbutié quelque chose. Tu as regardé ton écran en disant : « Une nanoseconde, j’enregistre » Ce mot m’a marqué! Tu m’as souri, bafouillé un peu et m’as invité au cinéma. Ce soir-là, lorsque tu es venu me chercher, j’avais mis ma jolie robe pas-trop-chic-juste-assez-cute. Je ne me rappelle pas la couleur mais toi, tu t’en rappelles. On avait regardé un film d’action, je ne voulais pas t’imposer un film d’amour. À la fin, tu as posé ta main sur ma joue en me regardant directement dans les yeux. J’ai posé mes yeux sur tes lèvres et ce soir-là, j’ai vécu mon premier baiser. Qui aurais cru que le timide Jérémy aurait embrassé une fille! Moi, je me sentais comme la fille la plus heureuse du monde. Je me sentais invincible!
Les mois suivants ont été parfaits! Sauf peut-être la légère chute de mes notes due à un manque de sommeil. Ce n’était pas ma faute si tu obnubilais mes pensées! À la St-Valentin, je vis des filles super populaires rouge de jalousie devant la douzaine de roses qui m’attendait à ma place. J’avoue qu’à ce moment-là, je t’aimais pour m’avoir rendu plus jolie et désirable que ces filles. Mais je t’aimais aussi pour me regarder comme tu le fais maintenant, pour les conversations au téléphone ou l’on se parle si bas car nos parents ne le savent pas, toutes ces nanosecondes passées à tes côtés, tous ces magnifiques et délicieux sourires échangés, toutes ces roches que tu lançais sur ma fenêtre pour que je sorte en douce pour t’embrasser ou alors, quand, dans ces moments magiques, je réalise à quel point je t’adore.
Un de ces moments magiques qui me revient toujours dans la tête fut cette fin de semaine où tu m’as demandé de t’accompagner à ton chalet sur le bord du fleuve. Tes parents ont eu la gentillesse de nous prêter leurs clés. Une fin de semaine en amoureux. Cette soirée-là, nous nous étions promenés sur la plage et tu as pris un petit bâton pour écrire sur le sable. Tu dessinais des petits cœurs lorsque je pris ta main. Nous avions eu la même idée et ensemble, nous écrivions : « Gabrielle et Jérémy pour la vie » Alors que l’eau mouillait nos pieds, tu m’as regardé dans les yeux et nous nous sommes promis de toujours s’aimer. De ne jamais s’oublier. C’est avec toi, que j’ai vécu mon premier baiser. C’est avec toi que j’ai eu ma « première fois ». C’est avec toi que j’ai connu le vrai amour pour la première fois. Et j’espère que tu sais, que tu étais, est et sera toujours, mon seul et unique amour.
Il y a quelque mois, je virevoltais dans ma chambre, le poème que tu m’avais donné collé sur le cœur, lorsque j’eus un premier étourdissement. Sur le coup, je me suis dit en rigolant que ce n’était que l’amour! Puis, en sortant de ma chambre pour aller souper, je vis mon reflet dans le miroir. Mon visage était étrangement pâle sous mes cheveux blonds cendrés. Je me suis arrêtée pour me demander pourquoi étais-je si blafarde lorsqu’une soudaine fatigue me tomba dessus. Je vis mon reflet froncer les sourcils et ma vision se troubla.
Je me suis réveillé dans l’ambulance, ma mère tenant ma main serré contre sa poitrine. Tout était flou, mais des bribes de conversation me revenaient. J’avais une rechute. À l’hôpital, les gens me regardaient avec pitié. Je ne suis pas un animal pourtant! Quand tu es arrivé, le monde a arrêté de tourner. Tu m’as regardé comme si ton cœur avait cessé de battre. C’est à ce moment-là que j’ai craqué. C’est à ce moment-là, lorsque je vis la panique et la peur dans tes beaux yeux bleus, ordinairement si calmes et si doux, que mon cœur se déchira! Moi qui me sentais si forte à tes côtés, me voilà en larmes. Dans tes bras, pour la première fois, tu m’as vu pleurer. Les semaines se sont écoulées lentes et douloureuses. Tu venais tous les soirs pour me voir. Te voir souffrir autant que moi était difficile. Ça fait toujours aussi mal. Aussi mal que ce fichu cancer. Tu me remontais le moral, tu me disais de garder espoir. Il y a deux semaines, j’ai demandé de quitter l’hôpital pour pouvoir disparaître de ce monde dans ma maison. On pourrait croire que je pars, sans laisser de traces de mon existence sur cette planète, mais j’espère que j’en ai laissé une. Une marqué au fer rouge dans ton cœur.
Nous y voilà. Mes dernières minutes. Je me sentais invincible, mais voilà que je suis tombée de haut. De très, très haut. Nous pleurons tous les deux. Mon oreiller est trempé. Je ne veux pas te quitter. Je souffre tellement. J'ai mal pour toi. Tu m'as aimé, tu m'aimes encore. C'est pourquoi, ce soir alors que tu poses sur mes lèvres un dernier baiser, je te murmure ces mots tellement désirés.
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Invincible
Short StoryLa courte histoire de Gabrielle et Jérémy. Pour lui, son premier amour. Pour elle, son dernier.