Chapitre 13 - Peeter

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De ma vie, je n'ai jamais roulé aussi vite.

A plusieurs reprises, la moto dérape et manque de nous propulser contre le bitume. Nous n'avons ni casque, ni blouson et une chute à cette vitesse ne manquerait pas de nous tuer. La vibration du moteur se répercute dans tout mon corps et pendant quelques instants, je me sens invincible.

L'adrénaline court dans mes veines tandis que le vent s'engouffre dans mes cheveux et déforme mon visage. C'est à la fois grisant et terrifiant comme sensation.

Des voitures de la Résistance ont tenté de nous suivre mais nous les avons vite semées. Nous sommes plus rapides et plus à même de couper à travers bois si nécessaire. Aucun de nous n'a été blessé, ce qui est presque un miracle en soi. Il était temps que la chance soit un peu de notre côté.

Je n'ai pas demandé à Mile où nous allons, mais je suis quasiment sûr que nous allons chercher Faustine. Rien qu'à cette idée, une bouffée d'espoir m'envahit et me fait tourner la tête.

Cela dit, nous sommes à moto et nous ne pouvons pas prendre un troisième passager. De plus, nous sommes complètement reconnaissables sans rien pour cacher notre visage, et le bruit de la moto risque d'attirer l'attention sur nous.

Sans parler du fait que nous n'avons aucun plan.

Je tape sur l'épaule de Miles pour qu'il ralentisse et s'arrête. Il faut que l'on discute avant d'aller plus loin pour décider de ce que nous allons faire.

La moto ralentit et il se gare sur le bas-côté. La route est déserte, silencieuse. Autour de nous, il n'y a rien. Cela fait bien longtemps que nous avons quitté la forêt pour traverser des champs, à perte de vue.

-Ca faisait longtemps que je n'avais pas conduit un engin pareil ! s'exclame Miles, ravi.

Je descends de la moto pour me dégourdir les jambes et Miles m'imite.

-Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? je demande, impatient.

-On va chercher Faustine. Ce n'est qu'une question de temps avant que la Résistance prévienne Myla de ce qu'il s'est passé au camp. Elle s'empressera de lui enlever son bracelet et probablement de la faire changer d'endroit. Après tout, Myla a les deux camps de son côté, elle peut décider ce qu'elle veut.

-D'accord, mais on va faire comment ? Nous n'avons pas de voiture, pas d'armes, pas de plan.

Miles m'étudie un moment, avec un regard amusé.

-Depuis quand avons-nous besoin d'un plan ?

Faustine a toujours un plan de prévu. Je ne sais pas comment fonctionne son cerveau pour réfléchir rapidement à une situation et trouver une solution dans la foulée. Bon ou mauvais, ses plans nous donnent toujours une directive à suivre.

-On va s'approcher du Secteur 9, prendre une voiture, se pointer là-bas, récupérer Faustine et partir le plus loin possible. Ça te va ?

-Génial, je grommelle. Et on la trouve où cette voiture ?

-On pourra prendre celle de Maggie.

-Non, elle m'a déjà donné sa voiture pour te retrouver. Et nous sommes repartis sans.

-Alors on en volera une. Allez, en selle, on perd du temps là.

Il me fait un clin d'œil mais je ne suis pas d'humeur à plaisanter.

Plus le temps passe, plus je m'inquiète du fait que Faustine pourrait ne pas me reconnaître. Ne pas se souvenir de moi. La simple idée que je sois redevenue un étranger pour elle me serre le cœur. Je suis fatigué de toutes ces histoires, ces ascenseurs émotionnels, ces dangers et ces inquiétudes.

Une semaine.

C'est à peine le temps qui s'est écoulé depuis que nous avons quitté la maison dans les bois, dans le Secteur Zéro où nous étions ensemble, en sécurité, et heureux. Nous n'aurions jamais dû partir de là-bas.

Je ne me rends même plus compte du temps qui passe. Les médias parlent-ils toujours de nous ? Ont-ils retransmis la Révélation de Faustine ? Et pour dire quoi au juste ?

J'aimerais en savoir plus. Et en même temps, j'aimerais ne plus jamais rien entendre qui ait rapport avec la Résistance ou le Gouvernement.

Une nuit.

C'est le temps qu'il nous a fallu pour nous mettre les deux camps à dos.

Plus que jamais, nous sommes seuls. Tour à tour, nous avons été embarqués dans leurs luttes, leurs intrigues et leurs pièges. Nous n'avons été que des pions depuis le début. Même pour Henry, Zidler ou Jérémy.

Si je m'étais rendu compte de ça plus tôt, je n'aurais jamais accepté de faire la vidéo. Faustine avait raison depuis le début. Si je l'avais écouté, je n'aurais pas bêtement menacé le Gouverneur et rien de tout ceci ne serait jamais arrivé.

Mon esprit gamberge et je ne me rends pas compte que nous avons déjà atteint notre Secteur. Ce n'est que lorsque Miles coupe le moteur que je sors de ma transe.

Nous descendons sur véhicule et je suis Miles qui s'approche d'une voiture aux vitres teintées. En quelques secondes, il réussit à déverrouiller la portière et s'engouffre à l'intérieur. Je m'empresse de contourner le véhicule et de prendre place côté passager.

Je remarque qu'une femme a remarqué notre manège au bout de la rue. Elle ne bouge pas et nous regarde fixement. J'ai beau savoir que les vitres sont teintées, j'ai l'impression qu'elle arrive à me voir au travers.

Miles démarre sans que j'ai le temps de dire quoique ce soit et je vérifie que la femme ne fait rien jusqu'à ce qu'elle disparaisse de mon champ de vision.

La tension est presque palpable dans la voiture. Nous restons silencieux, concentrés sur notre mission. Enfin, pour ma part, j'appréhende surtout ma retrouvaille avec Faustine.

En quelques minutes, nous arrivons devant la maison que j'ai vu sur l'hologramme. Miles se gare un peu plus loin et coupe le moteur. Le silence soudain fait vibrer mes oreilles alors que mon cœur tambourine contre ma poitrine.

Je m'apprête à sortir de la voiture pour en finir le plus vite possible, mais Miles me retient par le bras.

-Attends, on ne va pas se précipiter là-dedans sans savoir à quoi s'attendre.

-Depuis quand on a besoin d'un plan ? je raille.

Il rit et j'arrive enfin à me décoincer suffisamment pour sourire.

-Allume ton bracelet, pour commencer.

Je m'exécute. L'image met plus de temps que d'habitude à s'allumer. Mais Faustine finit par apparaître, puis Jake et Myla. Ils sont tous les trois dans le salon. Faustine est recroquevillée sur le canapé et semble être redevenue celle qu'elle était sur scène : fragile et apeurée. J'ai mal, rien qu'en la regardant.

-Ok, éteins-le. J'ai l'impression que ta batterie arrive à bout.

J'obéis à contrecœur.

-Ils sont trois à l'intérieur. Faustine n'opposera pas de résistance dans l'état où elle est, même si elle ne nous reconnaît pas. Le problème, ce sont les deux autres.

-Je peux m'occuper de Jake, je siffle entre mes dents.

-Certainement p...

Miles s'arrête, comme figé. Il fixe un point devant lui et blêmit. Je suis son regard et découvre qu'une voiture vient de se garer dans l'allée de la maison. Une femme brune, aux cheveux courts et à la démarche lutine en descends.

May.

- Unique - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant