Prologue

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Quand on est une tueuse qui n'aime pas tuer, la vie devient un brin compliquée au quotidien...

Je suis une Exécutrice au service du Conseil de la Mort. Nous sommes les seuls à avoir le droit privilégié de tuer nos ennemis : les Exécuteurs des autres Conseils n'ont le droit que de blesser leur adversaires. Quel honneur. Bon, en vérité, ça peut se révéler pratique, lorsqu'on ne veut que sauver ses fesses... Lorsqu'on fait partie de mon monde, simplement.

Voyez-vous, sur terre, deux mondes cohabitent : le Monde Humain et le Monde Occulte. Vous l'aurez compris je fais partie du deuxième. Officiellement, nous sommes une minorité de surnaturels dont le devoir est de protéger les humains des Sauvages, dans notre éternelle guerre avec ces derniers. Officieusement, nous régnons sur les humains à leur insu et combattons ces Sauvages pour conquérir la Clé Maudite, sujet principal de la guerre qui a commencé à l'aube des temps, rien que pour assouvir la soif de pouvoir des Hauts Conseils. Nous sommes des fourbes je vous dit. D'autant plus qu'en fait, très peu de gens savent la vérité sur nos chers dirigeants.

Les Hauts Conseils donnent les ordres. Les Exécuteurs y obéissent. Aveuglément, sans résistance. En même temps, si nous ne le faisons pas, nous serons déchiquetés, au sens propre du terme.

Je jure d'un ton las. Il faut que j'en finisse avec ce maudit Sauvage que je combats depuis au moins une bonne dizaine de minutes. C'est qu'il est coriace tout de même, celui-là..

Nous étions en plein désert : deux tueurs , dont ma jolie petite personne, un Invoqueur, une Ignis (élémentaire de feu), une Dryade (élémentaire de terre), et une Enchanteresse, contre une bonne horde de Sauvages. Exaltant, vraiment.

Un coup poing dans la tête, un coup de pied de sa part que je bloque, deux coups dans les côtes, une roulade par terre pour attraper une épée, et hop une tête décapitée et des yeux vides.

Yeux que je fixe jusqu'à ce que la vie les quitte. C'est ma petite touche quand je tue quelqu'un. Dramatique ? Peut-être bien. Efficace ? Oh oui. 

Je le regarde dans les yeux, comme une sorte d'hommage tordu, pour que son visage reste gravé dans ma mémoire, que je ne l'oublie jamais. Après tout, ils ont des raisons plus légitimes que nous pour combattre. Nous sommes les méchants de l'histoire, je vous dis.

Et ça marche. Je n'oublie aucune de mes victimes. Et je me dégoûte de ma vie de plus en plus chaque jour. Pour que j'aie conscience de mes actes. Comme m'avait appris mon père.

Je range mon épée dans son fourreau et me dirige vers les autres. 13 cadavres, précisément, et des dizaines de prisonniers. On a fait un très bon travail dis-donc.

- Tu vas bien, Chéryl ? me demande la Ignis. 

Elle s'appelle Tamara. 

Je crois.

- Ouais ça passe.. Pas toi apparemment, lui fais-je remarquer.

Elle a été en effet blessée au coude.

L'Enchanteresse, Ophélia, si mes souvenirs sont bons, vient l'examiner, et j'en profite pour m'éclipser discrètement. Je me dirige alors vers l'Invoqueur. Elric.

Grand, brun, baraqué, la vingtaine, une longue lance dans la main, il me regarde d'un air sceptique en fronçant les sourcils, l'air de dire : "pas ici". 

Eh bien on n'a qu'à dire que je m'en moque. Je veux lui parler :  je lui parlerai. Aussi simple que cela. Le privilège d'être une tueuse, c'est d'être respectée. Je le fixe des yeux jusqu'à ce qu'il cède en levant les yeux au ciel.

Légèrement dissimulés derrière une petite dune de sable, que le vent fouettait vigoureusement, je fais face aux autres Exécuteurs, Elric leur tournant le dos, nous nous tenons l'un à côté de l'autre en évitant de croiser nos regards.

La Clé MauditeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant