27. Prise au piège

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Je m'étais mise à faire les cent pas ne sachant pas quoi faire d'autres, incapable de me détendre, encore moins de fixer mon attention sur autre chose que la porte d'entrée. Me torturant l'esprit, je me demandais s'il ne valait pas mieux que je rebrousse chemin afin d'aller voir par moi-même ce qui se passait là-bas.

Le fait est que j'avais abandonné Noah et cette pensée me rendait malade...

Au final, plusieurs heures s'écoulèrent ainsi, oscillant entre espoir et désespoir jusqu'à ce que je commence à la sentir. Fugace au départ, elle prenait rapidement de l'ampleur. Cette présence que je ne connaissais pas, légèrement différente de celles dont j'avais l'habitude, m'avait glacé le sang à la seconde où je l'avais perçue. Dans ces circonstances, il était difficile de croire au hasard et je savais que ce dissocié était là pour moi... Je m'interrogeais sur la manière dont il avait fait pour me retrouver alors que Noah et moi nous étions bien gardés de dévoiler quoi que ce soit. Cela ne pouvait signifier que deux choses. Soit, il possédait également un sixième développé soit, mais je refusais d'y penser, Noah le lui avait révélé sous la contrainte...

Totalement paniquée, je me demandais ce qu'il était judicieux de faire et songea que probablement tout allait se terminer ici. Mon regard fit le tour de la pièce, alors que je me remémorais chaque détail de notre arrivée entre ces murs et du temps que nous y avions passé dans les bras l'un de l'autre... Est-ce que j'allais payer le fait d'appartenir à une nouvelle génération et avoir voulu dire au revoir à mon passé ?

En fin de compte, je décidais d'attendre, et faire face à ce qui allait se produire, peu importe ce que cela allait être. De toute manière, je n'avais pas réellement d'autres options... Je me mis à penser à Noah et au peu de temps que nous avions eu ensemble, à l'amour inconditionnel que j'éprouvais pour lui et à la reconnaissance que je ressentais pour tout ce qu'il avait fait pour moi ! Je n'avais qu'un seul regret : ne pas lui avoir dit à quel point il comptait pour moi. Je songeais aussi à mon père et au bonheur que cela avait été de vivre à ses côtés malgré les moments difficiles.

Puis, la sensation fut si nette que j'eus la quasi-certitude que l'individu se trouvait à présent tout proche. Pendant un instant, le silence continua de régner, jusqu'à ce que je vis la poignée de la porte s'abaisser lentement. Mais celle-ci ne s'ouvrit pas, car j'avais pris soin de la verrouiller à mon arrivée. Totalement pétrifiée, je fixais la porte sans oser respirer, de peur d'émettre un son. Ensuite, il y eut un bruit sourd et elle trembla, en même temps que je sursautai et faillis tomber sur le lit derrière moi. Ce dissocié essayait de rentrer de force et la serrure n'allait pas tarder à céder !

Au moment de mon arrivée, le parking était désert et la chambre que j'avais prise se trouvait être la plus éloignée de la réception. Comble de l'ironie, la veille, Noah et moi l'avions préférée aux autres justement pour cela ! Je savais que personne ne viendrait m'aider et que personne n'entendrait les cris que je pousserais au moment où ma gorge se dénouerait.

Un nouveau coup résonna dans le même temps que la porte s'ouvrait en grand et allait s'écraser avec fracas contre le mur. D'un seul coup, le soleil inonda la pièce m'éblouissant par la même occasion. Dès que mes yeux se furent acclimatés, j'aperçus un homme dans l'embrasure de la porte. Grand, imposant, vêtu d'un costume noir semblable à ceux que portaient les individus de ce matin, il restait sans bouger. Figée, j'attendais la suite qui n'allait sans doute pas tarder à arriver. L'homme finit par s'avancer sans rien dire, le visage totalement impassible. Je sentais le bois du lit derrière moi s'enfoncer dans la chair de mes jambes alors que j'essayai en vain de reculer davantage. J'avais le désagréable sentiment d'être prise au piège, comme un animal traqué, esseulé.

- Sais-tu pourquoi je suis ici ?

La surprise dut remplacer une seconde la crainte sur mon visage. Je n'avais pas imaginé un seul instant que cet homme puisse m'adresser la parole. Étrangement, j'étais même surprise qu'il parle, comme si je ne voyais en lui qu'une bête... Je m'interrogeai ensuite très vite sur le sens de sa question et si je devais y répondre. Peut-être n'avait-elle pour but unique que de me faire peur, peut-être attendait-il de moi que j'avoue mes fautes avant de disparaître.

J'ouvris la bouche, mais la referma aussitôt, incapable de prononcer un mot.

Il patientait immobile, tout en me regardant d'un air étrange puis repris :

- Mon nom est Nathan.

Mais pourquoi donc prenait-il la peine de se présenter? Tout ceci n'avait aucun sens et ne faisait que rajouter à ma confusion. Constatant qu'il semblait vouloir m'accorder un peu de temps, je pris deux minutes pour le détailler. Malgré son costume, je savais qu'il ne faisait pas partie des individus présents dans la ruelle, son aura était différente, mais il était évident qu'il faisait partie du Conseil. Grand, la mâchoire carrée, les cheveux foncés, coupés courts, il avait la peau hâlée. Je pouvais voir son regard sombre posé sur moi, alors que lui aussi m'observait.

Je crois que c'est en cet instant que je pris réellement conscience que j'étais rentrée dans une communauté dont je n'avais pas mesuré l'importance de ses lois. J'avais cru pouvoir agir comme je voulais, mais ce n'était pas comme ça que les choses se passaient...

- Il faut que tu partes loin d'ici sans tarder.

Je fus tirée d'un seul coup de mes réflexions et la surprise de ce que je venais d'entendre fut telle que pendant une fraction de seconde j'eus l'impression que mon cerveau l'avait inventé. Se pouvait-il qu'il ne soit pas venu ici pour m'éliminer finalement, m'interrogeais-je en fronçant les sourcils, un infime espoir naissant au fond de moi-même.

Il ne bougeait pas, semblant attendre une réaction de ma part. Son regard paraissait tout d'un coup moins dur et quelque chose dans son attitude changea imperceptiblement sans que je sache précisément quoi. Je ne savais pas quoi penser ni comment réagir alors que nous continuions à nous jauger. Puis, nullement gêné par mon silence, il finit par baisser les yeux.

- Je ne peux pas me résoudre à m'occuper de toi.

Évidemment, je savais exactement ce qu'il entendait par là et sentis des frissons d'horreur parcourir mon dos, mais je ne fis aucun geste. C'est lui qui se déplaça le premier, en faisant un pas de plus et refermant la porte derrière lui. Il prit place sur la chaise près de l'entrée et se prit la tête dans les mains sous mon regard incrédule. Il était bien venu jusqu'ici pour m'éliminer, je venais d'en avoir la confirmation, mais alors que signifiait son changement d'attitude alors que je n'avais pas encore prononcé une seule parole ?

Tout a changé ce jour là!Où les histoires vivent. Découvrez maintenant