Chapitre 2

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                                2.

J'entrai dans mon appartement et fus surprise par la froideur des lieux. Un courent d'air frais me fit même frissonner. Ça me semblait plus lugubre aussi. Je me pressai de me débarrasser de ma veste que je pendis au crochet à côté de la porte. Je déposais mon sac à l'entrée et me dirigeais vers la cuisine où j'allumais le chauffage tout en me frottant énergiquement les bras. Je sortis une tasse de l'armoire et allumai la bouilloire, un bon thé ne me ferait pas de mal. J'évitais de penser à ce mauvais pressentiment quand j'étais entrée. Dans une boite cuivrée décorée de motifs floraux sur la table se trouvait mes petits sachets de thé. Je me saisis d'un et le laissai glisser dans la tasse. Sans le remarquer, je commençais à fredonner une mélodie. Lorsque la bouilloire sonna, annonçant l'eau chaude, je m'arrêtai subitement. J'avais cru entendre un autre bruit. Je me traitais de folle intérieurement, ce n'était sûrement que ma bouilloire ! Je versais l'eau chaude dans ma tasse et touillais avec une cuillère pour faire infuser le parfum plus rapidement. Une délicieuse odeurs de fruits rouges emplis mes narines. J'inspirai profondément et me relaxai aussitôt.

Ma tasse à la main j'entrais dans ma chambre. Un cri d'effroi s'étrangla dans ma gorge et je lâchai ma tasse. Elle s'écrasa sur le sol dans un fracas de verre brisé et le thé se répandit comme une traîné de poudre sur le sol de ma chambre. Ma bouche demeurait ouverte mais toutefois muette tandis que mes yeux s'écarquillaient.
C'était l'homme, l'homme en noir ! J'en étais sûre, tout de noir vêtu il m'observait de ces petits yeux brillants dans la pénombre ambiante. La fenêtre était effectivement ouverte, d'où le courant d'air qui m'avait fait frissonné à mon arrivée.
Lorsque ma voix me revint se fut pour lâcher un hoquet de surprise car, l'homme, agile comme un chat, plaqua une main ferme sur ma bouche. Je me débâtis, en vain.
- Arrête de bouger !
Mes pensées se chamboulaient et la première chose qui me vint à l'esprit fut que je m'étais trompée, c'était une femme. Cela m'étonna un peu au vu de sa carrure. La seconde fut l'étonnement qu'il - ou elle apparemment - aie osé me tutoyer et, enfin, la troisième fut que je devais absolument prévenir la police ou alerter quelqu'un. C'est à cause ou plutôt grâce à cette troisième idée que j'essayais, comme dans les films lors des combats, de mordre les doigts de mon adversaire. Malheureusement je n'était pas très douée et mon coup rata mais je lui fit quand même un peu mal vu qu'elle geignit et que son étreinte se desserra quelque peu. Je profitai de ce moment pour écarter ses bras, courir vers la porte de mon appartement, prendre mon sac et sortir. Je fermai aussitôt la porte à clef. Mon souffle rapide indiquait ma peur et je tentais de ma clamer, accolée à la porte. Je plaquai mon oreille contre le battant mais aucun bruit dans l'appartement ne me parvint. Je pris une grande inspiration et sortis mon téléphone de mon sac. Fébrilement je composais le numéro de la police qui ne tarda pas à répondre et à venir rapidement tout en fanfare. Très discret, pensais-je amèrement. Je n'avais pas bougé et demeurais toujours sur le parvis lorsqu'ils entrèrent.

- Il n'y a personne ici mademoiselle Rayn. Comment expliquez-vous cela ?
Le policier qui me posait la question était arrogant et ne croyait pas un mot de ce que je lui racontais ! Mais c'est vrai qu'il y avait de quoi hésiter. Rien d'anormal dans la maison. Rien de casser. Pas de fenêtre ouverte. Aucun de mes voisins avaient entendu quelque chose, en même temps je n'avais pas crié. Rien, rien, rien ! À croire que j'avais rêvé ! Mais j'étais sure que non. Le pire dans tout ça c'est que même ma tasse ne gisait plus au sol. Mon thé avait disparu comme par enchantement et la tasse se trouvait sur la table de la cuisine. C'était à ne rien comprendre ! Je n'avais donc aucun moyen de lui prouver mes dires. J'abandonnais, haussant donc mes épaules en signe d'incompréhension. Il partit tout en ajoutant :
- Ne nous dérangez plus si vous faites un cauchemar mademoiselle Rayn !
Je me retins de lui donner une baffe. Mais pour qui se prenait-il ? J'oubliais vite cette arrogance lorsque j'entendis le souffle tant attendu de Maya. Ses yeux noirs ébènes inquiets me regardaient tandis qu'elle montait les escaliers quatre à quatre.
- Ça va ? Que s'est-il passé ? ce fut les seules questions qu'elle pu me poser tant elle avait couru. Elle était essoufflée. Je l'avais prévenue de ce qui m'était arrivée dans les grosses lignes et elle avait du battre son record de vitesse pour venir me rejoindre. J'étais fière d'elle mais j'étais presque plus inquiète qu'elle, aussi tentais-je de la calmer.
- Inspire, expire, inspire, expire.
Une fois que sa respiration redevint régulière, je la fis entrer et l'installai sur mon lit. Elle resta là un instant, le temps que je prépare un Boléro, notre thé adoré avec deux nouvelles tasses, je n'osais plus toucher à la précédente que j'avais donc laissée sur la table.
Lorsque la bouilloire électrique sonna je me vidai complètement l'esprit et apportai le thé à mon amie.
Je lui racontais tout ce qui c'était déroulé après être sortie de l'école.
- Et ils n'ont pas voulu te croire ?
Ça devait être la vingtième fois qu'elle me posait cette question.
- Non, répondis-je, lassée.
- Mais ce n'est pas possible ! Tu dis la vérité, tu as eu la peur de ta vie ! Ça se voit au moindre coup d'œil.
Ça y est. Elle avait repris son éternelle habitude à s'énerver et à crier partout sans rien comprendre.
- Calme-toi Maya ! m'exclamai-je, ce n'est pas grave.
- Pas grave ?! Et si ce, cette folle revenait ? Hein ? Tu ferais quoi ?!
- Maya ! Il ne m'arrivera rien !
Mon ton autoritaire fit l'effet que j'escomptais, mon amie se calma immédiatement.
- Désolée.
- Non c'est moi , répondit-elle.
Elle se leva et alla examiner la tasse reposant comme un trophée au milieu de ma cuisine sans, comme moi, avoir le courage de la toucher.
- Elle est comme neuve ! C'est vraiment dingue, lâcha-t-elle.
J'hochais la tête, désemparée. Elle remarqua mon embarras devant ce fait incroyable que j'attendais pourtant énormément, ça a toujours été mon rêve d'avoir un peu de magie dans cette vie morne qu'était la mienne mais maintenant que ça me tombait dessus je n'étais plus certaine de la vouloir cette sorcellerie. Aussi mon amie décida de changer de sujet.
- N'en parlons plus ok ?
Je lui souris, ravie de cette idée.
- Que dirais-tu de parler de ... mec ! s'enthousiasma-t-elle.
Je soupirais, c'était le sujet favori de Maya ces temps-ci. Surtout avec ses vues sur le "plus beau mec du monde".
- Si tu y tiens ... soupirai-je, mi amusée, mi exaspérée.
Elle me donna un coup de coude dans les côtes :
- Ne fais pas comme si tu les trouvais tous moches.
Je tournai vers elle mes yeux vert d'eau et affichai un sourire en coin, elle avait toucher dans le mille, comme d'habitude.
- Alors il y a 13 mecs dans la classe. On a déjà dit que le plus beau était Fern.
Je roulais des yeux même si elle disait vrai, Fern était effectivement plutôt beau gosse. Avec ses yeux brun vert et ses cheveux blond toujours en bataille, il était vraiment craquant ! Et comble de tout il était intelligent et absolument pas égocentrique. Enfin pas que je sache du moins. L'homme de rêve quoi en fait.
- Si tu le dis, fis-je n'appréciant pas dévoiler cette partie de moi-même.
- Kila ! Il est superbe, arrête un peu, rigola-t-elle.
- Oh c'est bon, sors avec lui si il te plaît tant, répondis-je en esquissant un sourire et levant les mains pour signifier que j'étais en tort et qu'il était effectivement très beau.
- Tu sais bien que ce n'est pas Lui avec un grand L. Fern, c'est un petit l.
Évidemment ! Maya croyait au Prince charmant avec un grand P et au Coups de foudre avec un grand C ! Toutes ces "légendes" complètement irréalistes.
- Si tu le dis.
- Mais oui ! Chris est plus beau et beaucoup plus sensuelle !
J'éclatais de rire. Sensuel ? Chris ? Au mon dieu, on est tombée bien bas, pensai-je.
- Quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit ?
- Chris n'est a-bso-lu-ment pas sensuel !
- Peut-être mais il est trop canon et ce n'est pas une brute au moins !
- Oui c'est vrai. Il est beau mais pas "mignon", fis-je en faisant des signes avec mes doigts pour mettre mignon entre guillemet.
- Quelle importance ?
- Ça dépend si tu préfères les "mignons" ou les beaux ...
Notre discussion partait complètement en vrille, comme à chaque fois d'ailleurs !
- Ok ! Beaux pour moi et mignons pour toi ! Bonne nouvelle on ne se disputera jamais pour un mec !
- Non jamais !
On partit dans un fou rire incontrôlable. Lorsqu'on se reprit enfin je demandai à mon amie si elle ne devait pas rentrer.
- Mince si ! s'écria-t-elle. Je dois vite terminer ce panneau. À demain Kila et ne fait pas de cauchemars, se moqua-t-elle.
- N'importe quoi ! souriai-je, et salut !

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