Tout a changé ce jour là!

35. Ne plus être seule

Comme il était agréable de ne plus se sentir seule, même si Nathan mettait tout en œuvre pour se faire le plus discret possible. Il pouvait se passer des heures sans que je l'aperçoive, mais je savais qu'il était dans les parages et le fait est, que cela changeait tout ! Je prenais conscience de la solitude dans laquelle je m'étais retrouvée ces derniers jours à présent qu'il était là.
Cela faisait déjà plusieurs jours qu'il avait franchi la porte de la cabane. Nous n'avions que très peu parlé depuis son arrivée. Je passais mes nuits près du feu alors qu'il restait dehors et lorsque je sortais il faisait en sorte de ne pas être dans mon champ de vision. Je voyais à quel point il faisait de son mieux pour s'imposer le moins possible, et même si j'avais trouvé cela attentionné au départ, je commençais sérieusement à regretter qu'il ne soit pas plus présent, car j'avais une furieuse envie de compagnie !
Je me répétais tous les jours combien j'avais eu raison de lui faire confiance, j'en oubliais même qu'il ait pu se situer du mauvais côté de la barrière à présent et qu'il ait eu à un moment donné pour mission de m'éliminer. Je me sentais totalement détendue face à sa présence. Malgré le fait que nous ne nous parlions pas, je sentais qu'une certaine complicité naissait entre nous probablement parce que nous vivions la même chose.
Il avait beau demeurer en dehors de ma vue, à chaque fois que je m'éloignais de la cabane, je sentais sa présence toute proche. Il restait bien évidemment en retrait, mais me suivait systématiquement. Et cette fois-ci ne dérogea pas à la règle, mais après avoir pris la direction de la rivière pour aller y chercher de l'eau je décidai de m'arrêter. Je dis à voix haute sans pour autant crier comme si je m'adressais à la forêt :
- C'est bon, je sais que tu es là ! Viens, autant que tu m'accompagnes !
Il y eut un silence, puis rapidement je l'entendis approcher dans mon dos.
- Je ne voulais pas te déranger, me dit-il en arrivant, mal à l'aise.
- Tu ne me déranges pas.
Je lui souris alors qu'il arrivait à ma hauteur.
- C'est juste que si c'est pour me suivre autant qu'on fasse le chemin ensemble !
Je me remis en route sans rien ajouter en espérant qu'il m'emboite le pas. Ce qu'il fit !
- Excuse-moi, c'est juste que je ne voulais pas qu'il t'arrive quelque chose...
J'étais touchée par sa bienveillance, même si je ne risquais à priori pas grand-chose. Je ne cherchai pas à comprendre pour quelle raison il tenait à cœur de me protéger autant, j'avais juste envie de savourer sa compagnie.
Nous marchâmes sans rien dire. Il était quelque peu étrange de me retrouver en sa présence, car nous nous connaissions à peine, mais je me sentais bien avec lui. Je me demandais même si cet état était en lien avec les générations et si ce lien existait donc entre Noah et nos amis. Est-ce que Nathan le ressentait lui aussi vis-à-vis de moi? Mais je me gardai de lui poser la question.
Une fois à la rivière, je lui indiquai le lieu idéal pour approcher de l'eau, l'endroit où j'avais pris l'habitude de remplir mes bouteilles et de me laver. Sans rien dire, il me les prit des mains et se chargea d'aller les remplir. Il revint ensuite, une bouteille dans chaque main.
- Tu veux qu'on reste un moment ?
Il me souriait et sa bonne humeur faisait plaisir à voir. Lui rendant son sourire, je m'empressais de hocher la tête par l'affirmative.
C'est ainsi que petit à petit nous commençâmes à nous parler et à mieux nous connaître. Nathan était agréable, charmant et d'excellente compagnie. J'avais d'ailleurs de la peine à croire qu'il eut pu un jour prendre part à l'élimination de notre génération. Il n'avait pas grand-chose à voir avec ce que l'on pourrait qualifier de brute, au contraire, il était plutôt calme, posé et cultivé. Il m'avait rapidement expliqué qu'il n'avait jamais participé directement à la liquidation d'un dissocié, qu'il n'avait été là que pour du "repérage". Que bien entendu cela ne faisait pas de lui un innocent, mais qu'il espérait que cela fit une différence. J'avais été soulagée de l'apprendre et oui cela faisait une différence pour moi. De toute façon, depuis qu'il avait pris la décision de me protéger, il avait en quelque sorte gagné grâce à mes yeux. Je souhaitais oublier son passé peu glorieux et le juger pour ce qu'il voulait devenir! Il était clair que mon opinion avait de l'importance pour lui et à la suite de cette confession je remarquai qu'il était plus à l'aise.
Je lui avais vaguement parlé de mon désir de quitter cet endroit au plus vite, sans toutefois entrer dans les détails sur ce que je voulais entreprendre étant donné que je ne le savais pas moi-même. Mais à force de persuasion, il m'avait fait promettre de rester encore un peu, prétextant que le Conseil devait être sur le qui-vive depuis sa fuite. Je m'étais dit qu'il devait sans doute avoir raison et ressentant tellement de craintes face à ce qui m'attendait je m'étais laissé convaincre de rester encore un peu...