Chapitre 1 -

17 4 0
                                    

J'émergeai petit à petit de ma longue nuit de sommeil. L'odeur des petits pains qui se glissait dans mes narines me fit me rappeler que l'on était dimanche. Et comme tous les premiers dimanches du mois, ma petite sœur et moi avions "le droit" à un petit quelque chose à manger le matin. Et pas rien, des petit pains avec du lait ! Le premier dimanche du mois, le quartier pauvre peut passer à la boulangerie sans dépenser aucun sou. C'est un jour que j'adore ! Je me levai et descendis de la botte de foin qui servait de lit, à moi et ma sœur. Ma mère, elle dormait sur une vieille couette usée. Une table était posée en plein milieu de la pièce où nous dormons, et dessus, trois petits pains. J'en pris un et me dirigeai dans ce que l'on pouvait appeler une salle de bains. Dedans, un petit creux rempli d'eau nous servais de « douche » ainsi qu'une bassine jaune en guise de lavabo et un petit morceau de miroir accroché au mur à l'aide de quelques maigres clous. Je passai ma main dans mes long cheveux blonds pour les brosser puis les attachai en tresse qui descendait jusqu'au bas de mon dos. Je regardais le reflet de mes yeux bleus dans le miroir. J'enlevai ce t-shirt qui faisait deux fois ma taille et qui me servait de pyjama et le remplaçais par un T-shirt noir avec encore quelques traces de boue d'il y a deux semaines et un jean légèrement troué au niveau des genoux.

- Joyeux anniversaire Éoine !
Ma petite sœur m'avait fait sursauter. Oui, je l'avais presque oublié, aujourd'hui j'avais quinze ans. Ma mère avait, dans les mains, un gâteau au chocolat qu'elle avait sûrement dû prendre à la boulangerie.
- Bon anniversaire, ma puce, dit ma mère d'une voix douce en m'embrassant sur le front.
Je pris ma petite sœur dans les bras et m'assis sur la petite table ou maman avait posé le gâteau.
- Éoine, elle a de la chance d'avoir son gâteau parce que c'est le premier dimanche du moiiis ! cria ma petite sœur.
- Je te garderais la moitié pour ton anniversaire, lui dis-je en lui ébouriffant les cheveux.
- Alice, veux-tu couper le gâteau ? proposa maman avec un petit couteau à bout rond dans la main.
Alice était le prénom de ma sœur. Elle lui prit le couteau des mains, coupa un très gros morceau de gâteau et me le tendit.
- Pour toiii !
Je le pris et m'apprêtai à le manger mais je fus interrompue. Le vieux téléphone qui nichait en haut du placard, et qui ne sonnait jamais, sonna. Je pris une chaise, monta dessus et attrapa la téléphone en manquant de tomber. À l'appareil, une voie grave et rauque.
- Éoine Azure ?
- Oui, que me voulez-vous ?
- Vous êtes attendue au quartier général à onze heures précises. Un conseil, ne soyez pas en retard.
Biiip.

Je fus surprise par la brutalité et la vitesse de l'appel. Je posais le téléphone et descendis de la chaise.

- Qui t'as appelé ? me demanda Alice pleine d'enthousiasme.
Je haussai les épaules.
- J'ai rendez-vous à onze heures au quartier général et je ne dois pas être en retard.
Maman se figea. Comme si elle avait vu un fantôme.
- Maman ? Quelque chose ne va pas ?
Elle ne me répondit pas. Au lieu de ça, elle regarda la pendule.
- Prends une veste et dis adieu à ta sœur.
- Adieu ? dis-je en pouffant mais en manquant de m'étouffer.
- Tu ne la reverras pas.
- Mais...
- Fais ce que je te dis, me dit-elle d'une voie sinistre.
Je pris ma sœur dans les bras, l'embrassa sur sa joue toute rose et lui chuchota :
« N'écoute pas maman, elle rigole, je te promets de revenir très vite », tout en lui caressant ses cheveux bouclés, châtains.
Elle me fit plein de bisous et je la reposa.
- Je te le promets, Alice, je reviendrais. Je serais même peut-être là ce soir !
Elle me dit au revoir de la main puis ma mère me poussa dehors comme pour vite mettre fin à cet adieu.
Nous avions vingt minutes de marche. Je pus en profiter pour lui poser les questions qui me troublaient l'esprit.
- Maman, tu sais ce qu'il va se passer, je l'ai vu dans ton regard. Pourquoi as-tu si peur ? Que va-t-il m'arriver ? Pourquoi m'as-tu demandé de dire adieu à Alice ? Répond-moi, s'il te plaît !
- Nous sommes en retard, dépêche-toi, répondit-elle pour éviter le sujet.
- C'est tout ce que tu peux dire ? Pourquoi ne me dis-tu pas la vérité ?
Elle ne dit rien mais lorsque je la regardai, je vis des larmes couler sur ses joues. Je préférais me taire jusqu'à la fin du voyage.
Arrivées devant le quartier général, ma mère s'accroupit devant moi et me serra fort contre elle tout en me chuchotant :
« Ne fais confiance à personne, suis les ordres et éloignes-toi du danger, là, peut-être tu t'en sortiras... N'oublie pas, je t'aime de tout mon cœur. »

Je n'eus même pas le temps de lui répondre, de lui dire au revoir. Ses yeux remplis de tristesse et les gouttes de ses joues furent les dernières choses que je vis. Je sentis une aiguille entrer dans mon épaule et puis plus rien.
Le vide total...

Shadow WitchOù les histoires vivent. Découvrez maintenant