Chapitre 5 - Peeter

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Dès que Myla disparaît du champ de l'hologramme, Miles se penche pour éteindre la projection. Je le foudroie du regard et m'apprête à rallumer mon bracelet, lorsqu'il me saisit le poignet.

-Ne fais pas ça, m'intime-t-il. Tu n'as pas besoin de regarder ça.

-Je veux savoir ce qu'il va faire, je proteste. Ce qu'il va lui dire.

Miles me lâche et soupire, passant sa main sur son visage fatigué.

-Et qu'est-ce que tu pourras faire ? Rien. Soit il décide de la manipuler à son avantage ou de lui faire du mal. Soit il va essayer de se souvenir qu'ils étaient amis et la protéger. Tu n'aimeras aucune de ces deux solutions. Alors pourquoi te faire du mal inutilement ?

Son regard dérive vers l'orée de la forêt devant laquelle nous sommes garés depuis une demi-heure. Nous attendons un signe de la Résistance. La dernière planque qu'ils avaient dans la caravane n'est plus aussi sûre, maintenant que la Milice connaît son emplacement.

Les sapins se balancent doucement au gré du vent, et des morceaux de neige tombent parfois de leurs branches. La lumière décline et bientôt, nous serons de nouveau plongés dans le noir. Et je devrais affronter une nouvelle nuit sans Faustine à mes côtés.

-J'ai besoin de la voir, je maugrée, sans pour autant rallumer l'hologramme.

Miles vérifie que notre otage est toujours inconscient à l'arrière et s'étire comme il peut pour soulager ses membres engourdis. J'aurais bien envie de sortir faire un tour moi-aussi, mais il vaut mieux rester discret tant que la nuit n'est pas tombée. Pour l'instant, les vitres fumées et la plaque du Gouverneur à l'avant nous a permis de passer inaperçus. Mais ce n'est qu'une question de temps avant que Jay soit recherché, et sa voiture nous trahira.

-Je sais ce que tu ressens, finis par murmurer Miles en regardant au loin.

-Vraiment ?

Je ne dis pas ça d'un ton ironique. Je n'essaie pas même pas d'être condescendant. J'oublie parfois que Miles a connu une situation similaire. Je me demande s'il pense à Maggie aussi souvent que je pense à Faustine.

-Quand j'ai pris la décision de laisser Henry prendre ma place, je passais quand même du temps avec Maggie. A l'époque, les Uniques n'étaient pas aussi séparés du reste du monde que maintenant. Tant que mes supérieurs savaient où j'allais et que je rentrais avant le couvre-feu, je pouvais sortir. Et je pensais que ce serait plus facile si nous restions proches, avec Maggie. Alors je lui rendais visite aussi souvent que possible. On s'aimait, après tout. Même si nous avions décidé que notre cause était plus importante. Mais j'ai rapidement compris que c'était trop difficile de la voir. Et la voir jouer le grand amour en public avec mon meilleur ami devenait insupportable. Alors j'ai arrêté de les voir.

Il pousse un long soupir à l'évocation de ces souvenirs.

-C'était... C'était plus facile ? De ne pas les voir ensemble ?

Il se tourne vers moi et je jurerais que ses yeux brillent de tristesse. Je vois bien qu'il tente de rester aussi impassible que possible, comme sa fille. Mais cette fois, l'émotion est trop forte pour qu'il prétende le contraire.

Une part de moi repense au fait que Faustine n'est pas au courant pour Miles. Qu'elle pourrait ne jamais l'être. Au final, je ne suis pas le seul à souffrir de cette situation.

-Pas au début, avoue-t-il. Parce qu'ils me manquaient énormément tous les deux. J'ai voulu céder et retourner les voir un nombre incalculables de fois. Je me persuadais que je pourrais tout supporter juste pour prendre Maggie dans mes bras. Pour rire une dernière fois avec Henry autour d'une bière et débattre du monde dans lequel nous vivons.

- Unique - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant